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Il se tourna vers la voiture de police :

— Hé, Sergent, venez voir.

Le type au volant se déplia lentement et sortit. Une armoire à glace avec du bide… Comme la police californienne les aime. Il toisa Mayo avec mépris. Visiblement, il n’aimait pas les Mexicains.

— Qu’est-ce qu’il y a ?

— Votre collègue a des colis pour vous. Des Américains qui ont un peu abusé de la tequila…

Le sergent s’approcha et renifla.

— Ouais ? Et alors ?

— Faudrait les prendre dans votre voiture.

— Je n’en veux pas, moi. Ils vont me salir mes coussins. Il n’y a qu’à les balancer par terre.

Mayo sentit qu’il fallait intervenir. Il s’adressa au sous-officier.

— Je ne voudrais pas rester trop longtemps ici. C’est pas très légal, vous savez.

— O.K., fit le sergent. On va vous débarrasser de vos colis. Hé, fit-il à l’intention des deux flics, venez nous donner un coup de main.

Mayo attendait, la main sur sa crosse. Il avait échangé un regard avec son frère. Il entendait des bribes de conversation sortir de la radio de police. Il fallait à tout prix les empêcher de donner l’alerte immédiatement. D’un air dégagé, il s’approcha de la voiture de la Highway Patrol et s’accouda à la vitre.

— Vous venez nous aider ? demanda-t-il au flic, qui écoutait la radio en se faisant les ongles.

Sans enthousiasme, le flic ouvrit sa portière et sortit. Il était encore plus gros que l’autre.

Mayo calcula rapidement : les deux flics, le sous-off, et peut-être un ou deux à l’intérieur.

Il laissa le gros flic passer devant lui. Puis il tira son pistolet et visa, en plein dans les reins. Au moment où il appuyait sur la détente, le premier flic le vit. C’était trop tard ; le second frère Mayo venait de tirer à son tour. Les deux mains au ventre, le sergent s’effondra lentement, perdant sa casquette. Le second s’arrêta, comme foudroyé, tenta de saisir son arme et roula par terre.

— Hé ! cria le sous-officier, vous êtes…

Les deux armes crachèrent en même temps. Des taches de sang apparurent sur sa chemise ; il balbutia et s’effondra dans la poussière déjà chaude. Le soleil se levait.

Un homme surgit sur le seuil, vêtu d’un pantalon et d’un gilet de corps. Il avait une mitraillette à la main, mais n’eut pas le temps de s’en servir. Yoschico Tacata avait surgi, comme un diable de sa boîte, et balayé la façade d’une longue rafale. Le nouveau venu tomba, presque coupé en deux. À l’intérieur, il y eut un remue-ménage et des cris.

— Filons ! cria Mayo.

Tacata sautillait autour des corps, en brandissant sa mitraillette vide. Il donna un grand coup de pied au sergent étendu, qui tressaillit.

Mayo II se précipita sur la voiture des Américains. Il tira deux coups à l’intérieur, pulvérisant la radio. Puis il souleva le capot et arracha les fils du Delco.

Son frère et Tacata étaient déjà remontés dans leur voiture. Le Japonais surveillait la porte.

— Dépêchez-vous, cria-t-il.

Une voiture arrivait du Mexique. Dans trois minutes, elle serait là et ses occupants verraient les cadavres…

Mayo I se glissa sous le volant et démarra. Dans un nuage de poussière, la voiture de la Policia Federale passa devant le garage de Bill Nordby, qui n’en crut pas ses yeux. Jamais on n’avait vu une voiture de la police mexicaine s’aventurer en territoire américain.

La route 99 était déserte. Yoschico Tacata, qui avait repris place à l’avant, dit :

— Allons jusqu’à El Centro. Il faut reprendre la 80, pour San Diego et la côte. Mayo II grommela :

— Dans cinq minutes, nous allons avoir tous les flics aux trousses. Sans compter les hélicoptères et les avions… Il faut avant tout se débarrasser de cette voiture.

— Nous en trouverons une autre à El Centro,

dit Tacata. C’est une grande ville.

— Et les trois gringos ? demanda Mayo. Qu’est ce qu’on en fait ?

Le Japonais sourit méchamment :

— Nous allons en garder deux. Ils ne sont pas gênants et ils peuvent nous servir. Quant à l’honorable Monsieur de la C.I.A., je vais m’occuper de lui tout de suite.

Le Japonais tira de dessous le siège une serviette qu’il ouvrit. Il y prit une longue aiguille, qui se terminait par un petit manche de bois. Puis, il plongea la pointe de l’aiguille dans un petit flacon.

— L’honorable espion va beaucoup souffrir pendant quelques minutes, grinça le petit Japonais.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda Mayo II.

— Un mélange à moi. Même si un médecin commençait immédiatement à le soigner, il ne parviendrait pas à le sauver.

Les yeux ouverts, les trois hommes regardaient le Japonais brandir sa seringue improvisée. Une horreur froide s’insinua en Malko. Il n’avait pas peur de la mort, mais la maladie le terrorisait. Il aurait voulu dire quelque chose, mais sa langue était trop sèche…

Clarke balbutia :

— Vous êtes fou…

La voiture roulait toujours à bonne allure, en plein désert. Mayo ralentit légèrement. Tacata se pencha vers l’arrière, son aiguille à la main :

— Sayonara, monsieur S.A.S., dit-il doucement. Non seulement vous allez mourir, mais vous n’avez pas rempli votre mission. Au fond, je vous rends service, en vous offrant une fin honorable.

Le Japonais tendit le bras. L’aiguille était à cinq centimètres de la main de Malko. Il se raidit désespérément, chercha à s’enfoncer dans la banquette. A côté de lui, Felipe gémit « Doux Jésus ! »

Et il bondit comme un ressort. Il avait réussi à se délier, Dieu sait comment. Ignorant le Japonais, il saisit le volant à deux mains par-dessus l’épaule de Mayo. Il avait une force colossale et, en dépit des efforts de Mayo, la voiture commença à zigzaguer à travers la route.

Tacata poussa un hurlement de rage et enfonça l’aiguille dans le poignet de Felipe. Sous la violence du choc, l’aiguille se cassa. Le Mexicain eut un gémissement étouffé et balaya la tête du Japonais, d’une terrible manchette. Puis il reprit le volant et dirigea la voiture droit sur le bas-côté.

— Tue-le ! hurla Mayo I.

Son frère tira au jugé. Mais Clarke avait dévié son bras. La balle s’enfonça dans le plafond. L’âcre odeur de la cordite remplissait la voiture.

Felipe était devenu gris cendre : le poison du Japonais commençait à faire son effet. Mais il tenait bon le volant. Un arbre approchait à une vitesse terrifiante. Voyant qu’il ne pouvait l’éviter, Mayo se décida à freiner, mais il était trop tard. Au moment où le capot allait heurter le bois, Felipe tourna la tête vers Malko et murmura :

— Adios, señor SAS. Vaya con Dios et priez pour moi.

La lourde voiture glissa le long du tronc et rebondit sur la route, où elle se renversa, dans un fracas de tôle écrasée. Puis elle roula encore deux fois sur elle-même, portières ouvertes. Une énorme flamme jaillit et enveloppa tout le véhicule. Coincé dans les tôles déchirées, Malko sentit avec horreur l’odeur du caoutchouc brûlé. Il allait griller vif. Il s’évanouit.

Depuis dix-sept ans, Joe Pasternak était chauffeur de la Compagnie Greyhound. Deux fois par semaine, il conduisait son lourd bus climatisé à travers les plaines de Californie, de San Francisco à El Centro. Il se vantait de n’avoir jamais eu d’accident, et la compagnie le considérait comme un des meilleurs chauffeurs de car de la côte ouest.

Par cette belle matinée d’août, il était joyeux et détendu. Il avait laissé la plupart de ses passagers à Palm Spring, et son bus était presque vide. Comme la route 99, d’ailleurs.

Soudain, il vit devant lui la voiture ; une voiture de police, à en juger par les antennes et les phares. Au lieu de se tenir sagement à droite, elle zigzaguait follement sur le bitume, en fonçant vers le car.