Les filles de Minyas. — Tandis ([ue le culte de liacclius était déjà rcîconnu dans toute la Grèce, les filles de Minyas s'obstinaient à nier sa divinité. Au lieu d'assister aux fêtes du dieu elles restaient chez elles à travailler et raillaient les mystères sacrés. Un soir qu'elles étaient en liain de s'égayer aux dépens de Bacchus et de son culte, elles entendirent tout à coup un bruit confus de tambours, de flûtes et de trompettes, <jui les étonna d'autant plus qu'elles ne virent personne. Une od(>ur de niNrrhe et de safran se répandit dans la chambre, et la toile qu'elles tissaient se couvrit bientôt de verdure : il y poussa des pampres et des HMiilles de lierre. Le fil qu'elles venaient d'em})loyer se convertit en ceps chargé de raisins, et ces raisins j»rirent la couleur de la pourpre qui était répandue sur l'ouvrage.
Déjà l'on- était à ce temps de la journée, où les ténèbres (pii commencent à se répandre et la lumière qui disparaît, font douter s'il fait jour ou nuit, lorsqu'un bruit épouvantable ébranla toute la maison. Llle parut tout à coup remplie de flambeaux allumés et de mille autres feux qui brillaient de tous côtés ; on entendit des hurlements comme si la maison eût été remplie de bêtes féroces. Les filles de Minyas, effrayées, allèrent se cacher |M)ur se mettre à couvert du feu et de la lumière ; mais pendant ([u'elles cherchent les endroits les plus secrets de la maison, une membrane (extrêmement déliée couvre leur corps, et
HACCIIIS ET SUN CORTEGE-
des ailes loil minces s'étendent sur leurs bras. L'obscurité qui régne dans les lieux où elles se sont cachées les empêche de s'apercevoir (|uelles ont changé de ligure. Cependant, elles s'élèvent en Tair, où. sans avoir de jdtunes, elles se soutiennent avec des .liles composées d'une peau mince et transparente. Klles veulent parler, mais elles ne poussent qu'tui son faible, et proportionné à la petitesse de leur cor[»s: une espèce de murnnnc plaintif est toute la voix qui leur reste pour exprimer leurs regrets. Le séjour des maisons leur j»laît encore, el elles nainu'iil point les forêts, comme les autres oiseaux ; ennemies de la lumière (pi"elles fuient, elles ne ^olelll ([ue la nuit : elles sont rhaii-ves-soiiri^. (0\ iitE. i
Bacchus et Lycurgue. — Pendant ce tem|>s-là, ijacchus, a\ant porté son culte eu Tliiaci'. fut poursuivi par le roi du pays, nomme
Fig. .")."»0. — lî.icclm^ combattant P(n-<i'p d'api'ès une peinture tl
Lycurgue. «pii, |u-obahlenn'ul ell'rayc par les etï'ets de l'iviesse, a\ail fait ai'iacher les \ignés du pays. Bacchus fut obligé, pour se sauver, de se précipiter dans la mer, où il fut reçu par Téthys, à qui il donna pour prix de son hospitalité une coupe d'or faite par Vulcain. Toutes les bacchantes et les satyres qui l'avaient accompagné furent jetés en prison : c'est en punition de ce fait que la contrée fut frappée de stérilité, et Lycurgue, devenu insensé, tua lui-même son fils Dryas. L'oracle ayant déclaré que le pays ne povurait recouvrer sa fertilité tant que le roi impie serait \ivant, ses sujets renchaînèrenf sur le mont Rangée, où il fut foulé aux pieds de leurs chevaux. Les bacchantes délivrées enseignèrent les mystères du dieu nouveau dans la Thrace. La lutte de Bacchus et de Lycurgue est représentée a>ec diverses variantes sur les monuments anti([U(>s. Siu- un vase peint, nous voyons le roi de Thrace frappant les Ménades dont une est tombée à ses pieds. Sur un sarcophage à Bome, Lycurgue est représenté combattant avec la double
liacluî dont so sorvaicMit los barbares (fig. .")48j. Une bacchanle, eoiicliée à ses pieds, se mélaiiiorphose en vigne pour l'enlacer de ses rameaux ^lt embarrasser ses mouvements. Une ménade, ayant près d'eMe la panthère bachique, combat le roi avec d(>ux torclies allumées, tandis que Bacchus regarde la scène, en s'appu\ant indolemment .sur Silène. Une peinture de vase nous montre Lycurgue tuant son fils avec la hache à (h'ux tranchants.
Bacchus et Persée. — La fable de Bacchus jeté à la mer et recueilli par Téthys à qui il otîre une coupe d'or se rapporte, suivant Athénée, à la fabrication du vin et traduit mythologiquement Ihabi-(ude qu'on avait, en cerlaines contr(''es, de se servir d'eau de mer pour accélérer la fermentation du raisin.
V Argos, où Junon était spécialement honorée, le culte de Bacchus eut beaucoup de peine à s'établir. Les habitants refusèrent de l'honorer, et tuèrent les bacchantes qui l'accompagnaient. Le dieu frappa de folie furieuse les mères qui se mirent à déchirer leurs propres enfants. Le héros Persée, protecteur d'Ai'gos, vint alors combattre Bacchus, et d'après un A'ase grec où cette scène est figurée, il ne paraît pas avoir eu le dessus (fig. 550). Cependant, d'après les traditions argiennes, il aurait été victorieux et aurait môme jeté Bacchus dans le lac de Lerne. Pausanias dit simplement que, lorsque la querelle fut apaisée, Bacchus fut honoré à Argos où on lui éleva un temple.
Lreuzer cite un vase, dont le sujet consacre lintroduction de la vigne en Etolie. " On y voit, dit-il, Althéc, femme d'OEnée, roi de Calydon, s'entretenant avec Dionysus épris d'elle, du haut d'une fenêtre, où nous la montre également une peinture qui complète celle-ci et qui offre le dieu endormi devant la porte, dont OEnée vient de franchir le seuil pour lui céder la place. On sait que, pour prix de cette complaisance, il recul le présent de la vigne, et qu'Althée eut de Bacchus la fameuse Déjanire. épouse d'Hercule, comme elle (Mit de Mai-s le héros Mé-h'agre. »
Bacchus et Érigone. — Ce fut sous le règne de Pandion, lils d'É-rechthée, roi d'Athènes, que Bacchus, accompagné de Cérès, >isitapour la première fois lAttique. Cet incident mythologique a une certaine importance pour rintelligence de l'histoire, parce qu'elle montre que, dans ro]>inion des Athéniens, la culture de la vigne et du blé a été précédée dans leur pays par celle de l'olivier, que Minerve leur avait enseignée au moment même de la fondation de leur ville.
Bacchus. en arrivant, descendit chez un Athénien nommé Icarius, (|ui le reçut très-bien; en récompense de cette hospitalité Bacchus lui .•ip|iiit l.i t)ianière de faire le vin. Icarius, eu ayant fabriqué, voulut en
BACCHUS ET S(i.\ COHTKi.i;.
l'aire lionli'i aii\ passans (ralciilcmi-. (jiii le ti'(ni\rr*'iit dcliciciix. Mais ils s'onivrt'rentcomplétc'iiKMil, cl. croyant qu'Icarius les avait cinjioison-iiés, ils le jctci-cnl dans un puits. La visite de Bacclms à Icariiis est figurée sur |tlusieiu's bas-rcliel's (fig. 551) : il faut remarquer que, dans cette scène, le dieu apparaît toujours sous la lornu'du IJacchus oriental.
Fig'. ,'),')!. —Bacclms clicz Icai'iiis id'api'cs un bas-relief anti({ii(', au Louvre).
Icarius avait une fille extrêmement belle appelée Erigone, et Bac-chus, [lendant qu'il était chez lui, en devint épris. Pour s'unir à elle, il se changea en graj^pe de raisin, et dès que la jeune fille l'aperçut sous cette forme, elle s'empressa de l'aller cueillir et de le manger: c'est ainsi (pi'elle devint l'épouse du dieu, dont elle eut un fils qui fut appelé Stajdiylos, dont le nom veut dire raisin. Ce fut lui qui, plus tard, enseigna aux hommes qu'en mêlant de l'eau avec la liqueur divine elle ne produirait jtas l'ivresse.