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Il partit, promettant de revenir pour 2 heures.

Pendant que le boy nettoyait la cellule, Malko et Couderc firent leurs bagages. Et à 2 heures pile, Patrice Mobutu était là. Bobo, tout sourire, fit des adieux touchants. Malko serra des tas de mains noires, à travers les barreaux de la Huit, et ils se trouvèrent dehors.

L’horrible panier à salade attendait devant la porte. Quand Malko apprit qu’il devait traverser toute la ville dedans, il refusa tout net.

— Puisque c’est comme cela, je retourne en prison, annonça-t-il.

Il commençait à adopter le système africain. Mobutu argumenta : « Ils étaient encore des prisonniers de droit commun. Si la transaction n’aboutissait pas, il faudrait les ramener dans le panier à salade… »

On trouva enfin un compromis. Ils montèrent dans la voiture de Mobutu et le panier à salade suivit, vide…

La banque se trouvait au nord de la ville, sur la route de l’aéroport, en pleine brousse. C’était un petit bâtiment moderne à un étage, tout en verre et en béton, caché derrière un bouquet de manguiers. Brigitte Vandamme attendait devant la porte. Pour la circonstance, elle arborait une immense capeline rose, et une robe de soie assortie qui ne cachait pas grand-chose de son corps majestueux.

Plein d’importance, Patrice Mobutu mena le cortège dans le bureau du directeur.

Celui-ci, un métis à l’air chafouin, ne quitta pratiquement pas des yeux les seins de Brigitte pendant toute la discussion. Il exigea de Malko une bonne douzaine de signatures avant de lui remettre les liasses de billets.

De plus en plus solennel, Mobutu tira de sa serviette les ordres d’élargissement et les posa sur la table.

— Vous êtes libres, mais vous n’avez pas le droit de quitter Bujumbura jusqu’à nouvel ordre, répéta-t-il. D’ailleurs, la Sécurité conserve vos passeports et je dois vous avertir que vous serez sous surveillance policière…

Là-dessus, il s’empara prestement des billets, les recompta avec une agilité de croupier et les enfouit dans sa serviette ; il quitta le bureau presque en dansant et monta dans sa voiture.

— Et voilà, dit gaiement Brigitte, il n’y a plus qu’à ouvrir une bouteille de Champagne…

— Vous avez un coffre, chez vous, demanda Malko ?

— Oui.

Il lui tendit leurs ordres de mise en liberté, constellés de cachets et de signatures compliquées.

— Mettez-les en sûreté. Je ne voudrais pas que ces sauvages changent d’avis.

Elle enfouit les papiers dans son sac, et ils quittèrent le bureau.

Brigitte avait une Chevrolet blanche décapotable. C’était bien agréable de retrouver le cuir des coussins après la puanteur de la Maison-Blanche.

Pendant le trajet de retour vers la ville, Malko réfléchissait dur :

Deux jours à Elisabethville.

Deux jours perdus à Bujumbura.

Huit jours en prison.

Les cosmonautes devaient trouver le temps long. La C.I.A. aussi. Pourvu qu’AlIan Pap ne se décourage pas. Sinon, il pouvait s’engager comme plongeur chez la belle Brigitte. D’autant que cette libération contre rançon ne lui disait rien qui vaille. Le Grec ne s’était pas donné tant de mal pour le laisser filer maintenant.

Il n’y avait qu’une seule solution : quitter Bujumbura en vitesse. Mais pour cela, il avait besoin de Brigitte. Or il avait bien l’impression qu’elle ferait tout son possible pour le retenir…

— Je voudrais bien récupérer mon passeport, dit- il à haute voix, et terminer cette histoire idiote.

— Nous verrons le président, dit Brigitte. C’est un homme très bien. Je le connais.

Sur ces paroles encourageantes, ils arrivèrent place de l’Indépendance. Tout le personnel de La Crémaillère attendait sur le trottoir.

Le retour de l’enfant prodigue.

Chapitre XI

Dans l’antichambre du Président une jeune Noire allaitait un très beau bébé, un sein en forme de poire somptueusement exposé à la vue des visiteurs. Des bambins se poursuivaient entre les jambes des sentinelles avachies sur les canapés.

— La famille du Président a emménagé dans les appartements royaux, souffla Brigitte à Malko. Ils sont trente-sept, et tous ne sont pas encore arrivés de la forêt.

Cela mettait une animation de bon aloi. Voilà un gouvernement qui encourageait la famille.

Malko était sorti de prison la veille. Il n’avait pas regagné le Pagidas, mais il était tendrement soigné par la belle Brigitte qui les avait installés, lui et Michel Couderc, au deuxième étage de son immeuble, avec trois boys à leur service.

Le dîner de « libération » avait été fastueux : Moët et Chandon, viande d’importation, et même de la salade fraîche. Brigitte s’était mise sur son trente et un. Une robe de mousseline noire, avec un devant presque transparent qui dévoilait son opulente poitrine.

Sous la table, son pied avait cherché la jambe de Malko pendant tout le repas.

Couderc et Malko avaient deux chambres séparées. Prétextant la fatigue, Malko demanda à aller se coucher sitôt la dernière goutte de Champagne bue. Il s’était alors aperçu que sa porte n’avait pas de serrure.

Il n’eut pas à attendre longtemps. La porte s’ouvrit alors qu’il finissait tout juste de se déshabiller.

Brigitte tenait un plateau à la main sur lequel étaient posées une bouteille de Moët et Chandon et deux coupes. Elle posa le plateau par terre et, très simplement, tira la fermeture Eclair de sa robe.

— La dentelle est si fragile, s’excusa-t-elle. Et ici on n’en trouve pas.

Après un séjour à la Maison-Blanche, le spectacle n’était pas tellement désagréable. Il se dégageait de ce grand corps une sensualité animale qui ne laissa pas Malko indifférent. D’ailleurs, il n’avait pas le choix : Brigitte était déjà dans son lit.

La suite fut un festival de gémissements et de contorsions. Broyé, griffé, écrasé, dévoré, Malko pensait aux boys malingres qui découvraient l’amour à travers la volcanique Brigitte Vandamme. Il n’avait encore rien vu : soudain, Brigitte agrippa les barreaux du lit et le corps tendu en arc, se soulevant comme une plume, elle exhala un long hurlement qui se répercuta dans tout l’immeuble. Malgré lui, Malko lui mit la main sur la bouche.

— Les boys, murmura-t-il.

Elle ouvrit des yeux apaisés et très doux.

— Ils ont l’habitude. Mais les autres fois, je ne crie pas aussi fort.

Cette soirée mémorable avait scellé une tendre amitié entre Brigitte et Malko. Elle s’était levée aux aurores, pour organiser un rendez-vous avec le président Bukoko. A son avis, il était le seul à pouvoir dédouaner complètement Malko.

Ni le sinistre Aristote, ni le commissaire Nicoro ne s’étaient manifestés. Ce calme était inquiétant. Car Malko était officiellement cloué à Bujumbura. Impossible de prendre un avion sans passeport et des barrages de police fermaient toutes les routes quittant la capitale, à cause des rumeurs de soulèvement royaliste à partir du Congo.

Et pendant ce temps-là, les cosmonautes attendaient…

Ari-le-Tueur, surtout, inquiétait Malko. Il en savait trop sur le trafic des diamants et sur le meurtre de Jill pour que le Grec le laisse repartir impunément. Il fallait absolument que le président le croie. Autrement, il serait acculé à une solution désespérée : par exemple bâillonner Brigitte et filer avec sa voiture…

Absolument indigne d’un gentleman.

— Le président va vous recevoir tout de suite.

L’huissier écarta une poignée d’enfants pour que Malko et Brigitte puissent s’asseoir sur un canapé. Puis, il disparut dans les profondeurs des appartements royaux et personne ne s’occupa plus d’eux.