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« J’ai fini par comprendre qu’une vie de prière n’implique pas l’isolement, dit-elle. L’amour de Dieu est si vaste qu’il a besoin d’être partagé. »

 

« AU COMMENCEMENT de votre chemin, vous trouverez une porte avec une inscription, dit le maître. Revenez me dire quelle est cette phrase. »

Le disciple se livre corps et âme à sa quête. Et puis, un jour, il voit la porte, et il retourne consulter son maître.

« Au commencement du chemin, il était écrit : « ce n’est pas possible », lui annonce-t-il.

— Où était-ce écrit, sur un mur ou sur une porte ? demande le maître.

— Sur une porte.

— Eh bien, posez la main sur la poignée et ouvrez-la. »

Le disciple obéit. Comme l’inscription est peinte sur la porte, elle pivote en même temps qu’elle. Lorsque la porte est entièrement ouverte, le disciple ne parvient plus à distinguer la phrase  – et il avance.

 

LE MAITRE DIT :

« Fermez les yeux. Il n’est même pas nécessaire de fermer les yeux, il vous suffit d’imaginer la scène suivante : une bande d’oiseaux en vol. Bon, maintenant dites-moi, combien d’oiseaux voyez-vous : cinq ? onze ? dix-sept ?

« Quelle que soit la réponse  – et il est toujours difficile de donner le nombre exact  –, une chose est évidente dans cette petite expérience. Vous pouvez imaginer une bande d’oiseaux, mais leur nombre échappe à votre contrôle. Pourtant, la scène était claire, définie, précise. Quelque part se trouve la réponse à cette question.

« Qui a déterminé le nombre d’oiseaux devant apparaître dans la scène imaginée ? Ce n’est pas vous. »

 

UN HOMME DECIDA de rendre visite à un ermite qui vivait non loin du monastère de Sceta. Après avoir marché interminablement dans le désert, il le trouva enfin.

«J’ai besoin de savoir quel est le premier pas que l’on doit faire sur la voie de la spiritualité », lui dit-il.

L’ermite l’entraîna vers un puits et le pria d’y contempler son reflet. L’homme obéit, mais l’ermite se mit à jeter des cailloux dans l’eau, dont la surface trembla.

« Je ne pourrai pas voir mon visage tant que vous jetterez des cailloux, remarqua l’homme.

— De même qu’il est impossible à un homme de voir son visage dans des eaux troubles, il lui est impossible de chercher Dieu si sa quête rend son esprit anxieux, dit le moine. Voilà le premier pas. »

 

IL Y EUT une époque où le voyageur pratiquait la méditation bouddhiste zen. A un certain moment de la séance, le maître allait chercher dans un coin du dojo (l’endroit où les disciples se réunissaient) une baguette de bambou. Ceux des élèves qui n’avaient pas réussi à se concentrer levaient la main. Le maître s’approchait d’eux et leur donnait à chacun trois coups sur l’épaule.

La première fois qu’il assista à cette scène, le voyageur la trouva absurde et digne du Moyen Age. Plus tard, il comprit que, très souvent, il est nécessaire de déplacer sur le plan physique la douleur spirituelle afin de percevoir le mal qu’elle cause. Sur le chemin de Saint-Jacques, il avait appris un exercice qui consistait à enfoncer l’ongle de son index dans son pouce chaque fois qu’une pensée lui faisait du mal.

On perçoit toujours trop tard les terribles conséquences des pensées négatives. Cependant, si nous faisons en sorte que ces pensées se manifestent sous la forme d’une douleur physique, nous comprenons mieux le mal qu’elles nous causent. Alors nous parvenons à les éviter.

 

UN PATIENT âgé de trente-deux ans alla consulter le thérapeute Richard Crowley :

« Je ne peux pas arrêter de sucer mon pouce, se plaignit-il.

— Ne vous inquiétez pas, lui répondit Crowley. Simplement, sucez un doigt différent chaque jour de la semaine. »

Le patient s’efforça de suivre ce conseil. Chaque fois qu’il portait la main à sa bouche, il devait choisir consciemment le doigt qui, ce jour-là, ferait l’objet de son attention. Avant que la semaine ne fût terminée, il était guéri.

« Lorsqu’un vice devient une habitude, il est difficile de le combattre, dit Richard Crowley. Mais quand il commence à exiger de nous des attitudes nouvelles, des décisions, des choix, alors nous prenons conscience du fait qu’il ne mérite pas autant d’efforts. »

 

DANS LA ROME ANTIQUE, un groupe de magiciennes connues sous le nom de sibylles rédigea neuf livres qui racontaient l’avenir de Rome. Puis elles les apportèrent à Tibère.

« Combien coûtent-ils ? demanda l’empereur.

— Cent pièces d’or », répondirent-elles.

Indigné, Tibère les chassa.

Les sibylles brûlèrent trois livres et revinrent trouver l’empereur.

« Ils coûtent toujours cent pièces d’or », lui dirent-elles.

Tibère refusa leur offre en riant : pourquoi payerait-il le prix de neuf livres pour six ?

Les sibylles brûlèrent trois autres livres et revinrent voir Tibère avec les trois derniers. « Le prix est toujours de cent pièces d’or. »

Piqué par la curiosité, Tibère se résigna à payer, mais il ne pouvait plus lire qu’une petite partie de l’avenir de son empire.

Le maître dit :

« Ne pas marchander lorsque l’occasion se présente, cela fait partie de l’art de vivre. »

 

CES MOTS sont de Rufus Jones :

« Construire de nouvelles tours de Babel sous prétexte que je dois arriver jusqu’à Dieu ne m’intéresse pas. Ces tours sont abominables. Certaines sont faites de ciment et de briques, d’autres de piles de textes sacrés. Certaines ont été bâties sur de vieux rituels, et beaucoup sont érigées sur les nouvelles preuves scientifiques de l’existence de Dieu.

«Toutes ces tours, qu’il nous faut escalader depuis leur base sombre et solitaire, peuvent nous donner une vision de la terre, mais elles ne nous conduisent pas au ciel.

« Tout cela pour parvenir encore et toujours à cette vieille confusion des langues et des émotions !

« Les ponts qui mènent à Dieu sont la foi, l’amour, la joie et la prière. »

 

DEUX RABBINS, dans l’Allemagne nazie, font tout leur possible pour apporter aux juifs un peu de réconfort spirituel. Pendant deux ans, bien que mourant de peur, ils parviennent à tromper leurs persécuteurs et célèbrent des offices religieux dans plusieurs communautés.

Finalement, les rabbins sont arrêtés. Terrifié à l’idée du danger qui le menace, le premier ne cesse de prier. L’autre, au contraire, passe ses journées à dormir.

« Pourquoi agissez-vous ainsi ? lui demande le rabbin rempli de crainte.

— Pour ménager mes forces. Je sais que dorénavant je vais en avoir besoin.

— Mais n’avez-vous pas peur ? Ne savez-vous pas ce qui nous guette ?

— J’ai eu peur jusqu’au moment de notre arrestation. Maintenant que je suis prisonnier, à quoi bon redouter ce qui est déjà passé ? Le temps de la peur est terminé ; à présent commence le temps de l’espoir. »

 

LE MAITRE DIT :

«Volonté. Voilà un mot dont on devrait se méfier pendant quelque temps. Quelles sont les choses que nous ne faisons pas parce que nous n’en avons pas la volonté, et quelles sont celles que nous ne faisons pas parce qu’elles comportent un risque ?