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– Et il n’y a… il n’y a pas d’autre issue? Soudain, Pold eut un rire strident:

– Ah! nous sommes fous!… Nous sommes de pauvres fous!… Nous n’y pensions même pas… Les fenêtres, Diane!… Les fenêtres qui donnent sur la cour!… Nous sommes au rez-de-chaussée… Nous n’aurons qu’à enjamber…

– C’est vrai! Vite! À la fenêtre!

Et ils se précipitèrent sur la fenêtre de la salle à manger. Ils arrachèrent les rideaux, ouvrirent la croisée avec des gestes de déments…

Et ils reculèrent, pleins d’horreur et hurlant d’épouvante…

La fenêtre avait un mur!!!

Ils allèrent ou plutôt ils se traînèrent jusqu’aux autres fenêtres et eurent encore la force d’en ouvrir les croisées.

Partout, ils se heurtèrent à un mur!

Et ce mur apparut à Pold et à Diane comme la pierre qui ferme un tombeau!…

XVII DUO D’AMOUR

Deux heures environ après le départ d’Arnoldson des Volubilis et quelque temps après que Martinet se fut dirigé vers Esbly, poursuivi par Joe, le père Jules quitta sa loge, et se dirigea vers la villa. Il en gravit l’escalier qui conduisait à la chambre d’Adrienne.

– Qui va là? fit la voix d’Adrienne. Pourquoi me dérange-t-on à cette heure?

– C’est moi madame, le père Jules!

– Que me voulez-vous?

– Je désirerais vous parler.

– Pourquoi n’attendez-vous pas à demain matin?

– Parce que ce que j’ai à vous dire, madame, est tellement grave que je ne saurais attendre. Je vous en prie, madame, écoutez-moi.

– C’est bien sérieux, ce que vous me dites là?

– Ah! madame! si sérieux qu’il ne s’agit de rien de moins que de la vie de votre mari et de votre fils!

Adrienne, depuis le départ de Lawrence, n’avait pas bougé de sa chambre.

Elle se décida à ouvrir au père Jules, qui entra respectueusement.

Il y avait une veilleuse sur la cheminée, et c’est à la lueur de cette veilleuse que le dialogue suivant s’engagea entre Adrienne et son concierge.

– Voici, madame, ce dont il s’agit, fit le père Jules.

Mais, ayant prononcé ces mots, il s’arrêta. Il tournait, d’un geste embarrassé, sa casquette dans ses mains.

– Eh bien, reprit impatiemment Adrienne, je vous écoute… et parlez vite… qu’y a-t-il?

– Il y a, madame, que je viens m’accuser d’une chose…

– De quoi?

– Oh! madame… je me reproche bien, à cette heure, d’avoir été aussi indiscret. Mais c’était pour son bien que je le faisais…

– Pour le bien de qui?

– Mais pour le bien de M. Pold…

– Mais vous me faites mourir! Qu’est-ce que vous avez fait pour le bien de M. Pold?

– Madame me pardonnera?

– Oui, fit rageusement Adrienne. Mais parlez, au nom du ciel, parlez!…

– Sachez donc, madame, reprit le père Jules, que M. Pold avait une maîtresse… sauf votre respect… À son âge… c’est permis, n’est-ce pas, madame?…

– Allez! Allez!…

– C’est permis quand on ne fait pas de bêtises. Or j’ai vu justement que M. Pold faisait des bêtises, de grosses bêtises…, et j’ai cru de mon devoir d’avertir son père de ce qui se passait… J’ai donc tout dit à M. Lawrence… Je pensais bien que M. Lawrence, quand il saurait ce que j’avais à lui apprendre, ne serait pas content, qu’il gronderait M. Pold, qu’il lui ferait des remontrances et qu’il prendrait des dispositions pour que M. Pold ne recommence plus ses farces… Mais jamais je n’aurais pensé que mes révélations le mettraient dans un état pareil à celui dans lequel je l’ai vu…

– Quand lui avez-vous parlé de Pold?

– Mais quand il sortait d’ici. Il paraissait déjà tout drôle! et fort préoccupé. Cependant je l’abordai et lui dis que M. Pold avait une maîtresse et qu’il venait encore de partir pour Paris, où il devait la rejoindre. Je lui dis que cette liaison prenait des proportions telles que j’avais cru devoir l’en prévenir.

– Que vous a-t-il répondu?

– Il m’a demandé l’endroit où M. Pold rencontrait sa maîtresse, et je lui ai donné l’adresse de la garçonnière de M. Pold… oui, madame, M. Pold a une garçonnière. C’est n…, rue de Moscou… Il me demanda ensuite le nom de cette femme, et je le lui donnai en ajoutant que c’était une grande cocotte… sauf votre respect, madame…

– Et alors?

– Oh! alors, je n’avais pas plus tôt prononcé le nom de cette femme qu’il changea brusquement de visage. Il fut pris d’une grande fureur, proféra des paroles de menace contre cette femme et contre M. Pold et, me quittant brusquement, se mit à courir comme un fou. Il faisait des gestes terribles, et j’ai bien cru qu’il disait: «Je les tuerai! je les tuerai!…»

– Le nom de cette femme? s’écria Adrienne en saisissant le bras du père Jules et en le serrant jusqu’à la meurtrissure…

Le père Jules dit, avec un grand air de soumission:

– Elle s’appelle Diane, madame.

– Diane! s’écria Adrienne, d’une voix égarée… Vite… une voiture… Faites atteler… Vite… arriverai-je encore à temps?…

Rapidement et fébrilement, elle jeta un manteau sur ses épaules, et descendit, courut aux écuries, pressa le palefrenier, le cocher.

Puis elle appela sa femme de chambre, apprit d’elle que Lily était couchée depuis longtemps, et lui recommanda de dire à sa fille qu’elle serait de retour le lendemain, qu’elle n’eût pas à s’inquiéter.

Enfin, le coupé fut prêt. Elle cria au cocher:

– À la gare d’Esbly! À fond de train!

Elle referma la portière. Seule dans la voiture, elle disait et redisait:

– Pold! mon fils chéri! que veut-il faire à mon Pold? que va-t-il lui arriver?… Et lui, Charley! le misérable fou!… Pourquoi a-t-il fui?… Pourquoi n’a-t-il pas compris que je lui eusse pardonné?…

Le père Jules avait dit au cocher:

– Mon vieux, ne te presse pas… il ne faut arriver à Esbly que pour le dernier train. Ordre du maître!

Le père Jules regarda s’éloigner le coupé et, derrière ce coupé, ne ferma point la grille.

Il resta sur le seuil, semblant attendre quelque chose ou quelqu’un.