Jupiter dit à Prométhée : « Fils de Japet, tu te l'éjouis d'avoir dérobé le feu divin et trompé ma sagesse; mais ton vol te sei-a fatal, à toi et aux
PROMÉTllÉE. -^^^
hommes à venir. Pour me venger de ce larcin, je leur enverrai un funeste présent dont ils seront tons charmés an fond de leur âme, chérissant eux-mêmes leur propre fléau. » (Hésiode.)
Fig. m. - Promôthée apportant le feu aux liommes d'après une lampe antique).
La boîte de Pandore. — Prométhée avait un frère nommé Épi-méthée ; se doutant de .pielque perfidie, il Ini recommanda de ne rien accepter de Jupiter, parce que le roi des Dieux méditait de lui taire un don qui serait fatal aux hommes. Jupiter, de son côté, voulant réaliser son projet, imagina d'envoyer aux hommes un fléau qui fût revêtu des dehors les plus séduisants et qui leur causât mille soucis, tout en s'en faisant aimer: telle fut l'origine des femmes, suivant Hésiode.
,( D'après la volonté du fils de Saturne, le boiteux Vulcain, ce dieu
illustre, forma avec de la terre une image semblable à une vierge
chaste. Minerve aux yeux bleus s'empressa de la parer et de la vétu'
d'une blanche tunique. Elle posa sur le sommet de sa tète un voile
ingénieusement façonné et adniiial)le à voir; puis elle orna son iront de
srracicuses guirlandes tressées de Heurs nouvellement écloses et d'une
couronne d'or, que le boiteux Vulcain, ce dieu illustre, avait fabriquée
de ses propres mains par complaisance jiour le puissant Jupiter. Sur
cette couronne, ô prodige! Vulcain avait ciselé les nombreux animaux
que le continent et la mer nourrissent dans leur sein; partout brillait
une grâce merveilleuse, et ces diverses figures paraissaient vivantes.
Quand il eut formé, au lieu d'un utile ouvrage, ce chef-d'œuvre funeste.
YULCAIN ET MlNEliVE.
leusc des oriKUîieiits que lui un ait donnés la déesse aux yeux bleus, fille d'un père puissant. Une é-^ale adinii-ation transporta les Dieux et les hommes^ dès qu'ils a|)er(;urent eeffe fatale merveille si terrilde aux humains; ear de eette vierge es! \cnuv la raee des femmes au sein fécond, de ces femmes dang-ereuses, tléau cruel vivant parmi les hommes et s'attachant, non pas à la triste pauvreté, mais au luxe éblouissant.»
(Hésiode.)
Fig. 300. — Pandore entre Minerve et Vulcain.
Pandore, qui fut la mère du genre humain, fut donc l'œuvre des dieux olympiens, tandis que l'homme avait été façonné par le Titan Promé-thée. Une peinture archaïque, au fond d'une coupe de Nola, nous montre la première femme (Anesidora pour Pandora) entre Vulcain et Minerve, occupés à la parer au moment oii elle vient d'être formée (fig. 300). Elle est beaucoup plus petite que les deux divinités placées près d'elle et porte un vêtement semé d'étoiles. Minerve a la })oitrine couverte de l'égide hérissée de serpents et portant la tète de la Gorgone, mais elle n'a point le casque et la lance ([ui sont ses attributs habituels. Vulcain est imberbe et vêtu d'une sim{)le chlamyde ; il tient le marteau qui lui sert d emblème. Il est assez curieux de rapprocher cette peinture de la composition que Flaxman a exécutée sur le même sujet (fig. 301). Le sculpteiu' anglais toutefois a remplacé Vulcain par Mercure, qui pose son caducée sur la tête de la première femme, pour lui inspirer, suivant l'expression d'Hésiode, « l'ait du mensonge et des discours trompeurs ».
PItOMETHEE.
Après avoir achevé cette attrayante et pernicieuse meiveille, Jupiter xlonna a Mercure, le rapide messager des Dieux, delà conduire vers Épiméthée. Épiméthée ne se rappela point que Prométhée lui avait recommandé de ne rien recevoir de Jupiter, mais de lui renvoyer tous ses
oi
Fig. 301. — Pandore dotée par Mercure et Minerve (d'après Flaxman .
dons, de peur qu'ils ne devinssent un fléau terrible aux mortels : il accepta le fatal présent et reconnut bientôt son imprudence. »
(Hésiode.)
C'est de Pandore qu'est sortie « ceite race faible et délicate des femmes, que les mortels gardent parmi eux pour leur malheur. Jamais amies de la pauvreté ni de l'épargne, elles n'ont de goût que pour le luxe et la dépense. » (Hésiode.)
En donnant le feu aux hommes, Prométhée leur avait enseigné l'industrie qui ne peut exister que par le feu : Jupiter en fit de^ artistes en leur donnant la femme, qui, en dehors des premières nécessités de la vie, leur impose mille besoins charmants qu'un travail incessant peut seul satisfaire.
Pandore avait reçu de Jupiter une boîte dont eUe ignorait le contenu : poussée par la curiosité naturelle à son sexe, elle voulut louvrir, et
;{48
YULCAIN ET MINERVE.
tous les maiiv se rôpandircnt sur la torro. Elle reforma aussitôt le couvercle, mais rEspéra<nce resta seule au fond de la boite (lig. 302).
Fig. 302. — Pandore ouvre le vase fatal (d'après Flaxman\
Supplice de Prométhée. — Jupiter se montra cruel envers Prométlu^e et, pour le punir d'avoir donné le feu aux hommes, il Ten-chaîna sur les cimes du Caucase. Un aigle venait continuellement lui déchirer le foie et sa chair renaissait aussitôt pour que le supplice se renouvelât tous les jours. Cette lutte de Jupiter contre Prométhée a été interprétée de manières très-différentes, mais d'après les tragiques on pourrait y voir comme un vague souvenir d'un changement de croyances. Dans l'antiquité, Prométhée est resté comme le type de la justice écrasée par la force, de la conscience humaine protestant contre une puissance inexorable.
Le supplice de Prométhée devait |»ourtant avoir une fin. Hercule, le tueur de monstres et le grand redresseur de torts, délivra le Titan en tuant l'aigle qui le rongeait. Prométhée, qui connaissait l'avenir, avait prédit que celui qui épouserait la néréide Thétis, aurait un fils plus puissant que son père, et-le roi des Dieux, apprenant cette prophétie, renonça au projet qu'il avait de s'unir à Thétis. En souvenir de ce service, Jupiter ne mit pas obstacle à la délivrance de Prométhée ; mais comme il avait dit que le supplice durerait des milliers d'années et qu'un dieu ne doit pas mentir, on imagina un subterfuge. Dun des anneaux de la chaîne qui liait le Titan, on fit une bague, dans laquelle on mit un petit morceau du rocher: de cette manière il demeura toujours enchaîné au Caucase.
Un curieux sarcophage du musée Capitolin retrace en plusieurs scènes toute la fable de Prométhée. iXous avons dû donner la gravures en deux parties, mais elles appartiennent au même bas-relief. Le sujet,
traité (riine maniôro tr('s-conij)lèto, nous ofl'ro riniagc do la d(\stint''(3 de rhonimc, de son origine et de sa fin, encadrée pour ainsi dire dans les différents actes de la légende de son créateur. Au centre, Prornéthée assis lient sur ses genoux un homme qu'il vient de modeler avec le limon de la terre et sur la tète duquel Minerve pose le papillon emblème de l'àme. Au-dessus de Prométhée apparaissent les Parques, Clotlio avec sa quenouille sur laquelle elle file les jours des hommes, et sa sœurLachésis indiquant sur un globe la destinée qui leur est réservée. Derrière lui, la Terre, tenant une corne d'abondance que soutiennent les génies de Tété et de l'hiver, tourne la tète en regardant un panier contenant le limon dont se sert Pi'ométhée pour former riiomme. Le Soleil conduisant son char et Océan tenant une rame et monté sur un hippocampe apparaissent au-dessus de la Terre. A ses pieds sont l'Amour et Psyché qui s'embrassent pour montrer l'union intime du corps et de l'àme. Ensuite on voit le groupe de Vulcain et ses cyclopes, forgeant les chaînes qui vont attacher Prométhée sur le Caucase. Le bas-relief se termine par un couple debout et nu sous un palmier, qui rappelle d'une manière frappante l'Adam et Eve de la Bible, mais oii on reconnaît généralement Deiicalion et Pyrrha ({ui, seuls sauvés des eaux du déluge, ont eu pour mission de perpétuer le genre humain créé par Prométhée.