L'impitoyable Junon ne s'en tint pas là : voulant mettre un obstacle à la naissance d'Hercule, elle envoya chez Alcmène deux magiciennes, chargées d'empêcher par leurs maléfices l'enfant de venir au monde. Mais la puissance de Jupiter est plus grande que les enchantements et les sortilèges. Un bas-relief du musée Pio-Clementin nous montre les deux magiciennes au pied du lit d'Alcmène entourée de ses suivantes dont une tient dans ses bras le petit Hercule (fig. 567). Les doigts entrelacés des magiciennes sont un signe de maléfice. Hercule dans sa force occupe le milieu du bas-relief, de Tautre côté Mercure porte
LENFANCE D'HERCULE. '"'IS
rtMifanl dans SOS l)ras; le Ileiivc Ismène personnifif' oA AnipliiliNitii <!(•-bout terminent la composition.
Le lait de Junon. — Quand l'enfant fut venu au monde Alcniiiu'. redoutant la jalousie de Junon, fit exposer Hercule dans un champ. Mercure porta le nouveau-né dans TOlympe, et le déposa malicieusement sur le sein de la reine des dieux qui dormait. L'enfant mordit si fort le sein de la déesse, que le lait en s'échappant forma la \oie Lactée. Junon, reconnaissant son erreur, rejeta aussitôt Hercule. Minerve alors rapporta à sa mère l'enfant qui avait teté le lait de 1 im-
rifï. 5G9. — Junon allaitant Herculo id'après lo tableau de lUibens).
mortalité. Il y a au musée de Madrid un tableau de Rubens, re))rés(Mi-tant Junon qui allaite Hercule (fig. 569). La déesse est assise sur un nuage, près de son char traîné par des paons, et on voit I(> lait qui s'échappe de son sein pour tomber dans le ciel. Le Tintoret. dans mi petit tableau qui a fait partie de la galerie du duc d'Orléans, a montré Jupiter qui présente lui-même l'enfant au sein de Junon.
Hercule étouffe deux serpents. — Alcmène a\ail mis au monde deux enfants jumeaux, Hercule fils de Jupiter et Iphicles (ils d'Amphitryon. Chaqiuî jour, après les avoir lavés (>t allaités, elle les couchait sur un bouclier d'airain qu'elle berçait ensuite mollement. Une nuit rimpitoyable Junon envoie deux énormes seipeiils ipii s'avancent
HERCULE ET THKSEE.
vers les deux jeunes enfants endormis. Ipliieli's jetle un cri, mais Hercule, prenant sans s'émouvoir les deux reptiles dans ses petites mains. les presse avec une telle force qu'il finit par les étouffer (fif;. 570). Pline parle d'un tableau peint par Zeuxis qui représentait Hercule enfant étouffant les deux serpents en présence d'Amphitryon et d'Alc-mène qui pâlit d'effroi. Le môme sujet figure sur une peinture d'Iler-culanum où Amphitryon tire son épée pour venir au secours de son enfant (fig'. 571). Vn l)as-relief du musée Pio-Clémentin (fig. 568) et un
iituim'ifliiifiiNf!RH4j)i[iiiiifiiLrimiiuiiiiî?iijiNiiiiiiili[
Fig. 570. — Hercule enfant (d'après une statue antique).
bronze d'Herculanum montrent Hercule étouffant les serpents. Dans l'art moderne, un charmant petit tableau d'Annibal Carrache, au Louvre, rend parfaitement ce sujet, qui a été peint aussi par le peintre anglais Reynolds.
Hercule entre le Vice et la Vertu. —L'éducation d'Hercule fui complète ; il apprit d'Amphitryon à conduire un char, de Castor à combattre armé de toutes pièces, de Linus cà jouer de la lyre, d'Eurytus à tirer de l'arc. Le sage Rhadamanthe et le centaure Chiron figurent aussi parmi ses précepteurs. Le talent musical d'Hercule a été célébré par les artistes, qui, sur les bas-reliefs, le placent quelquefois à côté des Muses, et, sur les pierres gravées, le montrent occupé à jouer de la lyre (fig. 572).
Hercule, étant devenu grand, se retire un jour à l'écart, pour penser
LENPANCE DHERCULE.
(il-
([iiel yeniT de vie il devait mener : alors lui appanireiit deu\ feiiiiiies de gi-ande slatiire, dont lune, fort belle, qui était la Vertu, avait un visage majestueux et plein de dignité, la pudeur dans les yeux et une robe blanche. L'autre, la Mollesse, ^\^\i des regards libres et des habits magnifiques. Chacune d'elles tâcha de le gagner par des promesses, l'une annonçant qu'elle le ferait triompher de toutes les épreuves de
Fig. 571. — Hercule étouffant les serpents (d'après une peinture d'Herculaiium).
la vie ; l'autre, qu'elle lui éviterait la peine de lutter. Hercule préféra la Vertu. (Xénophon.)
Cette scène est représentée sur une médaille où on voit Hercule entre Minerve et Vénus. Rubens a peint ce sujet pour le duc de Toscane et son tableau est <à la galerie de Florence.
Gaspard de Crayer a représenté la même scène.
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Fig. 572. — Hercule jonaitt de la lyrr d'ai)rt's une médaille antique).
La mort d'Amphitryon. — Jusqu'à l'âge de di\-huit ans, Hercule n'avait pas eu d'autre occupation que de garder les troupeaux dans les pâturages, ou de poursuivre les bétes fauves dans les forêts. Comme il revenait un jour de la chasse, il rencontra les envoyés des Minyens
,ilS HERCULE ET THÉSÉE.
d(Mohomène, qui venaient recevoir le tribut que leur roi Krgim.s
ait imposé aux Thébains, et les tua. Krginus revint^ovec une armée, ai. il fut vaincu et tué par Hercule, qui mit les M.nyens en lu.t. ,
Fi". b'A. — llcrculfi enfant (d'aprî^s une statue antique).
,'l leur imposa a son tour un tribut double de celui quils avaient eu la prétention de recevoir. Ampbitryon périt dans ce combnt qui valut a Hercule la main de Mégare, tille de Créon. Cette expédition commença la célébrité d'Hercule.
Démence d'Hercule. — Junon, ne pouvant s'habituer à l'idée de la gloire que devait acquérir le lils de Jupiter, résolut de déslionorer sa vie en lui envoyant une folie furieuse. Tandis que le héros jouissait en paiv du repos de la famille, on voit subitement ses traits s'altérer; ses veux roulant dans sa tète et laissant voir au dehors le fond de leurs orbites sanglantes ; Fécume coule de ses lèvres, et souille son menton garni d'une barbe touffue. Puis il s'écrie avec un rire frénétique : « .... Qu'on me donne mon arc; où est ma massue ? Je vais à Mycènes ; armez-vous de leviers et de boyaux pour démolir avec le fer recourbé de la pioche les édifices bâtis par l'art industrieux des Cyclopes. » Ensuite il se met à marcher, et, quoiqu'il n'eût point de char, il prétendait en avoir et y prendre place, et il frappait les chevaux qu'il croyait voir, comme s'il eût tenu lui aiguillon à la main.
Le malheureux parcourt ainsi le palais, en proie à une démence furieuse et, croyant frapper des monstres, tue l'un après l'autre ses petits enfants qui demandent en vain grâce. La pauvre mère entraîne le dernier dans le fond du palais et ferme les portes. Son époux, se croyant devant les murs des cyclopes, renverse les battants des portes et perce du même trait sa femme et son petit enfant. Ensuite, il s'élance pour frapper son père ; mais tout à coup apparaît la déesse Pallas, qui renverse le héros, encore brûlant de la soif du carnage et le plonge dans un sommeil profond. (Eirhmde.)
Dès qu'Hercule eut repris sa connaissance, il eut conscience de l'é-normité de son crime. En proie au plus violent désespoir, il se condamna lui-même à l'exil, et, après s'être fait purifier, il consulta l'oracle pour savoir où il devait se retirer. Le dieu lui ordonna d'aller trouver Eurysthée, son plus grand ennemi, et de se soumettre à tous les travaux qui lui seraient demandés : car c'était, ainsi que les destins l'avaient ordonné. Ici commence la vie héroïque d'Hercule, si souvent représentée sur les monuments.