L'autre côté du bas-relief, représenté dans notre seconde figure (fig. 304), nous montre les emblèmes de la mort, qui dans le monument se trouvent placés immédiatement derrière Minerve. Un homme est étendu par terre et privé de mouvement : le génie de la mort tient son flambeau renversé sur la poitrine du cadavre, dont l'àme, sous la forme du papillon, s'échappe en montant le long du flambeau, tandis que l'ombre du défunt, représentée par une grande figure enveloppée d'un manteau, se dresse au-dessus de ses pieds. Du côté de la tète du mort, la troisième Parque, Atropos, est assise et tient sur ses genoux le livre de la destinée. Au-dessus de cette scène funèbre apparaît la lune sur un char conduit par deux chevaux. Dans l'épisode suivant Mercure, tenant d'une main son caducée, emmène aux enfers l'âme du défunt sous la forme d'une Psyché aux ailes de papillon, et à ses pieds la Terre, tenant toujours sa corne d'abondance, se dispose à en recevoir la dépouille mortelle. Puis nous arrivons à la dernière scène : Prométhée enchaîné sur son rocher a le foie dévoré par un aigle auquel Hercule décoche une flèche. La massue et la peau de lion du héros sont placées derrière lui aux pieds du Caucase, qui est lui-même j)ersonnifié sous les traits d'un vieillard aux cheveux hérissés, tenant d'une main un des [)ins dont il est couvert, et de l'autre un serpent (jui représente le génie local de l'endroit où le drame se dénoue.'
Il y a quelques variantes dans l'histoire de Prométhée: quelques-uns
PRUMÉTHÉE.
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lui attribuL'iit la l'abrication de la femme aussi bien que celle de Ihomme, ce qui ôterait toute raison d'être à la jolie fable de Pandore. Cependant il existe sur cette version des monuments dont il faut bien tenir compte. Un bas-relief antique nous montre Prométiiéo tenant un ébauchoir et modelant la première femme ; un petit bomme non encore animé est couché aux pieds du sculpteur, auquel Mercure amène
Fig. 305. — La feble de Proinéthée avec la naissance et la destinée de l'homme (d'après un sarcophage antique du musée Capitolin).
une àme, caractérisée par les ailes d-e papillon, et qui va habiter le corps que Prométhée finit. Derrière Mercure on voit les trois Parques qui vont filer la destinée de cette créature nouvelle. Le taureau, l'âne et le lièvre, placés près du sculpteur, rappellent une tradition d'après laquelle Prométhée en formant l'espèce humaine a mêlé au limon dont il se servait les qualités de divers animaux.
DÉDALE.
Les inventions de Dédale. — Minos et Pasiphaé. — Le lal)\riuthe. — Les ailes d'Icare. — Le portrait d'Hercule. — Les Telchincs et les Dactyles.
Les inventions de Dédale. — On a réuni sous le nom mytholo-fiique de Dédale les anciennes corporations d'artistes et d'artisans qui fabriquaient les images des dieux. La tradition a ainsi rassemblé sur un seul personnage les travaux, et les aventures de ces premiers ouvriers, et les vieilles statues de bois auxquelles on attribuait un caractère miraculeux étaient toujours considérées comme des ouvrages de Dédale, Comme Vulcain et Prométhée, Dédale est un civilisateur qui apprend aux hommes l'industrie; il a un rapport moins direct avec le feu, mais en revanche il est architecte et mécanicien.
Dédale, dont la généalogie fabuleuse est extrêmement confuse, est revendiqué par les Athéniens, comme fils de leur roi Erechthée, La cognée, le ni^eau, la tarière sont des instruments de son invention, 11 est aussi le premier qui ait fait des voiles aux vaisseaux et qui ait su les diriger avec le vent. Dédale avait un neveu, fils de sa sœur Perdix, auquel il enseigna ses secrets, et qui a inventé la scie et la roue du tour à ])otier. Dédale le tua par jalousie et fut obligé de quitter Athènes, pour aller en Crète oi^i il fut accueilli par Minos, tils de Jupiter et d'Europe et époux de Pasiphaé, fille du Soleil.
Minos et Pasiphaé, — Voulant se faire bien venir de ses sujets qui étaient tous marins, Minos leur avait déclaré que Neptune lui accorderait tout ce qu'il voudrait, et pour leur en donner la preuve, il demanda au dieu des mers de lui envoyer un taureau qu'il lui sacrifierait ensuite. Au môme instant un magnifique taureau blanc sortit de la mer ; mais Minos le trouva tellement beau qu'au lieu de le sacrifier, il le fit mettre dans son troupeau et en immola un autre, Neptune, qui ne pouvait accepter un pareil outrage, chargea \énus de sa vengeance. La cruelle déesse ne trouva rien de mieux que daf-tliger Pasiphaé d'une folle et irrésistible passion pour le beau taureau.
On a donné différentes explications de cette fable singulière. C'est déjà sous la forme d'un taureau, que Jupiter s'était fait connaître à Europe, mère du roi Minos, et la légende de Pasiphaé semble reproduire la même histoire sous une forme dilîerente. La Crète était en
rapports continuels avec la Phénicie où les dieu\ ont souvent la forme (le taureaux, et avec l'Egypte où le bœuf Apis est une incarnation du Soleil. Suivant Creuzer, Pasiphaé serait simplement une lune, éprise (lu Soleil, qui apparaît en Crète comme dans les contrées voisines sous la forme du taureau.
Les ailes d'Icare. — La colère que Neptune avait eue contre Minos porta ses fruits, en faisant naître de Pasiphaé un monstre à tète de taureau, appelé Minotaure, qui se nourrissait de chair humaine.
Fig. 30G. — Dédale préparant les ailes dicai-e d'après une pierre gravée antique).
Dédale avait fait pour le roi Minos un vaste bâtiment dont Tinté-rieur formait mille détours, en sorte qu'il était à peu près impossible d'en sortir une fois qu'on y était entré. C'est le lieu qu'on a appelé le Labyrinthe, et c'est là qu'on enferma le Minotaure, qui fut plus tard tué par Thésée, comme nous le verrons par la suite. Minos, mécontent de Dédale qu'il accusait d'avoir été de connivence dans cette affaire, le fit jeter en prison avec son fils Icare. La prison était sur un récif au bord de la mer, dans une situation qui rendait toute idée d'évasion matériellement impossible. L'ingénieux Dédale, qui n'était jamais à bout de ressources, conçut un projet que personne n'avait imaginé avant lui. Il prit des plumes et les arrangea avec une adresse si admirable, qu'il en forma des ailes parfaitement semblables à celles des oiseaux. Les petites plumes qui devaient en former le fond
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YULCAIN ET MINERVE.
liiront attachées avec du fil, les plus longues avec de la cire. 11 leui-
donna ensuite cette courbure qu'on remarque dans les ailes naturelles.
Icare, son fils, qui ne savait pas qu'il travaillait à sa propre perte,
rassemblait avec un air liant les plumes que le vent écartait, ou am(d-