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fait est prouvé par des contrats de vente où un colchite, achetant une maison à un autre colchite, stipule qu'il devient en même temps possesseur des tombeaux qui y sont et qu'il sera par conséquent chargé des cérémonies funèbres. Les noms des morts sont soigneusement enregistrés dans ces sortes de contrats, parce que les cérémonies que les familles demandaient pour chacun d'eux étaient fort bien payées et constituaient un revenu considérable.

Une plainte en violation de tombeau a été adressée par un colchite, sous le règne de Philoméior; l'original de cette plainte, conservé parmi les manuscrits du musée égyptien au Louvre, est ainsi conçu :

« A Denis, un des amis, hipparque des hommes et arcliiphylacite (préfet de police) du Pcri-Thèbes; de la part d'Osoroëris, fils d'Horus, colchite d'entre ceux des Meumonia. Je porte à ta connaissance que l'anxLiv, lorsque le stratège Lochus est venu |à Diospolis la Grande, certaines personnes ont envahi l'un des tombeaux qui m'appartiennent dans le Peri-Thèbes; l'ayant ouvert, ils ont dépouillé quelques-uns des corps qui y étaient ensevelis, et en même temps ont emporté les effets que j'y avais mis, montant à la somme de dix talents de cuivre (environ sept cents francs). Il est arrivé aussi que, comme la porte fut laissée toute grande ouverte, des corps en bon ét:it ont beaucoup souffert de la part des loups, qui les ont en partie dévorés. Puisque j'intente action contre Poëris et et Phtonis, son frère, je demande qu'il

soit cité devant toi, et qu'après miir examen, on rende la décision

convenable.

« Sois heureux' ! »

Il est à remarquer que le plaignant s'adresse ici au chef de la gendarmerie, dont les agents devaient prévenir ou empêcher le délit. Mais en même temps la plainte nous informe des raisons pour lesquelles ils n'avaient pas pu l'empêcher : en effet, quand le gouverneur visitait la province confiée à son administration, il passait en revue les troupes cantonnées dans le nome, et les voleurs ont profité de leur absence pour faire leur coup. Il y a au reste dans cette plainte deux choses distinctes : le plaignant a bien pu retrouver les objets soustraits si les voleurs ont été arrêtés, il a pu réclamer une indemnité pour le dégât matériel, mais les loups qui sont entrés en ont commis un bien autrement grave aux yeux des familles des défunts, et le pauvre colchite, responsable des corps qui lui avaient été confiés, a du recevoir de

1. Thcadule Devéria, Catalogues des manuscrits égyptiens, p. 235.

graves réclamations pour cette mutilation qui blessait si profondément le sentiment religieux du pays.

Les gardiens des tombeaux formaient dans les grandes villes, à Thèbes par exemple, des compagnies qui exploitaient les enterrements par quartiers. Ces compagnies empiétaient quelquefois les unes sur les autres, et il existe des papyrus contenant les pièces de procès relatifs à ces empiétements de terrains. Dans les contrats relatifs à ces terrains, on mettait non-seulement les noms des parties contractantes, et ceux des propriétaires limitrophes, mais encore on énonçait minutieusement l'emplacement et l'orientation du terrain cédé. Le musée du Louvre possède plusieurs de ces contrats.

Les richesses immenses que renfermaient les hypogées étaient bien faites pour tenter les voleurs, et les papyrus nous révèlent les enquêtes judiciaires qui ont eu lieu à propos de ces spoliations. Le catalogue du musée de Boulaq nous fournit aussi un renseignement bien curieux dans la description suivante : « Une stèle de bois, couverte de stuc doré, a été trouvée avec ce cercueil dans la chambre souterraine qui a fourni au musée un si riche ensemble de monuments funéraires. L'or de cette stèle, comme celui qui couvrait le visage des cercueils des momies, a été soigneusement gratté. Mais, chose singulière, l'outil qui profanait sans scrupule la figure et les titres de Tat-ankh s'est arrêté subitement devant l'image d'Osiris, qu'il a laissée intacte. C'est ce respect craintif du violateur de la tombe pour ie dieu de l'enfer égyptien qui nous autorise à penser que les profanations dont cette tombe a été l'objet remontent à l'antiquité. »

IV

LA FAMILLE EN ASIE

La polygamie orientale. — La famille chiîz les Hébreux.

Les repas des Hébreux. — Mariages babyloniens. — Les repas assyriens.

Usages ue la Perse. — Usages lydiens.

La polygamie orientale. — La polygamie a toujours existé en

Orient. A quelques nuances près, la famille orientale est constituée

partout comme une simple propriété. La femme est comme la chose de

l'époux, elle n'a aucun droit personnel, elle est honorée si elle est

II. 1

féconde, méprisse ou chassée si elle est stérile, mais nulle part on ne la voit maîtresse de mai?on, nulle part ou ne la voit avoir une autorité quelconque dans la famille, un rôle dans la société. Le mari peut en prendre plusieurs, s'il le désire, et leur donner au même titre le nom d'épouse : les enfants qui naissent appartiennent au père et augmentent sa richesse, au même titre que les agneaux que ses brebis mettent bas. Femmes, enfants, bestiaux, tout cela appartient également au chef de la famille, dont l'autorité est partout incontestée.

Ce caractère est surtout frappant dans la vie patriarcale, mais on le retrouve dans toutes les sociétés orientales, dans la vie politique aussi bien que dans la vie de famille. Habituellement c'est le fils aîné qui succède au père, et la famille qui s'est augmentée par les collatéraux se transforme en tribu : quand les tribus, au lieu d'être errantes, parviennent à se grouper d'une façon fixe, la monarchie s'établit, et le roi possède son peuple comme le père de famille possède sa femme et ses enfants. Nous verrons quelques différences entre les diverses nations de l'Orient, qui se modiGcnt peu à peu à mesure que la civilisation se développe, mais le régime fondamental demeure le même au fond et peut, quant à la famille, se résumer ainsi : possession absolue et sans contrôle de tous les membres par le chef.

La famille chez les Hébreux. — La polygamie était admisecnez les Hébreux, au moins dans^ les temps primitifs. Les patriarches ont plusieurs femmes, et dans la grande période historique du peuple îiébreu, on voit les rois, notamment Salomon, avoir de grands harems organisés comme ceux de tous les monarques orientaux. Néanmoins la polygamie ne paraît pas avoir été dans les habitudes de la nation, et elle disparaît tout à fait à partir de la captivité de Babylone. Les rabbius assurent même que, bien que les livres de Moïse ne défendent pas la polygamie, elle n'existait dans le peuple que d'une manière tout à fait accidentelle : par exemple, un homme marié dont la femme était stérile en prenait ordinaireipent une autre. Mais nous voyons par l'histoire d'Abraham que l'enfant qu'un patriarche avait d'une servante était peu de chose à ses yeux, puisqu'il n'hésite pas à le chasser et à le laisser sans ressource quand sa femme légitime est devenue mère à son tour. D'un autre côté, Jacob épouse Lia et Rachel sans que l'une des deux sœurs soit subordonnée à l'autre. Tout ce qu'on peut affirmer, c'est que, si la polygamie existe, la nation en fait rarement usage.

Le mari était maître absolu de sa femme et pouvait la renvoyer : « Quand quelqu'un aura pris une femme et qu'il se sera marié avec elle, s'il arrive qu'elle ne trouve pas grâce devant ses yeux, parce qu'il aura trouvé en elle quelque chose d'infâme, il lui écrira une lettre de divorce, et, la lui ayant mise entre les mains, il la renverra hors de sa maison. » La loi juive spécifie, comme on voit, que la répudiation doit avoir pour cause une chose infâme ; mais comme elle Institue le mari seul juge du cas d'infamie, la femme reste vis-à-vis de lui sans aucune garantie légale. Cette infamie, au reste, ne saurait être l'adultère, car radultère est puni, non de la répudiation, mais de la mort. » Pour l'homme qui aura commis adultère avec la femme d'un autre , on fera mourir l'homme et la femme adultères. »