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— Allons-y! dit le notaire, il me serait doux d'inscrire déjà une vengeance pour la satisfaction des mânes de Badinard!

— Soit, nous allons chercher cette preuve. Je termine ma liste; si vous le voulez bien, je commencerai mes opérations par les personnages suivants :

« M. Paul Matassin.

« L'ambassadeur de Zanguebar.

« Le vicomte Exupère de Champbadoûr. « Don Ramon Carabellas.

— Très bien ! dit le notaire, voici maintenant une avance de cinquante mille francs pour l'entrée en campagne. "Vous allez prendre un appartement

M. Paul Matassin et Cornélie.

dans un beau quartier, et organiser votre maison. J'ai jeté les yeux sur un entresol rue Saint-Georges, nous le verrons ensemble et s'il vous convient, vous l'arrêterez ; quant aux menus détails de votre installation, je m'en occuperai Badinard sera content !

— Je m'en rapporte à vous, l'entresol me convient I

— Bien ! mon tapissier va être prévenu, tout sera prêt pour ce soir. Si vous le voulez, aoUa retournerons' d'abord à l'hôtel Hippocrute Pendant ce temps, M. Miradoux s'occupera des recherches nécessaires sur M. <!* Champbadour et M.Garabellas; L'ambassade de Zangucbarest facile à trouver, tout ira bien !

— Tout ira bien ! s'écria Gabassol en insérant dans un portefeuille, qui n'avait jamais été à pareille fête, les cinquante premiers billets de mille francs de la succession.

— Si voulez me faire l'honneur de partager notre modeste déjeuner, reprit le notaire, madame Taparel sera heureuse de connaître l'homme auquel notre ami Badinard a légué le soin de sa vengeance...

Cabassol s'inclina. M. Nestor Miradoux était compris dans l'invitation.

— Madame Taparel, dit le notaire dans le cours du repas, vous voyez en m m- trois hommes attachés désormais à une œuvre formidable : M. Cabassol esl Le vengeur, mais nous sommes ses collaborateurs; M. Nestor Miradoux est chargé de préparer, M. Cabassol d'exécuter et moi je suis le notaire, le fonctionnaire public dont la haute et délicate mission sera d'apprécier et de constater. Les devoirs de ma charge me forceront souvent à m'absenter pour accompagner M. Cabassol dans le monde, autant pour l'aider de mes conseils que pour accomplir les conditions de surveillance imposées par le testament de Badinard. Il faut nous attendre à bien des dérangements, mais les affaires sont les affaires, nous en serons récompensés plus tard par la satisfaction du devoir accompli !

Immédiatement après le déjeuner, M e Taparel fit atteler sa voiture, el après avoir donné ses dernières instructions à M. Miradoux, il partit avec Cabassol pour l'hôtel Hippocrate.

— En vérité, dit-il à Cabassol, en montant l'escalier, j'avais mal jugé cet hôtel, il est très tranquille...

— Patriarcal! ajouta Cabassol.

Jules, le garçon de l'hôtel Hippocrate, était en train de lire les journaux d'un locataire dont il faisait la chambre; en entendant la voix de Cabassol, il accourut :

— Monsieur, dit-il, Cornélie n'est pas venue... vous savez, moi je trouve pas ça joli !

Cabassol et le notaire entrèrent dans la chambre.

— Voyons, dit M e Taparel, voyons cette preuve de la première vengeance. Comme il faut procéder par ordre, j'inscris en tète de ma liste, le nom de M. Paul ftCatassin et j'attends pour constater!...

Cabassol se dirigea vers sa commode et bouleversa les tiroirs.'

— C est la, dit-j], que je range mes lettre- ci papiers, mais je ne sais jamais dans quel tiroir, Julesbouleverse tout pour lire ma correspondance...

voyons, voyons...des billets pour l'Odéon, c'est pas ça... ah! des photographies, non ce sont les anciennes... ah! voilà, des lettres d'elle, tenez, il n'y a qu'à choisir! ,

Et il lendit un paquet de lettres défraîchies à M e Taparel.

— Le devoir m'oblige à tout lire, répondit le notaire, je suis obligé de me montrer indiscret...

Mou petit Cabassol, A demain trois heures au Lux., sous la statue de la reine Blanche, etc., etc.

Mon cher, J'ai une couturière qui m'embête pour trente-cinq francs, je compte, etc.

Mon cher Toto, Tu es si gentil que je t'adore...

J'ai une couturière qui m'embête pour 35 francs.

— Mais, il y a des notes au crayon en marge, des protestations : blague! blague! blague! - - C'est de vous?

— Non, c'est Jules, le garçon, un vieux philosophe, qui a la manie d'annoter ma correspondance... je le laisse faire, il connaît si bien les femmes!

— Ah! très bien... voici une lettre concluante pour nous, M. Paul Matas-sin y est nommé :

Mon "vieux Cabassol, Enfin, je respiré!... je vais donc pouvoir t'aime? sans remords... Ça me faisait de la peine de tromper ton ami Matassin, bête, mais bon garçon. 11 s'en Va pour quinze jours dans son pays. Je ne le tromperai pas, puisqu'il ne sera plus là! Ça t'ait quinze jours de tranquillité!

Je t'adore de plus en plus !

Ta Cornélie.

— C'est parfait, s'écria le notaire, c'est parfait, mais Cornélie, n'est-ce pas le petit nom de la cantinièré apache avec qui vous fûtes hier au bal?

— C'est elle-même. Lorsque Paul Matassin est revenu, Cornélie lui a déclaré que c'était fini, que pendant son absence son cœur avait tourné et que présentement il brûlait d'une belle flamme pour votre serviteur. Hier donc, il y avait deux mois que Cornélie m'adorait ouvertement, lorsque nous sommes allés au bal, costumés en apaches. Je dois vous dire que Paul était de la partie, — car nous ne nous sommes pas brouillés, — il étah en sapeur...

— Attendez ! exclama le notaire, qu'est devenue Cornélie depuis hier? quand nous vous avons réveillé ce matin, vous la réclamiez...

— Mais oui, figurez-vous que le punch de uns Paul éuit en sapeur. amis étail h forl et h abondant qu'il m'avait un

peu troublé les esprits, je erovais être revenu ce malin avec Gornélie et je me trompais... C'est la faute à Paul Matassin...

— Malheureux! Il n'y a rien de fait. Paul Matassin vous a enlevéCornélie, vous n'avez pas vengé Badinard...

— Sapristi! vous avez raison, tout est à recommencer! mais rassurez-vous, je vais retrouver Gornélie, j'ai Gabassol et Badinard à venger, elle me raimera! à nous deux, Matassin!

Un peu contrariés de ne pouvoir enregistrer un premier succès, M e Tapa-

Le fastueux Cabassol s'était fait habiller par un tailleur à la mode.

rel et notre ami Gabassol reprirent leur voiture pour aller visiter le petit entresol que le prévoyant notaire avait retenu pour le légataire de Badinard. M. Miradoux avait déjà prévenu tout le monde, le tapissier était là, surveil lant la besogne d'une brigade d'ouvriers; on apportait le mobilier, on posait les glaces, on clouait les tentures, on disposait les menus bibelots et les objets d'art.

Gabassol n'eut qu'à s'extasier, M e Taparel faisait bien les choses. Gela tenait du conte de fées; à six heures du soir les ouvriers avaient terminé, le nid de Gabassol était prêt; à six heures et demie, se présentèrent un valet de chambre et un petH groom engagés par Miradoux, et à sept heures le dîner vint, envoyé-d'nn grand restaurant par l'aimable Miradoux.

Le lendemain, vers trois heures, Cabassol fit irruption dans le cabine! de M Taparel. Il était rayonnant et transformé, transformé parce que sa première pensée le matin avait été de se faine babiller par un tailleur à la mode, et rayonnant parce qu'il avait pu retrouver Paul Matassin et faire passer un mol à Cornélie par l'entremise de Jules, le garçon de l'hôtel llippocrate.