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— Et ma fille ?

— Nous allons la mettre en lieu sûr… Jusqu’à ce que vous honoriez votre contrat. Lorsque la menace sera éteinte, nous vous la rendrons. Ne vous inquiétez pas, nous la traiterons avec tous les égards du monde… Nous ne sommes pas des monstres !

*

— Pourquoi on rentre pas ? s’étonna Marianne.

— On attend un coup de fil, expliqua le capitaine.

Il avait garé la Laguna dans un renfoncement, à cent cinquante mètres de l’entrée de la propriété.

— Je savais qu’il se passait un truc pas normal ! s’écria Marianne. C’est Franck, c’est ça ? Il lui est arrivé quelque chose ?

— Du calme, princesse. Je ne sais même pas où il est. T’inquiète !

Elle baissa la vitre, alluma une cigarette.

— Tu veux que j’aille voir s’il y a quelqu’un dans la maison ? proposa-t-elle soudain.

Laurent lui retourna un sourire un peu moqueur.

— Tu crois que j’ai besoin de toi pour ça ?

— Je serais bien plus efficace que toi ! Je suis plus agile… Plus discrète, aussi ! Toi, on t’entend arriver à des kilomètres ! On dirait un troupeau de buffles quand tu descends l’escalier…

Philippe se mit à rire malgré l’angoisse.

— Écoutez-la, celle-la ! rétorqua Laurent. Tu veux entrer dans la police, peut-être ? Prendre ma place !

— Plutôt mourir que d’entrer chez les poulets.

— Ça tombe bien, vu l’épaisseur de ton casier !

— Franck ! s’écria-t-elle.

Elle venait de repérer la 307 qui arrivait juste en face.

— Fonce ! ordonna Philippe.

— Il ne m’a pas appelé… Vaut peut-être mieux qu’on…

— On s’en fout, vas-y ! renchérit Marianne.

Ils entrèrent alors que le portail commençait à se refermer. Ils trouvèrent Franck dans le salon, effondré sur une chaise.

— Ça va ? s’inquiéta Laurent.

Rien qu’à voir son visage, ils devinèrent la réponse. On aurait dit qu’il avait pleuré. Qu’il n’était pas ravi de les voir.

— Qu’est-ce qui se passe ? interrogea Philippe.

Franck ne trouvait pas les mots. Il avait songé à cette confrontation pendant tout le trajet. Avec ce qui lui restait de forces. Il avait décidé de mentir à Marianne. De ne pas lui révéler quel sort l’attendait. C’était tellement inutile, tellement cruel. Mais il avait pensé avoir le temps. Rentrer en premier, réfléchir calmement et les appeler pour qu’ils rentrent à leur tour alors que son mensonge était prêt. Là, un peu pris de court, il n’avait pas eu le temps d’échafauder son scénario.

— C’est rien, dit-il.

Merdique, comme réponse !

— Rien ? s’exclama Laurent. Tu te fous de moi ? T’as vu ta gueule ?

Putain, Franck ! Trouve une explication bidon, n’importe quoi. Et vite !

— Ils… Ils ont un problème avec l’argent… Ils sont en retard.

Il évitait de regarder Marianne. Tandis qu’elle le dévisageait sans relâche. Et soudain, elle fut frappée par l’évidence.

— Ils t’ont demandé de me tuer, c’est ça ? murmura-t-elle.

Le cœur de Franck s’affola.

— Non ! Bien sûr que non !

Il y avait mis toutes ses forces, pourtant.

— Si ! dit-elle d’une voix tremblante. C’est ça… Ils t’ont demandé de me tuer… Regarde-moi !

— Marianne, arrête…

— Regarde-moi ! rugit-elle.

Les émeraudes se plièrent aux ordres. Elle y lut tant de souffrance qu’elle vacilla.

— Inutile de me mentir, Franck. Ils t’ont demandé de me tuer. Je le sais.

— Marianne, je… Je te jure que… que je vais trouver une solution…

— Les enfoirés ! vociféra Laurent.

— Que s’est-il passé, exactement ? demanda Philippe.

Il avait envie de tout leur raconter. Mais alors, Marianne perdrait tout espoir.

— Ils ont peur qu’elle se fasse arrêter, même plus tard… Et qu’elle aille tout raconter.

— Et toi, comment t’as réagi ?

— J’ai refusé, bien sûr…

Marianne leur tournait le dos, appuyée à la fenêtre. Sa vue commençait à se brouiller. Même si ce j’ai refusé, bien sûr, lui avait filé un drôle de pincement au ventre.

— Et alors ? Il t’a menacé ? poursuivit Philippe.

— Oui, avoua Franck. Mais je tiendrai bon…

Marianne fit volte-face.

— Ils t’ont menacé de quoi ? demanda-t-elle sèchement.

— De ruiner ma carrière. Mais ce n’est pas grave… Je… Je…

Il avait tant de mal. Et Marianne semblait lire à l’intérieur de lui, c’était intolérable.

— On va trouver une solution, ajouta-t-il. Je voudrais que tu nous laisses, Marianne… Que tu remontes dans ta chambre.

— T’es en train de parler de ma mort et tu veux que je remonte dans ma chambre, comme si j’étais une gamine ? Tu comptes te débarrasser de moi aussi facilement ?!

Elle avait les poings serrés. Les lèvres tremblantes. Le souffle court.

— Marianne, je t’assure que ça n’arrivera pas…

Il fit quelques pas. Elle fonça droit sur lui, l’empoigna par les épaules.

— Arrête de mentir ! Ils t’ont menacé de bien pire que ça ! T’es mort de trouille, Franck ! J’ai toujours su voir la peur sur le visage des gens…

Il la repoussa, un peu brutalement. Essaya de s’éloigner. Mais elle refusait de le laisser réfléchir. De lui laisser le temps de fabriquer un joli mensonge.

— Tu vas me dire la vérité, Franck ! C’est de ma vie qu’il s’agit, putain ! J’ai le droit de savoir !

Elle l’agrippa à nouveau.

— Tu vas me tuer, Franck ?

Il tenta d’articuler un non qui resta coincé au fond de sa gorge.

— Tu vas me tuer ? répéta-t-elle. Ils ont trouvé une solution pour t’y obliger, pas vrai ?

— Mais non ! prétendit-il enfin.

Elle le secoua violemment.

— Arrête de me mentir !

Cette fois, il l’envoya valdinguer contre le mur. Trouva appui sur le rebord de la fenêtre. Elle continua à le harceler, de loin. Avec des sanglots dans la voix.

— Et tu comptes me tuer quand ? Ce soir ? Demain ?… Quand est-ce que je vais mourir ? Combien d’heures il me reste ? Combien de temps, Franck ?

Philippe se leva à son tour, un peu sonné.

— Franck… Dis-moi qu’on ne va pas faire ça…

Brusquement, ils devinèrent qu’il pleurait. Marianne comprit alors que tout était fini. Elle se laissa choir sur le canapé, ses jambes lui faisant soudain défaut.

— Ça sert à rien de me mentir, reprit-elle d’une voix faible. Ça m’effraie encore plus, tu sais… Je voudrais au moins que tu sois honnête avec moi… Que tu aies le courage de me dire ce qui m’attend.

Franck la regarda avec désespoir. Elle avait raison. Il lui devait au moins ça.

— Ils nous ont trompés depuis le début. Ils n’ont jamais eu l’intention de te rendre ta liberté… Et nous avons tué… trois innocents.

Philippe et Laurent encaissaient, coup après coup. Marianne semblait déjà morte. Franck continua de les assassiner. Il raconta. Les lettres, le film. Pourquoi ils exigeaient de voir mourir Marianne. Et comment.

Philippe fut obligé de se rasseoir. Pour ne pas tomber de trop haut. Laurent s’était figé dans une raideur stupéfiante. Franck leur redonna espoir un court instant, en évoquant les copies. Copies qu’il avait été contraint de rendre. Il parla enfin de Laurine, se remit à pleurer. Ils l’auraient torturée si…

— Maintenant, ils ont toutes les preuves… Et…