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Nous trouvâmes les trois amis attendant patiemment dans la salle à manger, silencieux. Avec un courage bien masculin, ils se contentaient de rester sans rien faire, conscients d'avoir fait jusque-là tout ce qui était en leur pouvoir.

Et ainsi nous attendîmes.

En entendant sonner deux heures, nous nous sentîmes un peu ragaillardis. Toutes les ombres qui s'étaient accumulées sur nos têtes pendant les longues heures précédentes parurent se disperser instantanément, et nous allâmes tous à nos différentes tâches avec entrain et empressement. Nous vérifiâmes tout d'abord si toutes les fenêtres étaient bien fermées; car à présent la tempête faisait rage au point de nous faire craindre qu'elle ne bouleverse nos plans qui, après tout, nécessitaient un calme complet. Nous préparâmes nos masques respiratoires pour les mettre quand on approcherait du moment fatidique. Nous avions depuis le début décidé de nous en servir, car nous ne savions pas si quelque fumée nocive ne se dégagerait pas du Coffre Magique quand il serait ouvert. L'idée qu'il pourrait ne pas s'ouvrir ne venait en effet à l'esprit d'aucun de nous.

Alors, sous la direction de Margaret, nous transportâmes, de la chambre de cette dernière à la caverne, le corps de la Reine Tera toujours vêtue de sa toilette de mariée.

Étrange spectacle, étrange expérience. Ce groupe d'hommes graves emportant loin des bougies allumées et des fleurs blanches ce corps blanc immobile, qui prit l'aspect d'une statue d'ivoire lorsque, pendant le transport, la robe tomba.

Nous l'étendîmes dans le sarcophage, et nous plaçâmes dans la position convenable sur sa poitrine la main coupée. La Pierre aux Sept Étoiles, que Mr. Trelawny avait extraite du coffre, fut posée sous cette main. Tandis que nous l'arrangions, elle parut flamboyer et étinceler. L'électricité éclairait d'une lumière froide le grand sarcophage préparé pour la tentative finale – La Grande Expérience, aboutissement des recherches de deux savants voyageurs poursuivies pendant toute une existence. De nouveau, la ressemblance frappante entre Margaret et la momie, accentuée par l'extraordinaire pâleur de la première, conférait à l'ensemble une étrangeté supplémentaire.

Quand finalement tout fut en état, trois quarts d'heure s'étaient écoulés car nous ne faisions rien à la hâte. Sur un signe de Margaret, je la suivis dans sa chambre. Là, elle fit une chose qui m'émut curieusement, et me fit sentir le caractère désespéré de l'entreprise dans laquelle nous étions engagés. Une par une, elle éteignit soigneusement les bougies et les remit à leur place habituelle. Quand elle eut terminé, elle me dit:

– Elles ont joué leur rôle. Quoi qu'il arrive désormais – la Vie ou la Mort -, il n'y aura plus aucune raison de s'en servir!

Nous mîmes en place nos masques, et allâmes occuper les places qui nous avaient été assignées. Je devais me tenir à côté des interrupteurs électriques, prêt à éteindre ou à donner de la lumière selon les instructions de Mr. Trelawny. La dernière recommandation qu'il me fit d'exécuter scrupuleusement ses instructions avait presque le caractère d'une menace; il m'avertissait que toute erreur ou négligence de ma part pourrait signifier la mort pour l'un d'entre nous. Margaret et le Dr Winchester devaient se tenir entre le sarcophage et le mur, de manière à ne pas se trouver entre la momie et le Coffre Magique. Ils devaient noter exactement tout ce qui arriverait concernant la Reine.

Mr. Trelawny et Mr. Corbeck devaient veiller à ce que les lampes soient allumées et ensuite prendre leur place, le premier au pied, le second à la tête du sarcophage.

Quand les aiguilles de la pendule furent tout près de l'heure juste, ils se tinrent prêts avec leur queue-de-rat allumée, comme les artilleurs de l'ancien temps avec leur boutefeu.

Pendant les quelques dernières minutes, le temps s'écoula avec une lenteur torturante. Mr. Trelawny était debout, la montre à la main, prêt à donner le signal.

L'heure approchait avec une inconcevable lenteur; mais vint enfin ce bruit d'engrenages annonçant que l'aiguille approche du chiffre. Le son argentin du timbre de l'horloge se répercuta dans nos cœurs comme un glas: Un! Deux! Trois!

Les mèches des lampes s'enflammèrent, je coupai l'électricité. Dans la demi-clarté des lampes qui s'efforçaient de prendre, après la grande lumière de l'électricité, la pièce et tout ce qu'elle contenait prirent une forme étrange, tout parut changer en un instant. Nous attendions, le cœur battant.

Les secondes passaient avec une pesante lenteur. On aurait dit que le monde s'immobilisait. Les silhouettes des autres n'apparaissaient qu'indistinctement; seule la robe blanche de Margaret se distinguait nettement dans la pénombre. Les masques volumineux, que nous portions tous, accentuaient l'atmosphère étrange. Les yeux des deux hommes penchés sur le Coffre paraissaient luire dans le peu de lumière qu'il y avait. De l'autre côté de la pièce, les yeux du Dr Winchester étincelaient comme des étoiles, ceux de Margaret brillaient comme des soleils noirs.

Et si les lampes ne s'allumaient jamais!

Il fallut à peine quelques secondes pour qu'elles s'éclairent. Une lueur lente à s'établir, régulière, devenant de plus en plus vive, et changeant de couleur, allant du bleu au blanc vif. Cela dura ainsi environ deux minutes, sans changement notable dans le Coffre. Finalement, une lueur délicate commença à apparaître sur toute sa surface. Elle grandit, grandit, jusqu'à ce que le Coffre prenne l'aspect d'une pierre précieuse étincelante; et il devint comme une chose vivante, dont l'essence même était la lumière. Mr. Trelawny et Mr. Corbeck allèrent silencieusement prendre leur place à côté du sarcophage.

Tout d'un coup, il y eut un bruit ressemblant à une petite explosion étouffée, et le couvercle du Coffre se souleva horizontalement de quelques centimètres; il n'y avait pas à s'y tromper, car toute la caverne était à présent inondée de lumière. Alors le couvercle, en restant fixe d'un côté, se souleva lentement de l'autre, comme s'il avait cédé à une pression. Je ne pouvais pas voir ce qu'il y avait à l'intérieur, car le couvercle soulevé m'en empêchait. Le Coffre continuait à briller; il commença à s'en échapper une vague vapeur verdâtre qui se mit à flotter dans la direction du sarcophage comme si elle avait été poussée ou attirée de ce côté. Je ne pouvais sentir nettement l'odeur qui se dégageait à cause de mon masque, mais, même au travers, il me semblait percevoir une odeur étrange et caustique. Au bout de quelques secondes, la vapeur parut s'épaissir et commença à pénétrer directement dans le sarcophage ouvert. Il était à présent évident que le corps momifié exerçait sur elle une certaine attraction; et également que cette vapeur avait un effet sur le corps, car le sarcophage s'illuminait lentement, comme si le corps avait commencé à devenir incandescent. De là où je me trouvais, je ne pouvais voir à l'intérieur, mais d'après l'expression de physionomie des quatre personnes qui regardaient, je compris qu'il se passait quelque chose d'étrange.