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Pycelle et Merryweather continuant plus que jamais à se chicaner sur l’identité plausible du nouveau Grand Septon, « Tel ou tel nous servira aussi bien que tel autre, intervint brusquement la reine, mais, quel que soit finalement l’attributaire de la couronne de cristal, son devoir sera de prononcer un anathème à l’encontre du Lutin ». Le Grand Septon défunt s’était montré remarquablement silencieux sur le chapitre de Tyrion. « Quant à ces moineaux roses, aussi longtemps qu’ils ne prêchent aucune félonie, c’est le problème de la Foi, pas le nôtre. »

Lord Orton et ser Harys murmurèrent en être d’accord. La tentative de Gyles Rosby pour abonder dans le même sens se désintégra dans des quintes de toux. Cersei se détourna, écœurée, pendant qu’il se convulsait pour crachouiller un glaviot sanguinolent. « Mestre, avez-vous apporté la lettre reçue du Val ?

— Oui, Votre Grâce. » Pycelle la cueillit dans son monceau de paperasses et la lissa soigneusement. « C’est une déclaration, plutôt qu’une lettre. Cosignée à Roche-aux-runes par Yohn Royce le Bronzé, par lady Vanbois, par les lords Veneur, Rougefort et Belmore, ainsi que par Symond Templeton, le Chevalier de Neufétoiles. Qui ont tous apposé leurs sceaux. Ils écrivent… »

Des tas de saletés. « Libre à messeigneurs d’en faire la lecture, s’ils le désirent. Royce et sa clique sont en train de masser des troupes au bas des Eyrié. Ils entendent démettre Littlefinger de ses fonctions de lord Protecteur du Val, et par la force si nécessaire. La question est : nous en laverons-nous les mains ?

— Est-ce que lord Baelish réclame notre aide ? demanda Harys Swyft.

— Pas jusqu’ici. A la vérité, cette affaire ne semble pas le troubler du tout. Il ne mentionne les rebelles que de manière très laconique dans sa dernière missive, avant de solliciter la faveur que je fasse envoyer par mer certaines des vieilles tapisseries de la collection de Robert. »

Ser Harys tripota sa barbichette mentonnière. « Et ces nobles signataires de la déclaration, est-ce qu’ils en appellent au roi, eux, pour qu’il leur donne un coup de main ?

— Ils n’en font rien.

— Dans ce cas… Peut-être n’avons-nous pas à nous mêler de quoi que ce soit.

— Il serait on ne peut plus tragique qu’une guerre éclate dans le Val, observa Pycelle.

— Une guerre ? » Orton Merryweather se mit à rire. « Lord Baelish est quelqu’un de très amusant, mais les guerres ne se livrent pas à coups de bons mots. Je doute qu’il y ait la moindre effusion de sang. Et puis nous importe-t-il vraiment de savoir qui administre la tutelle du petit lord Robert, pourvu que le Val s’acquitte de ses impôts ? »

Non, décida Cersei. Pour parler franc, Littlefinger s’était révélé d’un meilleur usage à la Cour. Il avait un don pour trouver de l’or, et il ne toussait jamais. « L’argumentation de lord Orton m’a persuadée. Mestre Pycelle, mandez à nos sires déclarants qu’il ne doit être fait aucun dommage à Petyr. A cette réserve près, la Couronne se fait un plaisir de ratifier par avance quelques dispositions qu’ils puissent prendre en ce qui concerne le gouvernement du Val jusqu’à la majorité de Robert Arryn.

— Parfait, Votre Grâce.

— Nous serait-il possible d’aborder le sujet de la flotte ? demanda Aurane Waters. Moins d’une douzaine de nos navires ont réchappé de la fournaise de la Néra. Il nous faut coûte que coûte reconstituer notre puissance maritime. »

Ser Harys Swyft acquiesça d’un hochement. « La puissance maritime est une chose des plus essentielles.

— Est-ce que nous pourrions employer les Fer-nés ? questionna Merryweather. L’ennemi de notre ennemi ? En quoi consisteraient les exigences du Trône de Grès pour prix d’une alliance avec nous ?

— Ils veulent le Nord, répondit le Grand Mestre Pycelle, seulement, le noble père de notre reine l’a déjà promis à la maison Bolton.

— Comme c’est ennuyeux…, fit Merryweather. Reste cependant que le Nord est vaste. Il ne serait pas difficile d’en démembrer le territoire. Et les conventions que l’on passerait n’ont pas besoin d’être permanentes. Je ne vois pas pourquoi Bolton refuserait d’y consentir, s’il se voit donner la garantie formelle que nous grossirions ses propres forces avec toutes les nôtres, une fois liquidé Stannis…

— J’avais entendu dire que Balon Greyjoy était mort, reprit Harys Swyft. Est-ce que nous savons qui gouverne les Iles à présent ? Lord Balon avait-il un fils ?

« Léo ? s’étouffa lord Gyles. Theo ?

— Theon. Lequel a été élevé à Winterfell, en qualité d’otage et pupille d’Eddard Stark, précisa Qyburn. Il n’y a pas d’apparence qu’il soit de nos amis.

— Le bruit courait qu’il avait été tué, dit Merryweather.

— Il était fils unique ? » Ser Harys Swyft tirailla les trois poils de sa barbichette. « Des frères. Il y avait des frères. N’est-ce pas qu’il y en avait ? »

Confrontée cette fois au mutisme de Qyburn, Varys l’aurait su, lui, s’irrita Cersei. « Je trouve hors de propos d’envisager que nous fassions couche commune avec cette minable bande d’encornets. Leur tour viendra, sitôt que nous en aurons fini avec Stannis. Ce qu’il faut avoir à tout prix, c’est une flotte qui nous appartienne en propre.

— Je serais quant à moi d’avis que nous construisions de nouveaux dromons, dit Aurane Waters. Dix, pour commencer.

— Et les fonds nécessaires, d’où les tirera-t-on ? » demanda Pycelle.

Lord Gyles prit cette question pour une invite à recommencer à tousser. Ce qui lui fit expectorer une bolée plus copieuse de glaires rosâtres qu’il se dépêcha de dissimuler dans son éternel carré de soie rouge. « Il n’y a pas de… », bafouilla-t-il néanmoins, jusqu’à ce que l’accès mange le reste de sa phrase. « … non… nous ne dispo… »

Ce ballot de Swyft honora pour une fois son patronyme d’assez de vivacité[1] d’esprit pour saisir ce que sous-entendaient les intervalles entre les quintes. « Les revenus de la Couronne n’ont jamais été plus magnifiques, lui opposa-t-il. Je tiens ce détail-là de ser Kevan en personne. »

Lord Gyles Rosby éructa par salves : « … dépenses… manteaux d’or… »

Ces objections-là, Cersei les lui avait déjà entendu exprimer. « Notre lord trésorier cherche à dire que nous avons trop de manteaux d’or et trop peu d’or. » La toux de Rosby finissait par lui taper sur les nerfs. Il aurait peut-être mieux valu prendre Garth la Brute, en définitive. « Tout considérables qu’ils sont, les revenus de la Couronne ne sauraient suffire à éponger les dettes de Robert. En conséquence, j’ai décidé de différer le remboursement des sommes dues à la Sainte Foi et à la Banque de Fer de Braavos jusqu’à la fin des hostilités. » Le nouveau Grand Septon s’en tordrait sans doute ses mains sacrées, et les Braaviens ne laisseraient pas que de la tanner de piaulements hystériques, et puis alors ? « Les sommes mises de côté seront employées à la construction de notre nouvelle flotte.

— Votre Grâce fait là preuve de prudence, abonda lord Merryweather. Cette mesure est la sagesse même. Et elle s’impose effectivement jusqu’à ce que la guerre soit terminée. J’y souscris de grand cœur.

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Swift veut dit rapide, en anglais. (N.d.T)