Fig. 3-2Ô. — Minerve d'Herculanum (musée de Naples}
de la visière, huit chevaux de front s'élançaient au galop, image de h\ rapidité avec laquelle agit la pensée divine. La tête de Méduse figurait sur sa poitrine. Les bras et la tête de la déesse étaient en ivoire a l'exception des yeux formés par deux pierres précieuses; les draperies étaient en or et pouvaient s'enlever facilement, car il fallait, si la république se trouvait dans la détresse, qu'elle put avoir recours au trésor public, dont la déesse était dépositaire. Sur la face extérieure du bouclier, posé aux pieds de la déesse, était représenté le combat des Athéniens contre les Amazones, sur la face inférieure celui des géants et des Dieux : la naissance de Pandore était scul])tée sur le piédestal.
VULCAIN ET MINERVE.
Une pièce tle ÏAnt/ioiof/ic <jn'cquo compare la Minerve de Phidias, à Athènes, à hi Vénus que Praxitèhi avait faite à Cnide : « En voyant la divine image de Vénus, fille des mers, tu diras : Je souscris au juge-luent dn Phrygien Pài-is. Si tn legardes ensuite la Minerve d'Athènes, tu t'écrieras : Celui qui ne lui a [tas adjugé le prix était un bouvier! »
La Minerve du sculpteur Simart qui figura au salon de 1855 avait été conuuandée par le duc de Luynes, qui voulait avoir une imitation du
Fig. 3-20. — Minerve d'Égine (musée de Munich)
chef-d'œuvre perdu de Phidias, reproduisant exactement la description que nous en a laissée Pausanias (fig. 327).
Cette statue est certainement le plus curieux essai de reconstitution qui ait été tenté dans l'art moderne. Voici la descri|)tion qu'en a donnée Théophile Gautier, dans le compte-rendu de l'Exposition de 1855. K M. Simart, s'aidantde toutes les ressources que l'art moderne mettait à sa disposition, a restauré heureusement la silhouette générale de la statue de Phidias : il a consulté les textes et les médailles : sa Minerve n'a pas, on le pense Lien, la taille de la Minerve du Parthé-non ; il a du se borner à l'exécution au quart, ce qui donne encore une proportion de huit pieds, et suffit pour donner une idée de l'original. La description que nous venons de faire de la statue de Phidias nous dispense de ikrler en détail de M. Simart, qui s'est conformé avec la plus scrupuleuse exactitude au\ renseignements, par malheur peu
MINERVE.
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précis, qu'ont laissés les anciens. La tête de sa statue, au profil ferme et sévère, a lîien l'expression de sérénité froide et de virginité dédaigneuse qui convient à la plus chaste des divinités de l'Olympe ; une pierre d'azurite, enchâssée dans sa priuielle, rappelle Tépithète de glaucojns qu'Homère ne manque jamais dappliquer à Pallas-Athéné,
Fig. 327. — La Minerve de Phidias (reconstituée par Simart
et donne à son regard une lueur étrange : on dirait un œil vivant qui scintille à travers un masque. Nous aimons assez cette bizarrerie inquiétante. Des boucles d'oreilles d'or et des pierres bleues accompagnent les joues pâles de la déesse ; les bras taillés d'une seule pièce dans deux énormes défenses d'ivoire fossile, sont d'une rare beauté; la transparence éburnéenne, traversée de veines bleuâtres et de blancheurs rosées, joue la chair à faire illusion : on croirait voir la vie courir sous cette belle substance si polie, d'un grain si fin qui imite le derme délicat d'une jeune femme. Les pieds sont purs de forme, comme des pieds qui n'ont jamais foulé que l'azur du ciel ou la neige étincelante de l'Olympe. La tunique d'un or pâle, semblable à cet électrum si célèbre dans l'antiquité, descend à plis simples et graves, et fait le plus heureux contraste avec les teintes blanches de l'ivoire. Les bas-reliefs du bouclier et des sandales ont bien le caractère hellénique, et le serpent Ereclithée déroule d'une façon pittoresque ses écailles d^or vert... La Victoire que Minerve tient dans sa main, et qui fait palpiter éper-dumcnt ses frissonnantes ailes d'or, est la plus délicieuse statuette chryséléphantine qu'on puisse rêver, et M. Simart a cette ressemblance avec Phidias, d'avoir principalement réussi cette figure. L'artiste pour-
VULCAIN ET MINERVE.
suivant sa restauration a restitue sur le piédestal de la statue la naissance de Pandore, douée par tous les dieux comme une princesse de contes de fées, dont on dit que Phidias avait orné le socle de son colosse. Ce bas-relief est charmant et semble détaché d'une frise du temple de la Victoire Aptère; il complète la statue, dont la richesse avait besoin de cette base élégante. »
La Palias de Velletri du Louvre est une statue de grandeur colossale (fig. 328). Il est probable qu'elle tenait une Victoire en bronze dans
Fig. 328. — Palias de Velletri (d'après une statue antique. Musée du Louvre).
la main gauche, tandis que la main droite s'appuyait sur une lance. Elle porte le casque corinthien et son égide formée d'écaillés et de petits serpents est agrafée par une tête de Méduse qui a la bouche entr'ou-verte et laisse voir toutes ses dents. Elle a été trouvée en 1797 dans une villa romaine aux environs de Velletri.
La belle Minerve en bronze du musée de Turin, conçue dans un style archaïque, passe pour la reproduction d'un ouvrage célèbre dans l'antiquité (fig. 329). C'est une des plus belles figures de la déesse qui soit parvenue jusqu'à nous.
Malgré son caractère belliqueux, Palias ne fait aucunement double emploi avec Mars, qui exprime le tumulte et la fureur du combat, tandis que Minerve caractérise surtout l'intelligence guerrière et ce que nous appellerions aujourd'hui la tactique.
Minerve et Encelade. — Minervo a pris part à la guerre des dieux contre les géants et a puissamment contribué à la victoire de Jupiter. Parmi les ennemis qu'elle a terrassés, le plus important est Encelade. La force de ce géant était telle, qu'à lui seul il aurait pu lutter
Fis. 3-29. — Minerve (d'après une statue antique du Musée de Turin).
contre tous les dieux ensemble. Dans un moment où Minerve était éloignée de ses compagnons d'armes, Encelade, s'apercevant qu'elle est seule, fait un bond et se place en face d'elle. La déesse le voit sans pâlir, elle rassemble toutes ses forces et prenant à deux mains la Sicile, elle la lance sur le «^-éant qui est écrasé sous cette masse énorme. La chute d'Encelade termine la guerre des géants : parfois il essaie de remuer, et c'est ce qui produit les tremblements de terre dans cette contrée. Sa tète est placée sous le mont Etna, d'oii il vomit encore des flammes, ce qui fait dire à un poëte français :
Encelade, malgré son air rébarbatif, Dessous le mont Etna fut enterré tout vif; Là chaque fois qu'il éternue, Un volcan embrase les airs, Et quand par hasard il remue, ■ il met la Sicile à l'envers. . .
■ATI
YULCAIN ET MINERVE.
Le Bassin crEncelade à Versailles montre' le g:éant dont on aperçoit seulement la tète et les bras gigantesques au milieu des fragments de rochers. Mais la lutte de Minerve contre ce géant, telle que Ta décrite la mythologie, a été en somme assez rar<>ment représentée, parce qu'elle
Fiff. 330.
Médailk' de Gordien, frappée à Séleucie, montrant Minerve victorieuse d'dii géant (composition de G. de Saint-Aubin).
n'est pas du domaine delà plastique. Une médaille de Gordien, frappée à Séleucie, représente bien la victoire de la déesse, mais au lieu de jeter la Sicile à la tête de son ennemi, elle le transperce de sa lance (fig. 330).