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Il n’y avait pas de système d’atterrissage à inspecter. Roy se poserait dans un port. Le vaisseau flotterait.

Il consacra douze heures à cette vérification, puis fit un petit somme. Brennan avait dû appeler le responsable des installations portuaires sur Home. Dans douze autres heures…

Sous la pesanteur de Home, il dormit moins, et son sommeil fut léger. En se réveillant dans le jour pâle, il se souvint de ses soupçons à l’égard de Brennan. Un vague sourire passa sur ses lèvres.

Il repassa ses soupçons dans sa tête… en s’attendant à les trouver ridicules. Il avait sûrement fait un peu de paranoïa. L’homme n’est pas bâti pour vivre enfermé pendant six ans avec un être qui n’est pas tout à fait humain.

Oui, il les repassa dans sa tête… et il les trouva logiques. L’idée lui paraissait toujours horrible, mais il ne parvint pas à déceler la moindre faille dans son raisonnement.

Voici ce qui le tourmentait.

Et il ne savait toujours pas ce que Brennan projetait exactement pour Home.

Il se leva, se promena dans le vaisseau. Il découvrit une chose qu’Alice avait autrefois rangée à bord : des couleurs pour décorer une combinaison pressurisée. Celle de Roy n’avait jamais porté d’images sur la poitrine. Il installa la combinaison sur une chaise et se planta devant, attendant l’inspiration. Mais l’image qui lui vint à l’esprit fut celle d’une cible éclatante de lumière.

Jobard ! S’il avait raison… mais c’était impossible qu’il eût raison.

Il appela Brennan. En avoir le cœur net

« Tout va bien ici, dit Brennan. Et de votre côté ?

— Parfait, dans la mesure où je puis en parler sans l’avoir réellement mis en vol.

— Bon. »

Roy s’aperçut qu’il essayait stupidement de déchiffrer la physionomie de cette tête fermée. « Brennan, il y a quelque temps, une idée m’est venue. Je ne vous l’ai jamais dite…

— Il y a deux ans et demi à peu près, hein ? Je pensais bien que vous étiez tracassé par autre chose que l’absence d’un harem.

— Peut-être étais-je cinglé à ce moment-là. Peut-être le suis-je encore, dit Roy. L’idée m’est venue que vous auriez beaucoup plus de facilités à convaincre la population de Home de soutenir votre guerre si, en premier lieu… » Il hésita. Mais, bien sûr, Brennan y avait songé. « … si, en premier lieu, vous ensemenciez la planète avec l’arbre de vie.

— Ce ne serait pas gentil.

— Non, en effet. Mais voudriez-vous m’expliquer, s’il vous plaît, pourquoi ce ne serait pas logique ?

— Ce n’est pas logique, répondit Brennan. La plante mettrait trop de temps à pousser.

— Ouais », fit Roy avec un vif soulagement. Puis », ouais, mais vous m’avez tenu à l’écart du jardin hydroponique. N’était-ce pas parce que j’aurais pu être plus ou moins contaminé par le virus ?

— Non. C’était parce que l’odeur vous aurait atteint et que vous auriez mangé quelque chose.

— Même chose pour le jardin a Kobold ?

— Oui.

— Le jardin où Alice et moi nous promenions sans avoir rien senti du tout.

— Mais vous êtes plus âgé maintenant, idiot ! » Brennan se mettait en colère.

— « Ouais, évidemment. Excusez-moi, Brennan. J’aurais dû penser à tout ça… » Brennan se mettait en colère ? Brennan ? Et… « Bon Dieu ! Brennan, je n’avais qu’un mois de plus quand vous m’avez dit de ne jamais pénétrer dans le jardin hydroponique du Hollandais Volant.

— Oh, la ferme ! » Brennan raccrocha.

Roy se rejeta en arrière dans son siège. Il se sentit terriblement abattu. Quel qu’il pût être par ailleurs, Brennan avait été un ami, un allié. Et maintenant…

Maintenant, tout soudain, Protecteur bondit sous une accélération de trois pesanteurs. Roy se plia en deux. La secousse lui tordit la bouche. Puis, avec toute la force de son bras droit qui était maintenant une masse de muscles, il tendit la main vers les commandes et chercha un bouton rouge.

Le bouton se trouvait sous un verrou de sécurité.

La clé était dans sa poche. Roy se fouilla en débitant à mi-voix un chapelet de jurons. Brennan voulait l’immobiliser ? Il raterait son coup. Roy allongea le bras malgré la force de trois pesanteurs, ouvrit le verrou, appuya sur le bouton.

Le câble qui le reliait à Protecteur fut rompu par une explosion. Il tombait.

Il lui fallut une bonne minute pour mettre le propulseur en poussée. Il amorça un virage à angle droit. Protecteur serait sûrement incapable de suivre le même rayon que le petit vaisseau-cargo. À travers le hublot, il vit la flamme du jet de Protecteur s’éloigner sur le côté.

Il la vit s’éteindre.

Pourquoi Brennan avait-il coupé la propulsion ?

Peu importait. Maintenant, le com-laser ; et prévenir Home. En supposant qu’il ne se trompait pas… mais il n’osait plus supposer autre chose, à présent. Brennan pourrait s’innocenter ensuite : se rendre aux astronautes de Home en portant uniquement sa combinaison pressurisée, et leur dire que Roy avait perdu la raison. Peut-être serait-ce vrai ?

Il orienta le com-laser vers Home et commença à l’accorder. Il connaissait la fréquence qu’il voulait, et l’endroit… si celui-ci se trouvait du bon côté de la planète. Qu’allait faire Brennan maintenant ? Que pouvait-il faire ? Une seule chose, bien sûr ! Un protecteur n’avait guère de libre arbitre… et la capsule des armes de Protecteur renfermait tout l’arsenal de l’enfer. Il allait tuer Roy Truesdale.

Home semblait se présenter du mauvais côté. La colonie était aussi importante qu’une nation moyenne, mais elle lui tournait stupidement le dos. Et où était le rayon mortel de Brennan ? Il fallait qu’il s’en serve, voyons !

La propulsion de Protecteur était toujours coupée. Brennan ne cherchait pas à le poursuivre.

Mais Brennan était-il encore à bord ?

Roy entrevit alors une hypothèse. Irrationnelle certes, mais il n’avait pas le temps de réfléchir. Il s’arracha à son siège et dégringola une échelle. Les armes se trouvaient dans le sas. Et la porte intérieure était demeurée ouverte. Roy se précipita, s’empara d’un laser, bondit en arrière avant que la porte pût se refermer sur lui.

La porte n’avait pas bougé.

Si Brennan n’était plus à bord de Protecteur

Alors tout irrationnel que cela pouvait être, Brennan devait essayer de sauver la situation et Roy Truesdale par la même occasion. Pour réussir, il fallait qu’il arrivât à bord du vaisseau-cargo. Un exploit d’un héroïsme impossible… mais Roy l’imagina réglant le propulseur du Protecteur pour un arrêt automatique, puis se laissant tomber par le sas vers le vaisseau-cargo juste au moment où Roy coupait le câble. Tombant sur la coque, soudant un autre câble avant que Roy pût développer la poussée. Puis descendant le câble vers le sas. Impossible ? À Brennan, rien d’impossible ! Roy tint prêt le fusil laser et attendit que la porte intérieure du sas se fermât.

Il eut sa réponse dans le grondement et l’éclair derrière lui. Dans un bruit strident d’aspiration d’air, le monstre-Brennan avait traversé la coque à la hauteur de la toilette, en avait franchi la porte et l’avait refermée doucement derrière lui. La matière de la porte n’était pas celle de la coque : elle s’enfonça un peu sous la pression ; mais elle résista.

Roy leva son arme.