Выбрать главу

— C’est complètement idiot !

— N’empêche que cette hypothèse fait des émules. Ces théories s’inspirent des anciennes recherches de Langdon, en particulier sur le Saint Graal et la descendance de Jésus[3]. Apparemment, les descendants mérovingiens de la lignée du Christ auraient des liens avec les carlistes, et le tatouage dans la main de l’assassin montre que…

— Stop ! Tout cela est absurde.

— D’autres avancent que Langdon a disparu parce qu’il est lui-même devenu une cible. Tout le monde joue à Sherlock Holmes ! La planète entière se demande quelle peut bien être la découverte d’Edmond et qui aurait eu intérêt à le faire taire. Les spéculations vont bon train.

Ambra entendit les pas de Langdon résonner dans le couloir. Elle se retourna au moment où il débouchait dans la pièce.

— Ambra, l’interpella-t-il aussitôt. Vous saviez qu’Edmond était gravement malade ?

— Malade ? Non.

Il lui raconta sa découverte dans la salle de bains.

La jeune femme était stupéfaite.

Voilà pourquoi il était si pâle et maigre ! Et qu’il travaillait tant ces derniers mois. Il savait que ses jours étaient comptés.

— Winston ? demanda-t-elle. Tu étais au courant ?

— Oui, répondit-il sans l’ombre d’une hésitation. Il ne voulait pas que ça se sache. Il a appris sa maladie il y a vingt-deux mois. Il a aussitôt changé de régime alimentaire et s’est mis à travailler comme un forcené. C’est aussi le moment où il s’est installé ici, pour profiter du système de filtration de l’air et se protéger des UV. Il devait vivre le plus possible dans la pénombre parce que les médicaments le rendaient sensible à la lumière. Edmond est parvenu à contredire les précisions pessimistes des médecins. Et pas qu’un peu. Mais, récemment, il a su qu’il perdait la partie. Avec les données que j’avais sur le cancer du pancréas, j’ai analysé l’état d’Edmond et calculé qu’il ne lui restait plus que neuf jours à vivre.

Neuf jours ? Ambra n’en revenait pas. Elle s’en voulait tellement de s’être moquée de son régime vegan, et de sa boulimie de travail.

Il a laissé ses dernières forces dans cet ultime moment de gloire, pour faire ses adieux au monde, se désola-t-elle.

Dès lors, Ambra était plus que décidée à achever son œuvre.

— Je n’ai pas trouvé un seul livre de poésie, annonça-t-elle à Langdon.

— Le poète que nous cherchons est peut-être Friedrich Nietzsche. (Il lui parla du texte qui trônait au-dessus du lit.) Cette citation ne fait pas quarante-sept lettres, mais elle prouve sans l’ombre d’un doute qu’Edmond était fan.

— Winston ? Tu peux fouiller dans les poèmes de Nietzsche et isoler les vers de quarante-sept lettres ?

— Certainement, répondit celui-ci. En allemand ou dans leur traduction anglaise ?

Ambra hésita.

— Commencez en anglais, intervint Langdon. Edmond comptait entrer ce code sur le clavier de son téléphone. Et sur un clavier classique, ce n’est pas très simple d’aller chercher un eszett allemand.

Ambra acquiesça. C’était futé !

— J’ai vos résultats, annonça Winston quasi instantanément. Il y a près de trois cents poèmes traduits, et cent quatre-vingt-deux vers de quarante-sept lettres précisément.

— Autant que ça ?

— Winston, insista Ambra. Edmond disait qu’il s’agit d’une prophétie… d’une prédiction… et qui est en passe de se réaliser. Tu ne vois rien qui pourrait correspondre ?

— Je regrette. Je ne distingue aucune prophétie. Les vers en question appartiennent à de longues strophes qui, sorties de leur contexte, n’ont pas grand sens. Je vous les montre ?

— Il y en a trop, répliqua Langdon. Il faut trouver un véritable livre et espérer qu’Edmond aura signalé le passage.

— Je vous conseille de vous dépêcher. Votre présence n’est plus un secret.

— Comment ça ?

— Les infos locales disent qu’un avion militaire vient d’atterrir à Barcelone avec à son bord deux agents de la Guardia Real.

*

Dans les faubourgs de Madrid, l’archevêque Valdespino était heureux d’avoir quitté le Palais avant que les grilles ne se referment sur lui. Installé à côté du prince sur la banquette de l’Opel, le prélat espérait que cette fuite l’aiderait à reprendre la main.

— À la Casita del Princípe ! ordonna Valdespino à son novice.

La maison de campagne du prince se trouvait à quarante minutes de Madrid. C’était plus un manoir qu’une maison. L’endroit servait de résidence privée aux héritiers de la couronne depuis le milieu du XVIIIe siècle — une maison à l’abri des regards où les garçons pouvaient vivre leur vie d’enfant avant de s’occuper des affaires du pays. Valdespino avait convaincu Julián que se retirer à la Casita serait plus sûr.

Sauf que je ne l’emmène pas là-bas, songea l’archevêque en jetant un coup d’œil au prince assis près de lui. Julián regardait à la fenêtre, visiblement perdu dans ses pensées.

Don Julián était-il aussi naïf qu’il le paraissait ? Ou, comme son père, était-il passé maître dans l’art de la dissimulation pour ne montrer au monde que la partie qu’il choisissait de dévoiler ?

54.

Les menottes aux poignets étaient serrées plus que nécessaire.

Ce n’était pas une plaisanterie !

— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-il à ses hommes qui le faisaient quitter la cathédrale.

Toujours pas de réponse.

Alors qu’on le ramenait vers le Palais, Garza aperçut des manifestants et des caméras massés devant les grilles.

— Faites-moi au moins passer par-derrière.

Mais les soldats ignorèrent sa requête et forcèrent leur commandant à marcher droit vers les journalistes. En quelques secondes, la nouvelle se propagea et les projecteurs se tournèrent vers lui. Garza, bouillant de colère, tenta de ne rien laisser paraître. Il continua de marcher la tête haute.

Aussitôt, ce fut la cohue. Les questions fusaient de toutes parts :

— Pourquoi vous a-t-on arrêté ?

— Qu’est-ce qu’on vous reproche, commandant ?

— Êtes-vous impliqué dans l’assassinat d’Edmond Kirsch ?

Garza s’attendait à ce que ses hommes fendent la foule sans leur accorder un regard, mais ils s’arrêtèrent et l’obligèrent à faire face aux objectifs. Garza aperçut une silhouette connue qui sortait du Palais et accourait dans sa direction.

Mónica Martín !

Elle était sans doute aussi étonnée que lui.

Mais, en arrivant à sa hauteur, il ne vit aucune surprise sur son visage. Juste du mépris. Elle leva la main pour faire taire la meute et extirpa une feuille de sa poche. Elle rajusta ses grosses lunettes et s’adressa aux caméras de télévision :

— Le Palais royal arrête le commandant Diego Garza pour son rôle dans le meurtre d’Edmond Kirsch, et pour avoir tenté de faire accuser injustement l’archevêque Valdespino.

Avant que Garza ait eu le temps de réagir, les agents de la Guardia Real l’entraînèrent manu militari vers les grilles. Dans son dos, il entendit Mónica continuer son laïus :

— En ce qui concerne la future reine Ambra Vidal, je crains d’avoir des nouvelles très préoccupantes.

вернуться

3

Voir Da Vinci code. (N.d.T.)