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Ils obéirent. Sauf Felipe. Un des Mayo lui retira son pistolet, et le jeta dans la voiture de police.

— Nous n’avons pas besoin de tout le monde, dit méchamment Mayo.

Le chauffeur de taxi ouvrait des yeux stupéfaits. Il n’eut pas le temps de réfléchir beaucoup. Mayo II passa derrière lui et frappa de toutes ses forces, avec la crosse du pistolet. On entendit craquer les os. L’homme tomba comme une masse. Se retournant, Mayo frappa Philipps de la même façon. Quand il fut à terre, il lui envoya un coup de pied en plein visage.

Tous ses muscles bandés, Clarke se préparait à bondir. Un des Mayo sourit cruellement et arma le chien de son pistolet :

— Allez, viens, ordure ! Ça épargnera de te transporter.

Clarke cracha par terre.

— Vous ne gagnerez pas, dit-il. Dans une heure, vous aurez derrière vous toute l’armée et toute la police des Etats-Unis. Ils vous rattraperont, même s’ils doivent faire le tour du monde.

— Nous aurons eu le temps de nous venger, dit une petite voix grinçante derrière l’Américain. Mais vous ne serez plus de ce monde pour le voir.

Yoschico Tacata, sans qu’on le remarque, était sorti de la voiture de police. Frileusement engoncé dans un pardessus, il paraissait encore plus ratatiné et plus petit. Son visage jaune était gris de fatigue. Mais ses minuscules yeux noirs brillaient méchamment.

Il sautilla autour du groupe et vint devant Malko.

— Vous avez détruit tout mon travail, grinça-t-il. Mais il me reste encore le beau cadeau que vos amis américains ont eu la stupidité de me faire. Il ricana. Et que je vais leur rendre, mon cher… Grâce à vous !

Malko avait mal au front à hurler, mais il eut la force de dire :

— Vous n’allez quand même pas tuer des milliers de personnes, comme cela, sans motif !

— Sans motif ! La voix du Japonais s’étrangla.

— J’ai un motif, le plus noble qui soit : la vengeance. Est-ce que vos aviateurs ont eu pitié de mes frères, il y a vingt ans, à Hiroshima ? Vous pensiez que vous seriez les plus forts, que le Japon n’existait plus. Eh bien, il existe, monsieur ! Les Américains vont s’en apercevoir. D’ailleurs, assez parlé, nous perdons du temps.

Sans mot dire, il remonta dans la voiture de police. À ce moment un bruit de moteur fit tourner la tête à Malko. Un camion arrivait.

C’était leur dernière chance. Au moment où le camion arrivait à la hauteur du groupe, Malko hurla en espagnol :

— Au secours, aidez-nous ! Ce sont des bandits.

Les Mayo éclatèrent de rire et firent au camionneur un signal joyeux. Malko se tut. C’était vrai. Quel spectacle plus rassurant, que deux policiers en uniforme interrogeant des contrebandiers ?…

Quand le camion se fut éloigné, l’un des Mayo alla prendre dans la voiture de police une bouteille de whisky. Il la déboucha et entreprit d’en arroser Malko, Felipe et Clarke. La bouteille vide, il la jeta.

— Et voilà trois beaux ivrognes ! ricana-t-il. Profitez en bien, c’est la dernière cuite que vous prenez.

Il prit Felipe et le traîna dans la voiture de Police, après lui avoir redonné un coup sur la nuque. Il l’allongea sur la banquette.

— À toi, salaud, dit-il à Malko.

L’Autrichien ne put éviter le canon du pistolet. Une douleur fulgurante lui traversa le crâne et il tomba.

Trois minutes plus tard, la voiture de police démarrait. Le chauffeur de taxi et Philipps, assommés, étaient restés dans le coffre de la Ford.

Malko, Felipe et Clarke gisaient sur la banquette arrière. Tacata, allongé par terre, se trouvait complètement caché par eux. La cravate défaite, on aurait dit trois joyeux ivrognes après une nuit de bringue. À cinq mètres, on reniflait l’odeur du whisky.

— Voilà la frontière, annonça le Mayo qui conduisait.

— Mets en route la sirène, dit son frère.

La barrière était baissée. Un factionnaire mexicain regardait venir la voiture de police. De l’autre côté, à deux cents mètres, on voyait le poste américain, avec la bannière étoilée.

Chapitre XIV

La casquette rejetée en arrière et le colt lui battant la cuisse, Chico Mayo descendit de la voiture de police. Le douanier mexicain le salua d’un geste mou.

— Il y a quelqu’un là-dedans ? demanda Mayo.

L’autre fit un geste du pouce vers l’intérieur.

Mayo entra et cligna des yeux dans la pénombre. Un sous-officier lisait, les pieds sur la table. Il sourit en voyant le policier.

— Oiga hombre ! Vous êtes bien matinal ! Qu’y a-t-il pour votre service ?

Mayo se frotta le menton.

— Un petit problème. J’ai ramassé trois gringos ivres morts. Ça m’ennuie de les mettre en prison, à cause du tourisme. Alors je me suis dit que je pourrai peut-être aller les déposer au poste américain. Ils en feront ce qu’ils voudront. Evidemment, ce n’est pas très légal, de faire passer une voiture de la Policia Federale dans la zone franche…

Le sous-officier eut un geste large, balayant l’objection.

— Aucune importance, hombre. La Policia Federale est toujours la bienvenue. Au retour, venez boire le café.

Mayo remercia. Le sous-officier hurla :

— Diego, ouvre la barrière pour le señor de la Policia.

— Vous ne voulez pas voir mes gringos ? proposa Mayo.

— Merci. J’ai trop vu d’ivrognes dans ma vie. C’est toujours la même chose.

Mayo sortit et monta calmement dans sa voiture. Si les gens du poste d’en face l’observaient, ils n’auraient que le spectacle banal d’une voiture de police en patrouille. Le plus dur restait à faire…

Il y avait deux cents mètres entre les deux postes. La voiture les parcourut lentement. En approchant, Mayo eut un petit choc au cœur. Devant la barrière de bois, il y avait une herse métallique. Une voiture de la Highway Palrol était arrêtée contre le bâtiment de bois.

Mayo donna un petit coup de sirène et vint se ranger contre la voiture de police américaine, à côté de la herse. Une chance sur un million qu’ils puissent passer sans encombre… Caché sous ses couvertures, Yoschico Tacata arma tout doucement sa mitraillette.

Un grand type sortit de la baraque, l’air renfrogné. En voyant la voiture de police, il se dérida et vint s’accouder à la glace de Mayo.

— Salut. Qu’est-ce qui se passe ? Vous cherchez les trois types qui veulent passer la frontière ?

Mayo sentit un frisson désagréable glisser dans son dos.

— Quels types ? demanda-t-il.

L’autre haussa les épaules.

— Je ne sais pas. J’ai leur signalement. Il y a un Japonais et deux autres types, des Mexicains. On a ordre de tirer sur eux à vue et de les arrêter par tous les moyens. Tous les postes frontières sont fermés. Ça doit être une drôle d’histoire, car c’est le F.B.I. qui a pris l’affaire en main.

Mayo se força pour sourire.

— Je voudrais bien vous les amener. Mais ce que j’ai à vous offrir vous amusera moins. Nous avons ramassé trois ivrognes qui faisaient du chahut à la Cantina de Perdido. La prison est pleine et ils ont l’air d’être des caballeros. Alors, je vous les ai amenés. Regardez.

L’Américain ouvrit la portière arrière et se pencha sur Clarke. Il se releva avec une grimace de dégoût.

— Ce n’est pas possible. Ils ont pris un bain de whisky !

— Ça m’en a tout l’air, souligna Mayo. Et je voudrais bien m’en débarrasser. Si je pouvais les amener à la prison d’El Centro, je n’aurais même pas à en parler dans mon rapport.

L’autre cligna de l’œil.

— Pas besoin.