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Un Dumii leva la main, mal assuré.

— Encore un exercice ? demanda-t-il.

Il y avait eu beaucoup d’exercices, ces derniers jours.

— Non !

— Oh. D’accord.

Un instant plus tard, l’air s’emplit d’ordres qu’on criait.

Snibril tomba un genou en terre tandis qu’Uzure se vidait autour de lui.

— … escadron trois ! Grand-Place ! Et tenez-vous à l’écart des bâtiments !…

— … les pansements, les pansements, qui c’est qui a les pansements ?…

— … et n’oubliez pas, ils peuvent également arriver par en dessous !…

Tout ce que souhaitait Snibril, c’était de se trouver un trou et de s’y enfermer. Il avait l’impression d’avoir la tête complètement aplatie.

— … Bien, faites aligner les pones !…

Mais il pouvait encore s’éloigner. En titubant, ignoré de tous, il faillit dégringoler de l’échelle qui menait au pied des remparts et retrouva à tâtons le chemin de la barre à laquelle il avait attaché Roland. Il se hissa sur le dos du cheval et rejoignit le flot de personnes qui abandonnaient Uzure.

A leur tour, les animaux commencèrent à ressentir les effets du grand Découdre. Les pones, qui se trouvaient déjà en dehors de la ville, se mirent à barrir. Les chevaux hennissaient, et plusieurs s’emballèrent et gagnèrent les poils qui longeaient les fortifications. Chats et chiens couraient entre les jambes des gens.

Ils cherchent à s’enfuir, songea mollement Snibril.

Les maisons se mirent à trembler, très doucement.

Puis, sans encore faire de bruit, les poils qui s’élevaient au-dessus de la ville commencèrent à se ployer.

Et là, les craquements débutèrent – longs, prolongés, tandis que des milliers de poils étaient pressés vers le sol sous un poids prodigieux.

C’est juste au-dessus de nous, songea Snibril.

Les gens qui quittaient Uzure n’avaient pas besoin d’autre encouragement. Les poils qui couvraient la ville se rapprochèrent, gémissant et craquant sous la pression qui les écrasait.

Nous n’arriverons jamais à tout faire évacuer à temps…

Roland trotta sous l’arche de la porte.

Les murailles s’effondrèrent. Le sol frissonna comme la peau d’un animal, renversant les maisons. Uzure commença à crouler sur elle-même.

Les oreilles de Snibril se débouchèrent. Le soulagement faillit lui faire monter les larmes aux yeux.

Il reporta son regard vers la ville. Les murailles chutaient encore, tandis que le Tapis pliait sous le poids du grand Découdre, mais presque tout le monde avait réussi à quitter la cité.

Quelques soldats jaillirent par la grand-porte au moment où elle s’abattait.

Juste au-dessus de nous, se répéta Snibril. Comme si quelque chose voulait nous tuer. Mais Forficule attribue le grand Découdre à une sorte de phénomène naturel que nous ne comprenons pas. Est-ce qu’on doit vraiment préférer ça ? Des milliers d’entre nous, tués par un phénomène qui ne soupçonne même pas notre existence ?

Il y avait encore quelques personnes visibles en dehors des remparts d’Uzure, et rien n’aurait réussi à dissimuler les pones.

Il regarda les poils autour de la ville.

Qui crachèrent des moizes. Il eut le temps de faire volter Roland et de galoper en direction de la ville.

La tête de Fléau apparut au moment où Roland sautait la tranchée ouverte dans la poussière.

— Ils sont des milliers !

— Attendez qu’ils approchent, ordonna Fléau.

Moizes et snargues continuaient à débouler dans la clairière.

Snibril jeta un coup d’œil dans la tranchée. En cet endroit, la plupart des défenseurs étaient des archers dumiis. Calmement étendus par terre, ils observaient la muraille noire qui progressait vers eux.

— Ils ne sont donc pas assez près ?

— Pas encore, répondit Fléau. Sergent Caréus… donnez le signal de se préparer.

— Oui, mon général !

Snibril pouvait maintenant distinguer les créatures individuellement.

Fléau se gratta le menton.

— Pas encore, dit-il. Pas encore. La première volée est la plus… importante.

Une lueur parut sur le monticule de poussière derrière eux. Snibril et Fléau se tournèrent pour voir une forme blanche qui considérait la charge de la horde avec un regard intense. Puis elle disparut.

— Sergent Caréus ? fit Fléau d’une voix calme.

— Mon général ?

— Le moment est maintenant !

Le sergent Caréus renversa la tête en arrière et afficha un large sourire.

— Oui, mon général ! Première escouade… Attendez, attendez… Premièèère escouade… feu ! Première escouade, repli ! Deuxièèème escouade… feu ! Première escouade, rechargez ! Première escouade, en avant ! Premièèère escouade… feu…

Peu de gens avaient vu les archers dumiis en action… Ou plutôt si ; ils avaient été nombreux. Mais comme les flèches se dirigeaient vers eux, ils n’avaient jamais eu le loisir de prendre des notes détaillées. Leur technique consistait simplement à diriger des volées constantes de flèches en direction de l’ennemi. On ne demandait pas aux archers d’être précis. On leur demandait d’être vifs. On avait l’impression de regarder une machine en action.

Un hurlement monta des assaillants. C’était une autre leçon dumiie : frappez la première ligne d’une vague d’assaut dirigée contre vous, et l’ennemi devra gaspiller du temps à éviter de se marcher dessus. Les archers commencèrent à courir le long de la tranchée dans les deux directions, ne laissant en place qu’une petite escouade pour continuer le combat.

Snibril les suivit.

Les archers avaient occupé toute la circonférence. Les moizes n’étaient parvenus jusqu’à la tranchée qu’en un seul point, et deux corps à corps étaient en cours – des Fulgurognes aux prises avec les moizes, et d’autres Fulgurognes qui se battaient avec les premiers Fulgurognes pour avoir une chance de combattre les moizes, eux aussi.

Pour affronter des ennemis trois fois plus grands qu’eux, les Fulgurognes avaient mis au point une tactique – ils se ruaient sur eux pour les escalader jusqu’au niveau des épaules, s’agrippaient d’une main et se battaient de l’autre. Ce qui fait que la moitié des moizes s’administraient de violents coups d’épée dans la tête.

Deux charges supplémentaires se succédèrent avant que les moizes commencent à percevoir que les événements ne tournaient pas comme prévu.

Ils se regroupèrent sous les poils ; ils étaient encore trop nombreux.

— On pourrait continuer comme ça toute la journée, observa Brocando.

— Oh non ! répliqua Fléau.

— Mais on ne déplore encore aucune perte !

— Soit. Mais vous avez envie d’aller voir les moizes pour leur demander de nous rendre nos flèches ?

— Oh !

— Il nous en reste assez pour soutenir une nouvelle charge, et puis c’est tout. Et s’il faut en arriver au corps à corps – ils ont plus de bras que nous.

— Mais je croyais qu’un homme averti en valait deux.

— C’était une figure de style. Ils nous surpassent sur le plan des effectifs et sur celui des armements.

— Excellent, répliqua Brocando. Les défis me stimulent.

— Ils reviennent, leur dit Snibril. Attendez… Quelques-uns seulement. Regardez.

Une demi-douzaine de snargues sortaient en trottant des lignes adverses. Elles s’arrêtèrent à mi-chemin entre l’armée moize et les décombres de la ville.

— Ils veulent parlementer, déduisit Fléau.

— Peut-on leur faire confiance ? demanda Snibril.

— Non.

— Tant mieux. Je n’aimerais pas faire confiance à ces sales créatures.