Выбрать главу

Une fois on the bed, j’opère la fabioulouse véry well séance pour dame désespérée. Celle qui comprend la respiration sous-cutanée, l’hydroglisseur à ogive chercheuse, le compresseur moustachu, la lune de miel, l’ours mal léché, le potentat variable, le complément d’information, le médius musardeur, l’emporte-pièce, le coolie déballé, la pieuvre en folie et le déménageur folâtre.

Elle égosille tellement que je suis obligé de lui mettre également la main sur la bouche pour amortir son deuxième scandale en puissance. Je déplore de n’avoir pas un transistor à portée, vu que Couderc commentant le Tournoi des Cinq Nations, ou bien Johny interprétant I love the love, my love seraient extrêmement opportuns dans notre jolie conjoincture.

Ce qui frappe, chez Mme X…, c’est cette volonté d’assumer sa déchéance.

Elle brame : « Oui, ouiiiiiii, perds-moi ! Perds-moi toute ! Encore, je veux la honte complète ! Plus fort ! Perds-moi bien… »

Soit dit entre nous et le kiosque à journaux du coin de ma rue, je fais tout sauf la perdre. Ou alors c’est de quelques centimètres chaque fois, et pour d’infimes fractions de seconde. Je la trouve, au contraire. Je la trouve à mon goût. Je la trouve de première bourre en amour. Du nanan ! Du nectar ! Extase ! Encore ! Oh ! la belle bleue ! Label de qualité supérieure. Mise en bouteille au château ! Garantie totale, pièces de recharge et manœuvre ! Devine qui est là ! Ce qu’il y a d’excitatoire, ce sont ses larmes. Elle continue de chialer, en plein panard, lady Madame. Elle se tortille en hoquetant. Elle enrogne du prose mais parle la bouche pleine de sanglots.

Une vraie nymphomane ! J’ai pigé : dès qu’elle mate un julot elle lui saute au culbuteur. C’est le grand dérèglement sensoriel. L’hystérie caractérisée. Elle est branchée sur l’alternatif. La toute haute tension, Mâme X… Tu penses que c’était couru, dans sa position, qu’un malin lui tire des photos-mateur. Les trente-six poses à l’instantané, si je peux exprimer ?

Je la finis à l’arrachée.

Elle reste crucifiée sur son page. Haletante. Pleurarde.

Moi je vais refaire une beauté à Coquette dans la salle de bains.

Si je m’attendais à un truc pareil. Une dame de la High !

Au moment où je retraverse sa turne, elle m’agrippe.

— Je devine que ce qui vient de se passer contribue à vous donner une fausse idée de moi, me souffle-t-elle en pleine poire, d’un ton qui lézarderait un cœur de bronze.

Penses-tu, dearlinge !

— Voyons, mais non, piteuse le San-A., avec autant d’énergie qu’en déploie une malheureuse ménagère à retenir à dîner ses cousins de Pontamousson lorsqu’il ne subsiste plus qu’un reste de gratin de macaroni dans le garde-bouffe.

— Mais si, je le sens bien. Qu’importe. En me donnant à vous, monsieur le commissaire, je me sens plus forte pour supporter le mépris de mon mari, puisque maintenant je le mérite !

Je lui prends le congé d’une ultime galoche.

Elle me chuchote :

— Tu fais mieux l’amour que lui, bandit !

Fort de ce certificat de belle vis et mœurs, je me taille. Trois fantômes hagards assistent à mon déboulé.

Immobiles dans le salon, Béru et le couple de domestiques guettent ma sortie, comme on regardait sortir de leur capsule les astronautes revenant de la Lune, à l’époque où cet exploit intéressait encore l’opinion.

Je leur souris, gêné.

Le trio continue de pétrifier en chœur.

San-Antonio se ramone la gorge pour se mettre un peu de printemps dans l’intonation.

— Eh bien, nous allons nous retirer, fait-il en évitant les six yeux qui le lardent.

La dame Germaine murmure :

— C’est tout ce que vous aviez de besoin ?

— Pour l’instant, oui !

Bien sûr, Bérurier résume l’opinion générale en trois mots savamment agencés.

— Ben, ma vache ! dit-il.

Après quoi nous repartons.

* * *

Comme je remise ma tire dans la cour de la Casa Poulardin, j’avise Pinaud qui se pointe sur le perron, beau comme un garçon d’honneur. Il a un appareil photographique sur le baquet, en guise de cloche à vache.

— Attendez, les Artistes Associés, nous lance-t-il, ne bougez plus : j’en prends une !

D’instinct, Béru et moi nous nous immobilisons. Magie éternelle de l’objectif. Tu braques un Kodak, illico tout le monde rectifie la position, adopte une attitude favorable, se met en état de photo. Les gros se mordent les joues pour avoir l’air moins gros et rentrent leur bonbonne ; les maigres s’élargissent la cage à cerceaux. Les déplumés se rabattent les derniers tifs sur leur chemin de ronde à mouches ; les gonzesses se lissent les plumes. Bref, c’est la préparade éclair.

Cliiic ! fait la Vieillasse, d’un index tellement flageolant qu’on va sûrement ressembler à deux taches de cambouis sur un voile de communiante.

On s’attend à ce qu’il achève de dévaler le perron, mais au lieu, il exécute un demi-tour rapide et disparaît dans les intérieurs de la Pébroque’s Agency.

— Qu’est-ce y lui prend ? s’étonne le Mammouth.

— Mystère pinultien…

Le chef planton, le brigadier Poilala, un Corsico dont le front serait entièrement caché par le ruban de ma machine à écrire, tellement qu’il a le tif bas et le sourcil haut, me bondit sur le colback.

— Monsieur le directeur vous réclame, monsieur le commissaire !

Je jette sur Béru ce regard nostalgique qu’à pour un vieux numéro de Jours de France le gars qui attendait son tour dans le salon de son dentiste, lorsque, précisément, son tour vient de faire comme le jour de gloire (tiens, je suis ampoulé du style, aujourd’hui).

Voyez savons, savonnettes en tout genre.

Je me rends à la convocation expresse.

Par les voies du même métal.

* * *

La première fois que je lui trouve les doigts sales, au Vieux.

Lui, l’immaculé de frais !

Il a la frime tellement alourdie par les préoccupations que sa tête semble avoir perdu de sa hauteur au bénéfice de la largeur.

— Vous m’avez demandé, monsieur le…

Il pousse dans ma direction du papier luisant d’impression fraîche. Ce sont des épreuves de journal. Elles dégoulinent. Ça possède un aspect mort-né, des épreuves fraîches…

— J’ai là le prochain numéro du Popotin, San-Antonio.

Je lis un titre plus ou moins bien venu :

« Les X… »

C’est le divorce !

Une photo mal déchiffrable montre la chère Mme X… a loilpé avec un minet.

On raconte dans l’article que X… a rencontré « Bavassol » le célèbre avocat mondain et qu’il l’aurait chargé d’introduire une instance en divorce. On précise que les époux sont désormais séparés et que l’épouse frivole a été exilée dans la campagne que le couple possède près de Rambouillet.

Ayant lu, je hausse les épaules.

— Il fallait s’y attendre, patron. Ce pauvre bonhomme n’a pas d’autre solution pour protéger sa carrière. Il va divorcer en un temps record et épouser prochainement une pure jeune fille qui mettra sa couronne de fleurs d’oranger autour de ses cornes pour les rendre plus gaies.