O doux rêveurs! ô poètes I II s'agit bien de ces vétilles, querelles de princes ou querelles de peuples, petites guerres de monarques se disputant, dans le tohu-bohu du Moyen-Age, la possession de quelque maigre duché, troubles intérieurs de nationalités en train de se constituer ou même grandes guerres entreprises pour l'établissement ou la conservation d'un certain équilibre entre les nations 1
Fadaises que tout cela ! Ces luttes, ces querelles sanglantes que vous flétrissiez si vigoureusement, c'était tout de même la manifestation d'un confus idéalisme régnant sur les cerveaux ; les plus enragés guerroyeurs ne parlant que de droit, toujours on croyait ou l'on prétendait combattre pour le droit, ou la liberté ou même la fraternité des peuples en ce temps-là.
Aujourd'hui, c'est le règne du réalisme dominateur I Nous faisons la guerre autant et même plus qu'autrefois, non point pour des idées creuses ou des rêveries, mais au contraire, en vue de quelque avantage sérieux et palpable, de quelque profit important.
L'industrie d'une nation périclite-t-elle parce qu'une autre nation, voisine ou éloignée, possède les moyens fournis par la nature ou l'industrie de produire à meilleur compte? Une guerre va décidera qui doit rester le marché, par la destruction des centres industriels du vaincu, ou par quelque bon traité imposé à coups de torpilles.
Notre commerce a-t il besoin de débouchés pour le trop-plein de ses produits? Bellone, avec ses puissants engins, se chargera d'en ouvrir. Les traités de commerce ainsi imposés ne durent pas longtemps, soit; mais en attendant, ils font la richesse d'une génération, et quand ceux-ci seront déchirés, nous trouverons bien d'autres occasions 1 »
Suivant le thème des manœuvres, l'ennemi représenté par un autre corps (l'armée, était supposé avoir pris Brest, en glissant dans le port une nuée de sous-marins. Il marchait sur Rennes et cherchait à le déborder par son escadre aérienne.
Le 8'chimistes, rassemblé en deux heures, s'aligne avec ses vingt batteries étincelantes, ses hommes équipés pourvus de sept jours de boulettes de viande concentrée.
Le corps médical offensif arrive en quatre sections avec son parc à microbes, en même temps que paraissaient dans le ciel les torpédistes aériens sortant de leur dépôt. Les gros aéronefs, précédés d'une nuée d'éclaireurs torpédistes, s'avancent sur une seule et immense ligne dont les intervalles s'élargissent de plus en plus, de façon à embrasser le plus possible d'horizon.
Les éclaireurs à tiélicoptères renseignent les batteries par téléphone.
Les forces terriennes se déploient aussi : les bombardes roulantes arrivent par les routes, avec les sections de mitrailleurs et les torpédistes.
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Dans l'album Im Guerre au XX' Siècle (1887), il ne s'agit pas de manœuvres. Fabius Molinas.de Toulouse, du 18* Aérostiersde la Territoriale, vole à la frontière menacée, comme canonnier de 2' classe, sur l'aéronef YEpervier.
Au jour levant une odeur nauséabonde réveille Molinas dans son hamac ; il monte sur le pont de YEpervier qui file à travers un brouillard épais. L'escadre croisait une division de brouillardiers volants en train de couvrir la frontière d'un nuage opaque destiné à dissimuler les opérations.
Premiers coups de canon: l'escadre.attaquait un corps de blockhaus roulants ennemis arrêtés dans leur marche par le brouillard.
Fabius Molinas, au cours des événements, change plusieurs fois d'affectation. Promu sous-ingénieur commandant un blockhaus roulant d'avant garde, il a participé à l'enlèvement d'une place forte.
Mais les chimistes ennemis, s'étant glissés la nuit dans un faubourg, mettent en batterie leurs redoutables engins. Avec une demi-douzaine d'obus à gaz, tout est asphyxié dans la ville, les habitants et les troupes d'occupation. Tout a péri, sauf Fabius Molinas qui, par un hasard providentiel, venait justement de descendre dans les caves pour une réquisition, et pénétrait au moment de l'explosion dans un caveau sans communication avec l'air extérieur.
Revenu à lui après trente-six heures d'évanouissement, Molinas a l'heureuse chance de faire sauter le réservoir à miasmes de l'ennemi, ce qui déchaîne subitement sur cet ennemi d'effroyables épidémies, auxquelles l'armée française n'échappe qu'au moyen d'un brouillard isolateur qui lui permet d'abandonner sans pertes la région contaminée.
Fabius Molinas, lieutenant de mitrailleurs, prend part à bien des combats avec ses pompes à mitraille. Après un passage comme ingénieur torpédiste sur un torpilleur sous-marin, il retourne à l'aviation, et sur le Voltigeur aérien 39, poursuit de longues croisières au-dessus de divers continents. Dans une dernière bataille entre les flottes aériennes, le Voltigeur 39, victorieux d'un aéronef ennemi, tombe avec de glorieuses avaries sur une riche,villa de Mexico.
Et soigné par la demoiselle de la maison, dans le cœur de laquelle il est entré par effraction, Fabius Molinas, aussitôt rétabli, va devenir l'heureux époux de la charmante senorita, et la ramènera en France sur son Voltigeur 39, dont les glorieuses blessures sont aussi cicalrisées.