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En fin d’après-midi, ils émergèrent du couvert et se trouvèrent en présence d’un cours d’eau. Tourte en poussa un cri de ravissement. «#nbsp#Le Trident#nbsp#! On a plus main’nant qu’à le r’monter comm’ t’as dit. On y est presque#nbsp#!#nbsp#»

Arya se mâchouilla la lèvre. «#nbsp#Je ne pense pas que ce soit le Trident.#nbsp#» Tout grossi qu’il était par la pluie, tout au plus avait-il trente pieds de large. Le Trident de ses souvenirs était beaucoup plus imposant. «#nbsp#C’est trop petit pour être le Trident, dit-elle, et on n’a pas assez marché.

#longdash##nbsp#Oh que si#nbsp#! s’obstina Tourte. On a cavalé toute la journée, et on s’est comme qui dirait pas arrêtés du tout. On a dû faire pas mal de route.

#longdash##nbsp#Regardons cette carte encore un coup#nbsp#», dit Gendry.

Arya mit pied à terre, sortit la carte et la déroula. La pluie crépitait sur le parchemin et y formait des ruisselets. «#nbsp#On est quelque part dans ce coin, je pense, indiqua-t-elle du bout du doigt, tandis qu’ils se penchaient par-dessus son épaule.

#longdash##nbsp#Mais#nbsp#! s’étrangla Tourte, on aurait comme qui dirait pas bougé#nbsp#! Regarde, Harrenhal est là, près de ton doigt, tu le touches presque…, et on a cavalé toute la journée#nbsp#!

#longdash##nbsp#Il y a des milles et des milles avant qu’on arrive au Trident, dit-elle. Il nous faudra des jours. Il doit s’agir ici d’un autre cours d’eau, l’un de ceux-ci, tu vois#nbsp#?#nbsp#» Elle montrait un réseau de traits beaucoup plus ténus peints en bleu par le cartographe, chacun surmontant un nom tracé en pattes de mouche. «#nbsp#Le Darry, la Pomme verte, la Gamine…, ah, ici, le Saulet #shortdash# pourrait être ça.#nbsp#»

Tourte compara d’un coup d’œil la chose et le trait. «#nbsp#M’a pas l’air si petit, à moi.#nbsp#»

Gendry fronçait tout autant les sourcils. «#nbsp#Çui que tu désignes, y se jette dans cet autre, vois#nbsp#?

#longdash##nbsp#Le Saule, lut-elle.

#longdash##nbsp#Va pour ton Saule. Hé bien, ton Saule, y rejoint le Trident. On aurait qu’à suivre l’un puis l’autre, mais faut descendre le courant, pas monter. Seulement, si c’est#nbsp#pas le Saulet, ça, si c’est cet autre, là…

#longdash##nbsp#Le Risou, lut-elle.

#longdash##nbsp#Y fait un crochet, vu#nbsp#? Coule vers le lac et puis rapplique à Harrenhal.#nbsp#» Son doigt souligna ses dires.

Tourte s’exorbita. «#nbsp#Non#nbsp#! Sûr qu’y nous tueront.

#longdash##nbsp#Faut qu’on sache quel c’est, déclara Gendry de sa voix la plus butée. Faut qu’on sache.

#longdash##nbsp#Hé bien, on ne sait pas.#nbsp#» La carte pouvait bien comporter autant de noms que de traits bleus, personne n’avait inscrit de nom, là, sur la rive. «#nbsp#On ne va pas remonter le courant ni le descendre, décida-t-elle tout en enroulant la carte. On traverse, et on continue d’aller vers le nord, comme avant.

#longdash##nbsp#Ça sait nager, les ch’vaux#nbsp#? demanda Tourte. Ç’a l’air profond, Arry… Et s’y a des serpents#nbsp#?

#longdash##nbsp#T’es sûre qu’on va vers le nord#nbsp#? demanda Gendry. Toutes ces collines… on aurait pas, des fois, fait demi-tour#nbsp#?

#longdash##nbsp#La mousse des arbres…#nbsp#»

Il en montra un, tout près. «#nbsp#Çui-là a de la mousse sur trois côtés, et çui d’à côté pas du tout. Peut-être on est paumés, peut-être on fait que tourner en rond.

#longdash##nbsp#Peut-être, admit-elle, mais moi, je traverse quand même. Libre à vous de venir ou de rester là.#nbsp#» Sans plus s’occuper d’eux, elle sauta en selle. S’ils ne voulaient pas suivre, ils n’avaient qu’à trouver Vivesaigues tout seuls, sauf qu’ils risquaient plutôt de se faire trouver par les Pitres.

Il lui fallut longer la rive un bon demi-mille avant de découvrir un endroit qui semblait à peu près propice à la traversée, mais sa jument n’en renâcla pas moins à pénétrer dans l’eau. Le ruisseau, quel que fût son nom, roulait des eaux brunes et rapides qui, au plus creux du lit, montaient jusqu’aux flancs du cheval. Malgré ses bottes inondées, elle joua tant et si bien des talons qu’elle finit par se retrouver sur la berge opposée. De l’arrière lui parvinrent un gros plouf et un hennissement nerveux. Ils ont donc suivi. Bien. Elle pivota pour les regarder traverser tant bien que mal et, tout dégouttants, monter la rejoindre. «#nbsp#Ce n’était pas le Trident, leur dit-elle. Ça, non.#nbsp#»

Moins profond, le suivant fut plus facile à franchir. Lui non plus n’était pas le Trident, et aucun des garçons ne discuta lorsqu’elle annonça qu’on traverserait.

La nuit s’installait quand ils s’arrêtèrent une nouvelle fois pour laisser reposer les montures et partager un autre repas de fromage et de pain. «#nbsp#Je suis trempé, frigorifié, larmoya Tourte. Sûr qu’on est loin d’Harrenhal, main’nant. On pourrait s’ faire un feu…

#longdash##nbsp#NON#nbsp#!#nbsp#» s’exclamèrent d’une même voix les deux autres, et juste au même instant. Tandis que Tourte rouscaillait un peu, Arya jeta un coup d’œil furtif vers Gendry. Il l’a dit avec moi, comme le faisait Jon à Winterfell. De tous ses frères, c’est Jon qui lui manquait le plus.

«#nbsp#On peut dormir, au moins#nbsp#? demanda Tourte. Chuis si crevé, Arry, puis j’ai si mal au cul. Crois que j’ai des cloques…

#longdash##nbsp#Tu en auras bien davantage si tu te fais prendre, riposta-t-elle. Faut qu’on continue. Faut.

#longdash##nbsp#Mais y fait presque nuit, et on voit même pas la lune…

#longdash##nbsp#En selle.#nbsp#»

Tout en lambinant à une allure de promenade, Arya sentait son propre épuisement, pendant qu’autour d’eux s’estompaient les dernières lueurs du jour, peser lourdement sur elle. Autant que Tourte, elle avait besoin de dormir, mais ç’aurait été imprudent. S’ils s’abandonnaient au sommeil, ils pourraient bien ne rouvrir les yeux que pour se retrouver nez à nez avec Varshé Hèvre et Huppé le Louf et Loyal Urswyck et Rorge et Mordeur et septon Utt et toute leur clique de monstres.

Au bout d’un moment, néanmoins, le mouvement régulier du cheval se fit aussi lénifiant qu’un balancement de berceau, et elle eut conscience que ses paupières s’appesantissaient. Elle les laissa se clore, rien qu’une seconde, puis les rouvrit en s’écarquillant. Je ne peux pas m’assoupir, se chapitra-t-elle en silence, je ne peux pas, je ne peux pas. Elle se fourra un poing dans l’œil et frotta vigoureusement pour le maintenir ouvert, tout en serrant fermement les rênes et en poussant son cheval au petit galop. Mais ni lui ni elle n’étaient en mesure de soutenir ce train et, le temps à peine de quelques foulées, ils retombèrent au pas, et quelques pas de plus suffirent pour que les yeux d’Arya se ferment une seconde fois. Sans, cette fois, se rouvrir aussi prestement.

Lorsqu’ils le firent, Arya s’aperçut que son cheval s’était immobilisé et grignotait une touffe d’herbe, et que Gendry lui secouait le bras. «#nbsp#Tu t’es endormie, dit-il.