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Grâce à une politique plus habile que glorieuse, mais en tout cas efficace, le Brandebourg fut l’un des bénéficiaires des traités de 1648, encore qu’il dût

attendre 1680 pour réaliser toutes ses acquisitions (Magdeburg).

Lorsque, en 1701, Frédéric III se fit couronner roi en Prusse sous le nom de Frédéric Ier, le Brandebourg ne constituait plus guère que 40 p. 100 environ de la superficie de l’État des Hohenzollern, qui est devenu une puissance baltique aussi bien qu’une puissance elbienne et rhénane. Il était non plus le noyau de l’organisme politique, mais l’un des ressorts territoriaux de l’administration. En compensation de l’important recul politique des États, notamment de la noblesse, après 1654, le souverain abandonna une bonne partie de ses droits sur la terre aux propriétaires qui continuèrent à vivre dans un cadre féodal à peine modifié par divers édits. Le terme de Kurmark (Marche électorale), qui s’introduit à partir de 1640, désigne l’ensemble des terres héréditaires, à l’exclusion de la Neumark, et correspond au trait d’union entre la partie orientale — déjà fort importante et que les partages de la Pologne, venant après l’annexion de la Silésie autrichienne, accroissent encore — et la partie occidentale — sans doute bien développée, mais qui ne rejoindra en étendue la partie orientale qu’en 1815. Pendant le XVIIIe s., tout en développant les assèchements et en favorisant de nouvelles productions agricoles, les souverains installent des manufactures et des écoles.

En 1815, l’administration de l’État dit « prussien » est profondément ré-

formée ; la Mark, qui survivra encore dans le cadre de ce qui subsiste du droit des États, disparaît et fait place à une province, dont les frontières sont modifiées (perte de la Altmark elbienne, acquisition de la Basse-Lusace et de la Neumark) et qui est partagée en trois districts (Regierungsbezirke), Potsdam, Francfort-sur-l’Oder, Berlin (mais, dès 1821, ce dernier district disparut) ; la diète provinciale, instituée en 1823, ne tint pas compte de ces nouveautés jusqu’en 1875. Cette année-là, une ordonnance institua une diète régionale (Landtag), après qu’en 1872 une ordonnance eut créé un cadre cantonal (Kreise). En 1918, en abdi-quant, Guillaume II cessait aussi d’être margrave du Brandebourg, mais la province subsistait moins comme entité

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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 4

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administrative que comme concept politique et culturel.

En 1945, une grande partie des terres orientales de la province devint polonaise (un peu plus de 11 300 km 2, soit près d’un tiers) ; ce qui restait constitua pendant quelque temps un Land de la zone soviétique (Constitution du 31 janv. 1947, élection de la diète).

La Prusse ayant été déclarée dissoute par les Alliés, le Land fit partie de la D. D. R., d’abord république fédérative. Le 23 juillet 1952, le Brandebourg cessa définitivement d’exister juridiquement ; son territoire fut partagé en trois départements (Potsdam, Francfort, Cottbus) et diminué de quelques districts rattachés aux départements de Neubrandenburg et de Schwerin.

Le Brandebourg fait partie du mythe prussien, mais ne s’identifie pas à lui.

Il a signifié, surtout au XIXe s., ce qu’il y avait de constance dans l’État, avec ses structures sociales qui avaient peu varié, son patriotisme qui fut par moments plus que du patriotisme local, ses cités rurales et ses grandes proprié-

tés, et même cette réserve naturelle, acquise en 1815, qu’est le Spreewald avec ses canaux et sa population slave.

Berlin s’est développé aux dépens du Brandebourg, et certains considèrent la grande capitale comme une sorte de chancre.

J. B. N.

F Allemagne / Berlin / Hohenzollern / Prusse /

Saxe.

J. Schultze, Die Mark Brandenburg (Berlin, 1961-1969).

Brandes (Georg)

Critique littéraire danois (Copenhague 1842 - id. 1927).

Georg Brandes fut, pendant vingt ans, l’autorité littéraire des pays nordiques. La littérature européenne,

jusqu’alors sans écho véritable en Scandinavie, trouva en lui un disciple éminent. Il joua, en réalité, un double rôle : tout d’abord, il fit connaître la littérature moderne et suscita une nouvelle école, souvent dénommée naturaliste, sur laquelle son esprit synthé-

tique et critique exerça une influence considérable ; en second lieu, il attira l’attention de l’Europe sur la nouvelle littérature réaliste des pays nordiques. Autour de lui se groupèrent des noms illustres tels que J. P. Jacobsen, Ibsen, Bjørnson, Strindberg. Sa correspondance s’adressa aux écrivains de l’Europe entière, tels que Taine, Renan, Anatole France, voire Clemenceau, pour ne citer que des personnalités françaises. Il fut aussi l’un des premiers à avoir invité Kierkegaard, Ibsen, Strindberg et Nietzsche à participer au grand débat intellectuel de l’Europe.

Georg Brandes est le fils aîné d’une famille de gros négociants israélites.

En 1859, à Copenhague, il commence ses études universitaires, essentiellement consacrées à l’esthétique. L’école romantique, danoise et française, inté-

resse Brandes, mais, très vite, Kierkegaard et Goethe deviennent ses auteurs préférés. Ses années universitaires sont marquées par une activité litté-

raire particulièrement féconde. Mais le jeune Brandes se tourne également vers la philosophie : il subit l’influence de Hegel, de Taine et de Stuart Mill, mais ce sont surtout les philosophes passionnés (Kierkegaard, Nietzsche) qui l’engagent existentiellement. C’est au moment où il part pour Paris (1866) que Brandes découvre Taine, celui qui sera son principal interlocuteur dans sa thèse de doctorat l’Esthétique française contemporaine (1870). En France, il prend conscience du retard de la Scandinavie dans le domaine littéraire : il faut que quelqu’un l’initie aux critères d’une littérature plus réaliste, et Brandes décide qu’il sera celui-là. Après un second voyage en France et en Italie, il ouvre, en novembre 1871, à l’université de Copenhague, une série de conférences sur les Grands Courants dans la littérature du XIXe s., qu’il réunira ensuite en six volumes (1872-1890). Il y expose ses idées es-thétiques, affirmant la nécessité pour

la littérature d’être intimement liée à la réalité. Ces conférences tracent un véritable programme d’action philosophique et littéraire. La réaction est vive, et même violente dans les milieux bourgeois. Le critique se voit refuser une chaire à l’université. En revanche, autour de lui se groupe une élite qui va former une nouvelle école littéraire.

Brandes collabore à la Nouvelle Revue danoise, qui sera le point de ralliement du naturalisme. En 1883, il rédige son célèbre ouvrage les Hommes de la percée moderne. Mais, à partir de 1889, il tend à s’isoler, soit que la nouvelle génération symboliste le rejette tout comme il la refuse, soit que, sans cesse engagé dans de nouveaux combats, il finisse par se lasser de l’indifférence du public. Il évolue alors vers une ascèse individualiste : la pensée de Nietzsche lui revient comme une révélation essentielle. Il traite dans un nouveau cycle de conférences du Radicalisme aristocratique. Le culte de la personnalité de l’homme exceptionnel occupe le centre de sa pensée. Il consacre des biographies passionnées à Shakespeare (1895), Goethe (1915), Jules César (1918), Michel-Ange (1921). À la fin de sa vie, il n’est plus pour la nouvelle littérature nordique un chef d’école écouté, mais on ne lui conteste pas le mérite d’avoir pris une part essentielle à l’éclosion de la littérature moderne en Scandinavie.