tume, comme le carquois et les flèches. Sur une foule de monuments Apollon tient la lyre quoiqu'il soit entièrement nu.
Pour les Grecs, la lyre était en quelque sorte un instrument national, par opposition à la flûte qui représentait la musique phrygienne.
Le silène Marsyas. — Le silène Marsyas est le fidèle suivant de Cybèle, et joue au])rès d'elle un rôle analogue à celui que l'autre silène remplit auprès de Bacchus dont il a été le père nourricier.
Fig. 217. — Apollon Musagète (statue aiitifiuu, à Rome)
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MarsyasquG les monuments figurés nous montrent souvent donnant une leçon au jeune Olympus, son élève (fîg. 218), est une personnification de la musique phrygienne, et surtout de la flûte, par opposition à la Ivre dont on se servait en Europe. Dans une invasion que les Galates firent en Phrygie, Marsyas fit déborder les eaux des fleuves au son de sa flûte, et préserva le pays de la conquête.
Fig. 218. — Marsyas et Olympus.
Marsyas, fier de son talent sur la flûte, osa défier Apollon, et il fut convenu que le vaincu serait à la merci du vainqueur. Apollon chanta en même temps qu'il jouait de sa lyre, et les Muses, choisies pour arbitres du différend, lui décernèrent la victoire. Le pauvre Marsyas fut suspendu à un pin et impitoyablement écorché. Les satyres et les nymphes pleurèrent tant, que leurs larmes formèrent un fleuve qui porte son nom. Les flûtes du malheureux Phrygien tombèrent dans cette rivière, et furent emportées par le courant. Le mouvement des flots les amena sur le rivage de Sicyone. Un berger les recueillit, et les consacra dans un temple dédié à Apollon. Quant à la peau du vaincu, on en fit une outre qui fut placée dans la ville de Célène, patrie de Marsyas, et suspendue à une colonne. Quand on jouait de la flûte sur le mode phrygien, cette peau s'agitait en signe de satisfaction, tandis que quand on jouait de la lyre, elle demeurait dans une immobilité complète. Le jeune Phrygien qui, dans les représentations antiques du supplice de Marsyas, apparaît derrière Apollon et tient quelquefois sa flèche, paraît être Olympus, qui plus souventintercède pour son maître.
Marsyas est souvent représenté suspendu à un arbre : telle est la célèbre statue du Louvre, où le silène a les pieds posés sur une tête de
APOLLON ET DLVNE.
bouc (fig. 220). Dans lo Marsyas de La galerie Giiistiniani, Apollon tient la peau du silène, qui dans d'autres occasions est accrochée à La lyre du dieu de Delplies. Le supplice de Marsyas figure également sur un bas -relief du musée Pio-Clémcntin et sur une multitude de pierres gravées. C'est quelquefois Apollon qui écorche lui-même sa victime, mais plus souvent il assiste au supplice qui est infligé au malheureux par des esclaves scythes. Une frès-belle statue anticpie du musée de Florence, connue sous le nom de Rémouleur, représente un Scythe aiguisant son
Fig. 319. — Apollon et Marsjas (d'après une pierre gravée antique, jaspe sanguin).
couteau. Il y avait en effet à Athènes une compagnie de Scythes chargés de faire les exécutions, et c'est ce qui explique cette tradition.
La lutte entre Marsyas et Apollon figure dans les monuments antiques aussi souvent que le supplice. Sur des vases on voit Apollon jouant devant les Dieux assemblés, tandis que Marsyas et son élève Olympus l'écoutent avec attention ; sur d'autres c'est au contraire Marsyas qui Joue devant Apollon couronné de lauriers et Bacchus assiste à la scène. Enfin plusieurs médailles, notamment celles d'Apamée, en Phrygie, montrent Marsyas jouant de la flûte. Un tableau de Zeuxis, représentant le supplice de Marsyas, avait dans l'antiquité une très-grande célébrité. Après la conquête romaine, il fut enlevé aux Grecs et vint k Rome décorer le temple de la Concorde. Rubens, le Guerchin, le Guide et autres maîtres ont peint le supplice de Marsyas.
La rivalité de LOrient et de l'Occident reparaît sous mille formes dans la Fable, mais plus particulièrement sous le rapport musical. L'histoire de Marsyas nous la montre avec le caractère sauvage que les peuples primitifs prêtent toujours à la lutte. 11 ne semble pas que les
Fig. 220. — Marsyas (d'après une statue antique, musée du Louvre'
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écrivains de l'antiquité aient été bien vivement touchés par la cruauté du dieu de la musique, mais plusieurs ont émis des doutes sur la légitimité de sa victoire.
Voici comment .l'historien Diodore de Sicile raconte cette aventure: « Apollon et Marsyas, dit-il, disputèrent à qui ferait le plus de plaisir et d'effet, chacun sur son instrument ; ils curent pour juges les habitants de Mysa, Le dieu joua d'abord un air sur sa lyre. Ensuite Marsyas
Fig. 221. — Apollon et Marsyas, sur une médaille d'Antonin, avec les attributs du dieu (composition de G. de Saint-Aubin).
emboucha la double flûte, et les juges, enchantés de la douceur et de la nouveauté des sons qu'il en sut tirer, lui donnèrent la préférence. Apollon, ayant obtenu qu'on en vînt à une seconde épreuve, mêla les sons de sa voix à ceux de la lyre et emporta les suffrages. Alors Marsyas représenta qu'il s'agissait de juger de l'instrument et non de la voix, et que d'ailleurs il était injuste d'opposer un seul art à deux arts réunis. A cela le dieu répondit qu'il n'employait d'autres moyens que ceux dont Marsyas se servait lui-même, la bouche et les doigts : la raison fut trouvée bonne, et à la troisième épreuve Apollon fut de nouveau déclaré vainqueur. Indigné de l'audace de Marsyas, ce dieu l'écorcha tout vif. »
Les poètes comiques se sont emparés de Marsyas, pour en faire le type de l'ignorant présomi>tueux, et il devint un personnage burlesque. Ce mythe prit sous la domination romaine une importance tout autre : il fut alors considéré comme une allégorie de la justice é([uitable, mais inexorable. C'est ce qui e\plit{ue pourquoi cette fable
est si fivqiiemmont représentée dans les monuments des arts. Les statues de Marsyas écorché figuraient sur les places publiques oii se rendaient les jugements, et dans toutes les colonies romaines, on le voyait près du tribunal.
Les oreilles du roi Midas. — Un concours analogue, mais suivi d'cdets plutôt ridicules (juc désastreux, eut lieu entre Apollon et le dieu Pan. Ce dieu, très-fier de son talent musical, poussa un jour la vanité jusqu'à porter un défi à Apollon, dont la lyre et la voix ne sauraient avoir de rivaux. Tous les assistants donnèrent la victoire au dieu de la lumière, à l'exception de Midas, roi de Phrygie, qui seul osa contredire ce jugement. Apollon TUi voulant pas que des oreilles si grossières conservassent plus longtemps la figure de celles des autres hommes, les lui allongea, les couvrit de poil, et les rendit mobiles ; en un mot, il lui donna des oreilles d'âne. Le reste de son corps ne fut point changé.
Midas, pour cacher cette difformité, la couvrait sous une tiare magnifique. Le barbier qui avait soin de ses cheveux s'en était aperçu, mais il n'avait osé en parler à personne. Incommodé de ce secret, il va dans un lieu écarté, fait un trou dans la terre, s'en approche le plus près qu il lui est possible, et dit d'une voix basse que son maître avait des oreilles d'âne ; ensuite, il rebouche le trou, croyant y avoir enfermé son secret, et se retire. Mais des roseaux ayant poussé à cette place trahirent son secret, car chaque fois qu'il y avait du vent, on les entendait répéter : Le roi Midas a des oreilles d'cmc, le roi Midas a des oreilles d'âne. Le Guide a fait un Jugement de Midas oii Apollon est représenté jouant du violon. Rubcns a peint le môme sujet dans un ta-l)leau du musée de Madrid.
CHAPITRE VI
LES MUSES.
Jupiter et Mnémosyne. — Attributs des Muses. — Les filles de Piérus. — Les Muses