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Il se lève, serre la main du père, sans se rendre compte qu’il est en train de lui broyer les phalanges.

— Prenez soin d’elle, monsieur Durieux.

Le père n’arrive pas à articuler un mot de plus.

Alors Raphaël embrasse Jessica sur le front et murmure :

— N’oublie jamais Will, d’accord ?

— Promis.

— Tant qu’il sera présent là, ajoute-t-il en posant une main sur son cœur, il ne sera pas mort.

— D’accord.

— Pars, maintenant. Et… ne reviens jamais.

Les lèvres de Jessica se mettent à trembler.

— Ce n’est pas un endroit pour toi, Jessie. C’est un endroit pour personne.

— Mais…

— Fais ce que je te dis.

— Je pourrai vous écrire, au moins ?

— Bien sûr. Je te lirai, tu peux en être sûre. Va, maintenant.

ÉPILOGUE

Sandra a été déclarée responsable de ses actes par les experts psychiatres.

Elle a été condamnée à vingt ans de prison, grâce aux circonstances atténuantes.

Pendant son incarcération préventive dans une maison d’arrêt, près de Châteauroux, elle a écrit une lettre à Raphaël.

Trois lignes sur une grande page blanche :

Je suis libre, désormais. Et c’est grâce à toi.

Chaque jour, je prie pour toi. Et pour ton frère.

J’espère que tu me pardonneras.

Raphaël a déchiré la feuille en mille morceaux avant de la jeter dans les toilettes de sa cellule.

Et de tirer la chasse.

Jessica et Raphaël se sont revus. Un an et neuf mois après le parloir.

Dans l’enceinte d’un tribunal, lorsqu’elle est venue témoigner.

Jamais on n’avait parlé de lui comme ça. Son cœur s’est réchauffé un instant.

La cour d’assises, au terme d’un procès qui a duré cinq jours, a condamné Raphaël à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de vingt-deux ans.

Les circonstances atténuantes ne lui ont pas été accordées.

Quelque temps plus tard, il a été transféré dans une centrale.

Au bout d’un mois, il a pris le médecin en otage et s’est barricadé dans l’infirmerie.

À l’arrivée des forces d’intervention, il a refusé de parler au négociateur.

A refusé de se rendre.

Les gendarmes mobiles ont donné l’assaut en fin de journée.

Ils l’ont abattu d’une balle en pleine tête et ont récupéré le médecin, indemne.

Raphaël avait deux photographies sur lui. Une photo réunissant sa mère et ses deux frères.

La photo de son père, aussi.

Ainsi que quelques lettres.

Jessica a appris la nouvelle en regardant le journal télévisé de vingt heures.

Ce soir-là, elle s’est murée dans le silence.

À ce jour, elle n’a plus jamais prononcé un seul mot.

Biographie de l'auteur

Karine Giebel a été deux fois lauréate du Prix Marseillais du Polar : en 2005 pour son premier roman Terminus Elicius et en 2012 pour son sixième livre Juste une ombre, également Prix Polar francophone à Cognac. Les Morsures de l’ombre, son troisième roman, a reçu le Prix Intramuros, le Prix Polar SNCF et le Prix Derrière les murs. Meurtres pour rédemption est considéré comme un chef-d’oeuvre du roman noir.

Ses livres sont traduits dans plusieurs pays, et pour certains, en cours d’adaptation audiovisuelle.

Purgatoire des innocents est son septième roman.