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" A la voix de l'Indien, dit Nonnos, ses noirs compatriotes accourent «Ml l'oule sur les bords du fleuve au doux parfum. L'un, affermissant ses deux pieds sur le limon, enfoncé jusqu'au noml)ril dans les flots <|ui le baignent de toutes parts, se montre à demi incliné, la poitrine recourbée sur le courant, et y puise dans le creux de ses mains cette «•au qui distille le miel. Un autre, auprès de l'embouchure, possédé «l'une soif brûlante, plonge sa longue barbe dans ces ondes pour|irées. «ît s'étendant sur le sol de la rive, il aspire à pleine bouche la rosée de Bacchus. Celui-ci, tout penché, s'approche de cette source si voisine, nppuie ses bras sur le sable humide, et reçoit sur ses lèvres altérées le flot de cette liqueur qui altère encore. Ceux qui n'ont plus à la main <jue le fond de leur cruche brisée, jniisent le vin dans un coquillage. Un grand nombre s'abreuvent à ce torrent rougi, et remplissent largement les écuelles, coupes rustiques des pasteurs des champs. Après avoir ainsi englouti le vin à plein gosier, ils voient les rochers se doubler sous leurs regards, et s'imaginent que l'onde coule des deux ■côtés ; cependant le fleuve continue à murmurer dans son cours et i\ faire bouillonner ses flots brunis, tandis que les bords embaumés se renvoient l'un à l'autre les vagues du délicieux breuvage. Un torrent d'ivresse inonde l'ennemi. Celui-ci extermine la race des bœufs, <'oiume s'il moissonnait la génération des satyres. Celui-là poursuit les troupes de cerfs aux tètes allongées, et les prend, a leur peau symétriquement mouchetée, pour la tribu des bacchantes, trompé par les nébrides élégantes et diaprées dont elles se parent également. Un guerrier, en poussant de grands cris, s'attaque à un arbre voisin <|u'il frappe de tous côtés, et comme il s'aperçoit que les rameaux on-<lulent remués par les vents, il abat les pointes des plus jeunes tiges, <^t fend ainsi le branchage d'une chêne touflu, pensant couper avec son glaive l'intacte chevelure de Bacchus. C'était lutter contre le feuillage -<'t non contre les satxres; et dans son imbécile joie, il remportait «•outre l'ombrage? une onibr(> di^ victoire. D'autres Indiens, irrésisfible-iuent transportés par ces fumées qui égarent l'esprit, imitent avec leuis g:laives, leurs piques et leurs casques, les joies guerrières des cory-I)antes, et dans leur danse des armes ils frappent à la ronde leurs l)0ucliers d'une main alt(MMiativ<' et d'un fer tournoyant. L'un s'em-jiorte aux chants de la musc bachiipie. et gambabe comme dans les

LA LKGENDl': HEROIQL'K DE BACCHUS.

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thanirs (les satyres ; l'aiitiv s'atteiidiit au ntiilement du tambourin, et «lans son goùl poussé juscjuau déliic [tour le bruit sonore, il jette au vent son inutile carquois. »

Un vase grec nous montre le roi des Iiidicns_, terrassé [)ar Baccbus, ({ui tient en main le tliyrse et le c«'[) de vigne. Néanmoins le combat apparaît bien rarement sur les monuments antiques; mais on y voit

Fisc. ôli. — Piotoui-de la conquête de l'Tnde.

fréquemment des scènes relatives au triomphe de Baccbus et de son armée. Presque toujours ce sont des prisonniers indiens, les mains enchaînées, marchant en compagnie des éléphants et des tigres de leur pays et escortés de ménades et de bacchantes (fig. 342 à 544).

Un bas-relief du musée Chiaramonti représente Baccbus, assis sur un trône avec Pan à ses côtés. I.e roi Dériades est captif et prosterné

Fitr. ÔVô. — Bacclius et Pan d'après un fragment de l)as-rfliid' antiiiue".

devant le jeune dieu, tandis que des Indiens sont foulés aux pieds des chevaux et des centaures, qui traînent dans des chars Silène et les bacchantes. Dans un autre monument on voit un lion suivi de deux chameaux portant un Indien et une Indienne, symbole des peuples soumis. Puis vient le char de triomphe, traîné par deux éléphants et portant Baccbus vainqueur, appuyé sur son fidèle Ampélus, et entouré de son cortège. Le vieux Silène ivre et chanchelant sur son Ane figure

BACCIILS I-:T Sn.\ CitHTKf.i':

soiiM'iit dans ces pompes triomphales. Nous avons au Louvre deux, bas-iidiels sur la eonqiiète de l'Inde: l'nn représente le eombat, l'autro le triomphe. Dans le premier, Hacehus a ehe\al vient de renverser un de ses ennemis et est au\ pi-ises avec (Umiv antres. Une ménade placée à côte du jeune dieu a près d'elle une corbeille (ou ciste mystique), d'où sort un serpent. Dans la môme scène, on voit un éléphant aver des IndicLïs. dont l'un s'affaisse sous la blessure (pTil ^ient de recevoir, tandis (pi'un auti'e lè\e le Itras ponr demander grâce, et qu'un troi-sieme olVre au dieu victorieux une couronne de fleurs. Dans le triomphe de Hacchns, nous voyons le jeune con([uérant de l'Inde, mollemenl couché sur son char triomphal que traînent les [(anthères tenues eu laisse par Silène ; un amour est monté sur uiu' d'elles. Le chai- est précédé de satyres, de ménades jouant des cymbales on battant du tambourin, d'amazones casquées, et snivi d'un éléphant portant de--juisonniers indiens. Le retour de la conquête de l'Inde aiqtaraît également dans l'art moderne, et il y a à la Galerie Nationale de Londres un admiralde tableau du Titien sur ce sujet.

Bacclius à Thébes. —Après avoir parcouru l'Asie. Bacchiis. (jui

rig-. .'iWi. — la compagnon d'Acétès.

('lait né a Thèbes, voulut aussi que cette \ille fût la première de la (irèco (pii connût son culte : c'est de là (pi'est venu son nom de lîacchus^ Thébain.

Au début de la tragédie des Bacchfniios. d'Euripide. Bacchus fait connaître son incarnation et son arrivée à Thèbes. << Me voici sur cette terre des Thébains, moi, Baccbus, qu'enfanta jadis la fille de Cadmus, Sémélé, accouchée par les feux du tonnerre ; j'ai quitté la forme divine pour une forme mortelle et je viens visiter la fontaine de Dircé eli les eaux de l'Isménos. Je vois j)rès de ce palais le toml)eau de ma mère frappée de la foudre, et les ruines fumantes de sa demeure, et l.s (lamme du feu céleste encore vivante, éternelle vengeance de Junon contre ma mère. J'approuve la piété de Ladmus. ([ui, rendant ce lieu inaccessible aux pieds des profanes, la consacré à sa tille; et je l'ai ombragé de toutes parts des pampres verdoyants delà vigne. J'ai quitté

les Ncdioijs de La Lydie, où Lor abonde et les champs des Plirygiens ; j'ai traversé les plaines brûlantes de la Perse et les \illes de la Bae-trianc, la Médie couverte de frimas et Iheiireuse Arabie, et l'Asie entière, dont la mer salée baigne les rivages couverts de cités florissantes. (|ue peuple à la fois un mélange de Grecs et de barbares, et c'est ici la première ville grecque où je suis entré après avoir conduit là-bas les danses sacrées et célébré mes mystères, pour manifester ma divinité aux mortels. Thèbes est la première ville de Grèce où j'ai fait entendre les hurlements des bacchantes couvertes de la nébride et armées du thyrse entouré de lierre. »

Les matelots d'Acétés. — Un vaisseau venant de Lydie s'arrêta un jour à l'île de Naxos. Acétès, le capitaine, ayant ordonné <à ses matelots daller chercher de l'eau dans l'île, ceux-ci rapportèrent un enfant dune beauté singulière qu'ils avaient trouvé dans un lieu désert; ce jeune enfant encore assoupi et presque ivre, ne marchait qu'en chancelant et avait bien de la peine à les suivre. A son air et à sa démarche, le capitaine fit part à ses compagnons de la conviction où il élait que cet enfant extraordinaire ne pouvait être qu'une divinité. Mais les marins qui ne partageaient pas l'enthousiasme de leur capitaine, déclarèrent que cet enfant était leur pro|)riété, puisque c'étaient eux qui l'avaient trouvé, et que leur intention était de le vendre, ne doutant pas qu'ils en tireraient un bon prix. Acétès tenta de s'opposer à leur dessein, disant qu'il ne souffrirait pas qu'on embarquât l'enfant, mais l'équipage, ne voulant pas lâcher sa prise, se révolta et remit à la voile.