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« ici repose » classe une inscription : Hic situs est est païen, Hic depositus figure sur les inscriptions chrétiennes anciennes, Hic jacet, hic requiescit in pace correspondent à des inscriptions chrétiennes tardives.

Les autres inscriptions lapidaires se rattachent à quelques groupes bien déterminés. Ce sont des dédicaces aux divinités, auxquelles on consacrait un autel, un temple, voire un bosquet. La date de la dédicace était indiquée par le nom des consuls en exercice cette année-là. Ce sont aussi des inscrip-downloadModeText.vue.download 591 sur 591

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 7

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tions dédiées aux hommes, inscriptions honorifiques, parfois placées sous des statues, et faisant part de la reconnaissance d’une cité ou d’un collège à l’égard de quelque protecteur ou donateur. Des dédicaces d’édifices : « X a fait construire ce monument en telles circonstances. » Des textes législatifs : lois, sénatus-consultes, édits impé-

riaux ; on en possède d’autant plus que les décisions d’intérêt général avaient été gravées en différents endroits de l’Empire, comme ce fut le cas de l’édit du maximum de Dioclétien, dont on a retrouvé un fragment ici, un fragment là.

Officielles aussi étaient les bornes miliaires, marquant les distances

sur les routes et portant la date des constructions et réfections de celles-ci, les diplômes militaires, plaquettes de bronze qui attestaient les droits civiques de ceux qui quittaient le service, les fastes, listes des magistrats, année après année.

C’est grâce aux fastes, et en particulier aux fastes consulaires, listes

des consuls, que l’on peut dater les inscriptions. Mais ce n’est là, pour l’épigraphiste, qu’une tâche parmi bien d’autres.

Techniques de

l’épigraphiste

En présence d’une inscription inédite, fréquemment mutilée, peu lisible, donc peut-être malaisée à déchiffrer sur place, on prenait autrefois un estampage en appliquant à la brosse deux feuilles de buvard mouillé sur les reliefs et les creux de la pierre. Après séchage, on retirait une épreuve en carton facile à étudier à tête reposée.

Aujourd’hui, la photographie a assez généralement détrôné cette pratique.

L’éclairage en lumière rasante permet de déceler des détails invisibles autrement, et parfois même de découvrir des traces de lettres sur une pierre à première vue anépigraphe.

On peut procéder, sur place ou sur photographie, au déchiffrement. On se heurte alors aux difficultés causées par les abréviations et par les ligatures.

On a répertorié des centaines d’abré-

viations d’usage courant dans les inscriptions. Beaucoup sont réduites à un sigle. Tribunus (tribun) peut s’abréger en TR, TRIB, TRIBV ou TRIBVN.

Les inscriptions funéraires fourmillent d’abréviations banales : HSE, hic situs est, il repose ici. DM, Dis Manibus, aux dieux mânes. S T T L, sit tibi terra levis, que la terre te soit légère ! Par les ligatures, deux lettres, ou davantage, sont liées ensemble pour économiser la place : Quand quatre, cinq

ou six lettres sont ainsi liées, ce sont des monogrammes difficiles à clarifier.

Une lettre retournée peut signifier le féminin : F, filius, fils ; filia, fille.

Si l’inscription n’est pas gravée

avec soin, mais griffonnée sommairement, elle emploie non pas la capitale romaine bien connue mais une écriture cursive, caractérisée par une multiplicité de jambages (hastes) verticaux recourbés, et d’un déchiffrage autrement malaisé. C’est cette écriture que l’on trouve sur les tablettes de cire et sur les graffiti muraux. Elle s’apparente à celle des papyrus, et le rapprochement

de ces deux écritures permet d’entreprendre l’étude d’une paléographie épigraphique. La forme des lettres, cursives ou non, constitue un important élément de datation, celle-ci relevant également des indications intrinsèques du texte ou de la comparaison avec des inscriptions analogues datées. L’examen du texte se poursuit par l’analyse des bévues éventuelles du lapicide, lapsus dont il est préférable de dépister l’origine. La connaissance de la physionomie d’ensemble des inscriptions et des habitudes d’écriture et de ponctuation (un point entre chaque mot, à mi-hauteur de la ligne) permet non seulement de leur assigner d’emblée une époque, mais aussi de dépister les inscriptions fausses que l’Italie a produites autrefois en grand nombre et qui se trahissent par quelque maladresse, quand ce n’est pas par leur provenance.

Il reste encore à restituer éventuellement les manquants ; la rupture de la pierre peut avoir fait disparaître le début ou la fin de plusieurs lignes.

C’est par référence à d’autres inscriptions qu’on arrive à combler les lacunes sans risque d’erreur.

L’inscription ainsi déchiffrée peut être exploitée pour son contenu. Celui-ci peut avoir un intérêt historique évident d’emblée, par exemple s’il s’agit d’un texte de loi. Mais, plus souvent, l’enseignement qu’on en retire n’est pas direct. D’une dédicace à une divinité faite par un militaire dans une garnison lointaine, on tirera une information sur la propagation d’une religion.

Par l’analyse statistique, facilitée éventuellement par l’ordinateur, ces textes d’une banalité et d’une monotonie

fastidieuses que sont les inscriptions funéraires peuvent révéler des données imprévues. On a pu établir des statistiques démographiques : origines ethniques, d’après l’apparence des noms, et importance des minorités, durée moyenne de vie selon les professions, évolution des croyances et des usages d’une génération à l’autre.

La philologie aussi est intéressée : l’inscription donne non seulement

l’écriture contemporaine authentique, la véritable orthographe antique, mais aussi les particularités linguistiques

locales ou les façons de parler populaires, toutes choses qui n’émanent pas des textes littéraires, d’autant moins qu’ils ont été maintes fois recopiés au cours des âges.

Les recueils d’inscriptions

Au XIXe s., on a entrepris de réunir les inscriptions dans de grands recueils.

Les inscriptions latines, antiques et païennes, l’ont été dans le Corpus inscriptionum latinarum, publié par l’académie de Berlin sur l’initiative de Theodor Mommsen (1817-1903) à

partir de 1863. Les inscriptions latines chrétiennes ont fait l’objet de recueils différents.

Les inscriptions grecques, moins

nombreuses, sont très intéressantes du fait qu’elles ont plus fréquemment le caractère d’actes officiels : lois et traités étaient gravés sur marbre pour être exposés à la vue de tous sur les places ou dans les temples, et ces marbres massifs ont mieux survécu que les

plaques de bronze des Romains. Le recueil des Inscriptiones graecae réunit une partie appréciable des inscriptions grecques, bien qu’il soit inachevé.

Les inscriptions sémitiques figurent dans le Corpus inscriptionum semitica-rum, en cours de publication. D’autres recueils ont réuni les inscriptions de l’Inde antique, celles des Etrusques, etc. Hors du domaine antique, l’épigraphie ne joue qu’un rôle restreint.

R. H.

R. Cagnat, Cours d’épigraphie latine (Tho-rin, 1855 ; 4e éd., Fontemoing, 1914). / M. Labat, Manuel d’épigraphie akkadienne (Office des éd. Univ., 1951). / R. Bloch, l’Épigraphie latine (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1952 ; 4e éd., 1969). / S. Joyce et Arthur E. Gordon, Contributions to the Palaeography of Latin Inscriptions (Berkeley, 1957). / A. G. Woodhead, The Study of Greek Inscriptions (Cambridge, 1959).