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Peut-on longtemps habiter l’idée pure ? Peut-on imposer le fait qu’elle ne se transmette pas, qu’elle ne sorte pas du cénacle, qu’elle ne trouve pas sa traduction, son incarnation, dans l’écrit ? Et de fait, en dépit de l’interdit qui règle l’existence du club, le livre est bien là, livré à la lecture du public, à son appréciation, à son plaisir. Quelqu’un l’a écrit, quelqu’un a porté témoignage en brisant le secret, quelqu’un qui fut introduit dans le cercle. Pourquoi ?

Krzyzanowski, ce Polonais né à Kiev, écrivant en russe, qui parcourut les universités européennes à la veille de la Première Guerre mondiale, éblouit ici par l’immensité de sa culture. Sa force tient en cela que quel que soit le thème par lequel il met en jeu cette culture, c’est toujours dans l’espace d’une interrogation vitale. La littérature est un jeu grave auquel il se prend pour regarder la vie. Un jeu, parce qu’on peut, comme au taquin, bousculer l’agencement de toutes les pièces – et l’un des récits des sept en est une démonstration brillante. Mais un jeu grave, parce que la partie ne se gagne qu’en s’empoignant à la question du sens.

Et c’est bien pourquoi le récit du traître, du témoin, ou de l’homme en trop – c’est selon le point de vue que l’on adopte – s’achève par cette phrase lumineuse : « Voilà, je rends les mots, tous les mots, sauf un : la vie. »

La Croix, 14 novembre 1993,

par Jean-François Bouthors,

Notes

X. Ceci est la note-test. Le premier mot précédent le chiffre ne comportant que 4 lettres, donc deux mots sont saisis. Dans cet exemple, l'appel est mis en gras exceptionnellement. Un doigt sur n'importe quelle partie du texte de la note renvoie directement au texte.

1. Acte de décès.

2. Á chacun le sien, mes amis.

3. Notker le Bègue (= 840-912), moine de l’abbaye de Saint-Gall, l’un des premiers à avoir introduit le trope dans le chant liturgique.

4. Au sein de la vie, la mort.

DU MÊME AUTEUR

dans la même collection

Le Marque-page, traduit par Catherine Perrel et Eléna Rolland-Maïski, 1991.

Le Club des tueurs de lettres, traduit par Claude Secharel, 1993.

Estampillé Moscou, traduit par Eléna Maïski avec la collaboration de Catherine Perrel, 1996.

Le Thème étranger, traduit par Zoé Andreyev et Catherine Perrel, 1999.

Le Retour de Münchhausen, traduit par Anne Coldefy-Faucard, 2002.

Souvenirs du futur, traduit par Anne-Marie Tatsis-Botton, 2010.

Fantôme, traduit du russe par Luba Jurgenson, préfacé par Catherine Perrel, 2012.

Rue involontaire, traduit et préfacé par Catherine Perrel, 2014.