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LAMENTATION DES ROUGES

Ils n’y comprirent jamais rien aucun d’eux jamais jamais sur Terre par définition et presque jamais sur Mars elle-même comme elle était au début comme elle était avant que nous la changions
Comme le ciel devenait rouge à l’aube comment c’était de se réveiller sous le soleil la lumière en soi la roche sous la botte 0,38 g même dans nos rêves et dans nos espoirs pour nos enfants
Comme le chemin toujours se dégageait même dans le pire des chaos boiteux qu’apparaisse ou non un fil d’Ariane dans le moment périphérique perdu perdu et retrouvé continuer sur une chaussée dans le paysage bouleversé
Comme une si grande partie en devait être inférée à travers les combinaisons qui nous coupaient du monde tactile nous regardions pèlerins amoureux d’une lumière au loin sentant brûler notre feu intérieur notre corps pareil à tout un monde l’esprit palpitant dans un fil électrique de tungstène pensée dans le noir l’individu en tant que planète la surface de Mars l’intérieur de notre âme conscient chacun de chacun et tous du tout
Comme nous savions que le chemin avait changé et ne resterait jamais assez longtemps le même pour que nous le comprenions Comme l’endroit était là comme tu pensais à la pierre là
Comme tout ce que nous pensions savoir dans le ciel tombait en morceau et nous laissait debout dans le monde visible façonné par le vent soufflant vers l’horizon tu pouvais presque toucher un petit prince sur un petit monde cherchant
Comment les étoiles brillaient à midi sur les flancs des grands volcans crevant le ciel entrant dans l’espace nous marchions dans l’espace et sur le sable en même temps sachant que nous savions que nous n’étions pas chez nous comme
Nous avions toujours su que nous n’étions pas chez nous mais en visite sur cette planète la Terre le dalaï-lama l’a dit nous sommes ici pour un siècle tout au plus et pendant ce temps nous devons essayer de faire quelque chose de bien quelque chose d’utile
Comme le fit Bouddha avec nos vies comme sur Mars nous l’avons toujours su toujours vu sur le visage nu du sol sous nos pieds l’éperon et les formes ravinées de nos vies vierges de tout ornement roche rouge poussière rouge la matière minérale nue ici et maintenant et nous les animaux debout dessus

DEUX ANS

Nous étions frères en ce temps-là toi et moi Maman souvent au travail dix heures par jour Pas de crèche pas d’amis pas de famille Alors nous allions heureux et contents Au jardin du coin entouré de murs Où des nounous jamaïcaines nous regardaient jouer
Un œil sur leur rejeton abruties de chaleur Des enfants partout maman suivant sa fille Moi te suivant si prudent si propret
Des mains te rattrapaient sur la balançoire Déterminé tu montais sur le pont de singe Riais gargouillais à gorge déployée
Quand tu retrouvais la terre ferme et te tenais au bord Regardant l’étendue que tu avais traversée Plop sur l’herbe et premier déjeuner
Tu me taquines en mangeant et ris de plus belle Fais mine de refuser le jus de pomme Le repousse et ris en le voyant renversé
Et ris encore en voyant s’envoler un geai Vers l’allée crépusculaire des bouquinistes Retrouver les livres que tu as pris et abîmés
En les lançant par terre pour voir sourire les gens Jusqu’à ce que je t’arrête et que tu piques une colère Alors dans le sac à dos et c’est reparti
Ton front collé sur ma nuque vite à la maison Chauffer le lait de Maman au micro-ondes Quand tu te réveilleras avec une faim dévorante
J’aurai vérifié la chaleur d’un coup de langue Te prendrai au creux de mon bras Te regarderai téter jusqu’au dernier squick squick
Tu te rendors pendant que j’écris mon livre Et pendant une heure je suis sur Mars Ou à mon bureau perdu dans mes pensées