Il a un frère mortel Iphiclès, le feu domestique, et pendant que celui-ci tremble à la vue des serpents qui s'approchent du berceau commun, Héraclès les saisit et les étouffe résolument. Cette lutte contre les serpents, contre l'hydre, contre Cacus [exclus, l'aveugle, l'obscur), contre Génjon aux trois corps — l'obscurité qui couvre la terre, le ciel et l'air — contre le lion de Némée, le sanglier d'Erymanthe, les oiseaux du lac Stymphale, et les autres travaux qui lui sont attribués, se réduit tout entière à l'éternelle guerre de la lymière et des ténèbres, du jour et de la nuit, du ciel et des nuages. Lahaine que lui a jurée Hère [Jiinon) — la personnification de l'air obscur— se rapporte à la même conception. La même idée, sous une forme absolument différente, se retrouve dans le mythe d'Oniphale, la nuit, qui désarme Héraclès et en fait son esclave. La conquête des pommes d'or des Hespérides, de la toison d'or — où le rôle principal est rempli par Jason ou Jasion, autre divinité du même ordre, — présente encore le même mythe. Géryon, Antée,
libations. Les pommes d'or sont lo fruit du sacrifice, que cueillent les dieux réunis sur le couza ou gazon qu'on place pour eux autour du foyer. Il est bien clair qu'il ne s'agit pas ici de l'intention de l'artiste, auquel évidemment ce symbolisme échappait complètement, mais de la c onception primitive qui a formé ce mythe.
géants fils de la Terre, personnifient le nnage et la nuit qui s'élèvent de la terre pour envahir le ciel.
La plupart de ces derniers mythes se rapportent au soleil à peu près aussi exactement qu'au feu du sacrifice, et pourraient faire hésiter sur l'identification à'Ihh'aclès et à'Agni. Mais il y en a d'autres où la confusion est plus difficile.
Parmi ceux-là, il faut compter ceux qui rappellent la naissance d'Héraclh, que nous avons indiqués plus haut, et surtout ceux qui nous reportent précisément aux souvenirs de la lutte qui s'établit entre les deux cultes rivaux. Il est facile de comprendre que la substitution û'Agni à Sonrya, à Savitri, à Pouchan, au soleil considéré sous ses différents aspects, ne s'opéra pas sans quelques difficultés. Nous en avons la preuve dans le récit du combat d'Héraclès et d'Apollon à propos du trépied de Delphes (I). La coupe sur laquelle Héraclès traverse l'Océan est également un souvenir du sacrifice et des libations sacrées qui projettent la flamme à travers l'océan de l'air obscur.
La mythologie grecque raconte qu'après ses travaux Héraclès construit sur le mont OEta un bûcher sur lequel il brûle lui-même son corps mortel ; mais aussitôt il est reçu au ciel où il épouse Hébé, la jeunesse éternelle. Ces idées sont familières aux chantres aryens. Agm, après avoir consumé dans le foyer les branchages quL constituent sa forme terrestre, s'élève dans le ciel d'où il revient chaque jour se livrer aux mômes tortures pour sauver les hommes. Il est le premier-né des dieux, puisque c'est la flamme du sacrifice qui la première illumine la terre; mais en même temps il est le plus jeune, puisque chaque matin une naissance nouvelle le fait sortir de TArani. Une fois né, c'est lui qui, se substituant à Inch-a et à tous les anciens dieux, affermit et soutient tous les mondes. C'est cette même idée que nous retrouvons dans le mythe d'Héraclès prenant la place d'Atlas.
La descente du héros grec aux enfers est encore un vague écho des hymnes védiques et ne peut se comprendre que dans l'histoire d'un dieu sujet à la mort (2). Les épithètes de sauveur, de guérisseur, de protecteur que Ton donnait à Héraclès sont également celles que nous trouvons appliquées à Agni. Il n'est pas jusqu'à la voracité, à la gloutonnerie, à l'ivrognerie même que lui reprochent les poètes satiriques qui ne conviennent à Agni, au feu dévorant, qui ne se rassasie jamais de beurre clarifié et de somo.
Comment donc se fait-il que ce même dieu qui, dans la religion aryenne, devient le maître et le souverain de l'univers et détrône tous les dieux célestes, demeure dans la mythologie grecque à l'état de demi-dieu, de héros'' 11 y a là un point qui a son importance.
La raison en est simple. Lorsque se produisirent les grandes migrations
(1) Eschyle, dans le drame perdu des fîrmY^/'Wc.sv, montrait Or/^/iCt' déchire par les Bacchantes, parce qu'il avait refusé d abandonner le culte à!Apollon pour celui de Dionysos. C'est la même conception, car nous avons vu dans le Véda que c'est par la déification du Soma que s'est manifestée d'abord la substitution des divinités terrestres et médiatrices aux dieux du ciel.
(3) Il me paraît fort probable cependant que cette descente aux enfers représente simplement la descente quotidienne du dieu sur la terre obscure, où il enchaîne le cerbère, le monstre aux trois têtes, le démon qui couvre de ses ténèbres les trois mondes.
aryennes qui s'emparèrent de la Grèce, les Aryens ne connaissaient guère encore que les divinités du ciel. Les mythes de Sonia et d'Ag»i n'avaient pas du moins achevé leur évolution. Us furent importés postérieurement en Grèce par deux autres migrations successives, ({ui s'établirent dans le nord de la (îrèce, en Thessalie et en Béotie ; nous en trouvons la preuve dans la constitution même du culte de Dionysos, bientôt suivi de celui d'Béraclès, qui devinrent dominants dans ces contrées ; car pour les Doriens Hih-arlh n'est pas seulement un héros, c'est, comme dans le Véda, le souverain des dieux. Si ces deux divinités ne prirent pas une place égale dans le reste de la Grèce, cela s'expli([ue précisément par leur nouveauté, qui les fit regarder comme des dieux locaux et particuliers à ceutains territoires.
Mais la déification d'yli//»' est loin d'être le dernier terme de l'évolution religieuse chez les Aryas. La même logique qui les a amenés jusqu'à ce point les pousse naturellement au delà. La religion, une fois ramenée dans l'enceinte sacrée, continue son mouvement de concentration et ne s'arrête qu'à la personne du prêtre lui-même.
En même temps que toutes les parties du sacrifice, la libation [Sonia], le feu [Agni], la prière est divinisée. On la représente soit comme l'épouse du dieu auquel elle est adressée et auquel elle veut s'unir, soit sous la forme de la chienne Saranin, qui marche devant le dieu à la recherche des trésors cachés dans l'obscurité ou dans le nuage.
<i Saraniu, aux pieds légers, a découvert les vaches célestes cachées parles Panis. n {Rig-Véda, s. III, L 2, h. 2, v. 6.) 0 Incb-a, quand ta foudre a fendu la montagne céleste, Saraniu t'avait d'abord révélé le trésor enlevé. » [Rig-Véda, s. III, 1. V, h. 12, V. 8.) C'est la prière qui réveille les dieux, et qui les ramène au cieclass="underline" <( 0 Agni, j'ai composé cet hymne qui est pour toi comme une espèce de char.» [Rig-Véda, s. III, 1. 8, h. 10, v. II.) « 0 Jnd?'a, viens avec deux chevaux, viens avec quatre, viens avec six ; accours avec huit, avec dix coursiers, » [Rig-Véda, s. II, 1. 6, h. 10, v. 4.) « Les Prières s'avancent et viennent avec empressement s'atteler au char de Pouchan. » [Rig-Véda, s. VII, 1. 7, h. 8, V. i.) « Avec les paroles d'une prière nouvelle, j'ai attelé au char d'Indra deux coursiers qui doivent le traîner. » [Rig-Véda, s. II, 1. 6, h. 10, v. 3.) (( Rois, fils du ciel, vous puisez votre force dans les prières du brillant sacrifice. » [Rig-Véda, s. III, 1. 2, h. 9, v 5.) « Celle qui nous a été donnée pàv DJaniadagni, celle qui détruit l'ignorance, la Prière, fille du Soleil, vient élever la voix. » [Rig-Véda, s. III, 1. 3, h. 14, v. 15.) « Nos pères, ces sages antiques et justes, se sont avec les Devas livrés aux joies du sacrifice. Ils sont allés à la recherche de la lumière cachée, et par leurs saintes prières, ils ont enfanté l'aurore. Au sein de la vaste et obscure caverne (la nuit) ils se sont assemblés, et, unissant leurs mutuels efforts, ils ont consolidé l'œuvre des dieux et marché avec les Vasous. » [Rig-Véda, s. V, 1. 5, h. 17, v. 4 et 5.) Elle est souvent invoquée sous le nom de Saraswati: