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— Distrayant, mais pas très convaincant, avait répondu Langdon. Tracez suffisamment de lignes sur n’importe quelle carte et, tôt ou tard, vous obtiendrez le même résultat.

— Mais ça ne peut pas être une coïncidence ! Langdon lui avait patiemment démontré que les mêmes figures pouvaient apparaître sur une carte de Détroit.

L’étudiant n’avait pu cacher sa déception.

— Ne perdez pas le moral. Washington regorge de secrets incroyables. C’est juste qu’ils ne se trouvent pas sur cette carte.

Le garçon avait dressé l’oreille.

— Des secrets ? Comme quoi ?

— Tous les printemps, je donne un cours qui s’appelle Symboles occultes. J’y parle beaucoup de Washington. Vous devriez vous inscrire.

— « Occultes » dites-vous ! Alors il y a bel et bien des symboles sataniques !

Langdon avait souri.

— Désolé, mais ce terme, malgré les fantasmes qu’il suscite, signifie simplement « caché », « secret ». Sous l’oppression religieuse, tout savoir en contradiction avec la doctrine devait rester caché, ou « occulte ». Se sentant menacée, l’Église a alors tenu pour mauvais tout ce qui était « occulte », et ce préjugé a perduré jusqu’à aujourd’hui.

— Ah, avait murmuré l’étudiant, dépité.

Cependant, au printemps, Langdon le repéra au premier rang alors que cinq cents élèves prenaient place sur les bancs en bois du vieil amphithéâtre Sanders.

— Bonjour et bienvenue à tous, entonna Langdon, debout sur la grande estrade. (Il alluma un projecteur de diapositives, une photo se matérialisa derrière lui.) Pendant que vous vous installez, combien d’entre vous reconnaissent ce bâtiment ?

— Le Capitole ! s’écrièrent des dizaines de voix à l’unisson. Washington !

— Exact. Il y a quatre mille tonnes de métal dans ce dôme. Un triomphe d’ingéniosité architecturale inégalé à l’époque.

— Ça déchire ! lança quelqu’un.

Langdon leva les yeux au ciel – si seulement quelqu’un pouvait interdire cette expression...

— Bon, et combien d’entre vous sont déjà allés à Washington ?

Quelques mains se levèrent çà et là.

— Si peu ? réagit Langdon, feignant la surprise. Et combien à Rome, Paris, Madrid ou Londres ?

Cette fois, presque toutes les mains se dressèrent.

Comme d’habitude !

L’un des rites de passage de l’étudiant américain était de sillonner l’Europe en été avec un pass Eurail avant que la dure réalité de la vie adulte ne le rattrape.

— Vous êtes donc plus nombreux à avoir visité l’Europe que votre propre capitale. Pourquoi, d’après vous ?

— On peut boire à n’importe quel âge en Europe ! hurla quelqu’un du fond de l’amphithéâtre.

— Comme si la limite d’âge vous empêchait de boire ici, plaisanta Langdon, provoquant l’hilarité générale.

C’était le premier cours du trimestre. Les étudiants s’agitaient encore sur leurs bancs, prenant le temps de s’installer. Langdon aimait enseigner dans cette salle car il pouvait mesurer le niveau d’attention des élèves aux craquements de leurs sièges.

— Washington accueille quelques-unes des plus grandes merveilles architecturales et artistiques du monde. Pourquoi aller à l’étranger avant même d’avoir visité sa propre capitale ?

— Les trucs anciens, c’est plus cool.

— Et par « trucs anciens », poursuivit Langdon, j’imagine que vous voulez parler des châteaux, cryptes et autres temples.

Plusieurs élèves hochèrent la tête.

— D’accord. Et si je vous disais que Washington possède toutes ces choses-là ? Châteaux, cryptes, temples... tout.

Les grincements diminuèrent.

— Mes amis, continua-t-il d’une voix plus basse, en s’avançant sur l’estrade, au cours de l’heure qui va suivre, vous allez découvrir que notre nation déborde de secrets et d’histoires occultes. Et, comme en Europe, les meilleurs secrets se cachent en pleine lumière.

Les vieux bancs se turent enfin.

Gagné !

Langdon éteignit les lumières avant de passer à la diapositive suivante.

— Qui peut me dire ce que George Washington est en train de faire ici ?

La célèbre peinture murale représentait Washington en grande tenue maçonnique, debout devant un étrange appareil – un immense trépied en bois supportant une poulie avec une corde, au bout de laquelle pendait un bloc de pierre massif. Un groupe de spectateurs bien habillés l’entourait.

— Il est en train de soulever ce gros bloc ? tenta quelqu’un.

Langdon garda le silence, préférant si possible qu’un autre étudiant le corrigeât.

— Je crois plutôt qu’il est en train de le poser. Il porte une tenue maçonnique. J’ai déjà vu d’autres images de francs-maçons en train de poser des pierres angulaires, et ils utilisent toujours cette espèce de trépied pendant la cérémonie.

— Excellent ! fit Langdon. Cette peinture murale représente le père de la nation utilisant un trépied et une poulie pour poser la pierre angulaire du Capitole des États-Unis, le 18 septembre 1793 entre 11 h 15 et 12 h 30. (Langdon balaya la salle du regard.) Quelqu’un connaît la signification de cette date et de cette heure ?

Silence.

— Et si je vous disais qu’elles furent soigneusement choisies par George Washington, Benjamin Franklin et Pierre L’Enfant, tous trois francs-maçons ?

Silence, encore.

— Si la pierre a été posée à ce moment-là, c’est entre autres choses parce que Caput Draconis était dans la maison de la Vierge.

Les étudiants échangèrent des regards interloqués.

— Attendez, vous nous parlez de... d’astrologie ?

— Oui. Mais une approche de l’astrologie très différente de celle que nous connaissons aujourd’hui.

— Vous essayez de nous dire que les pères fondateurs croyaient en l’astrologie ? demanda un étudiant.

Langdon eut un large sourire.

— Et comment ! La ville de Washington compte plus de symboles astrologiques dans son architecture que n’importe quelle autre ville au monde. Signes du Zodiaque, constellations, constructions entamées à des instants bien précis... Plus de la moitié des auteurs de notre Constitution étaient des francs-maçons, convaincus que les étoiles et le destin étaient inextricablement liés, des hommes qui prêtaient une attention particulière à l’architecture des cieux pendant qu’ils composaient celle de leur nouveau monde.

— Mais cette histoire sur la pierre angulaire et Caput Draconis en Vierge, qu’est-ce qu’elle signifie ? Si ça se trouve, c’est juste une coïncidence.

— Une coïncidence incroyable si l’on considère que les pierres angulaires des trois structures qui forment le Triangle fédéral – Capitole, Maison Blanche et Washington Monument – furent posées en des années différentes, mais toujours sous les mêmes configurations astrologiques.

Dans l’amphithéâtre tous les regards convergeaient sur Langdon. Quelques étudiants baissèrent la tête pour commencer à prendre des notes.

— Pourquoi ont-ils fait ça ?

— La réponse à votre question va nous occuper pendant tout le trimestre. Les plus curieux d’entre vous peuvent s’inscrire à mon cours sur le mysticisme. Mais, honnêtement, je ne crois pas que vous soyez prêts à entendre la réponse.

— Quoi ? Allez, dites-nous !

Langdon fit mine de réfléchir, secoua la tête, jouant avec les nerfs de ses étudiants.

— Désolé, c’est impossible. Certains d’entre vous sont encore en première année. Vous risquez de ne pas vous en remettre.

— Allez ! protestèrent les élèves en chœur.

Langdon haussa les épaules.

— Peut-être devriez-vous chercher vos informations à la source ? Rejoignez les francs-maçons ou l’Ordre de l’Étoile orientale.