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Et Lily était sur la poitrine d’Agra, défaillante, sans force…

Ils traversèrent ainsi le bois de Misère, atteignirent la route de Paris.

Kali semblait voler vers un but qu’il devait connaître.

Ils traversèrent des villages, une forêt, de vastes plaines…

Et le prince avait posé sur la bouche de Lily le baiser mortel de ses lèvres de marbre!…

XVIII CHÂTIMENT

Diane et Pold s’étaient réfugiés dans la chambre. Ils se regardaient et ne se parlaient point. Leur regard lisait avec suffisamment d’éloquence toute la folle terreur qui les hantait pour qu’ils n’eussent point à l’exprimer.

Ils étaient appuyés contre les murs, face à face. Ils ne bougeaient pas.

Ils attendaient.

Ce qu’ils attendaient, c’était l’inévitable, l’effroyable, l’horrible…

C’était la chose fatale qu’ils ne savaient pas, mais pour laquelle ils étaient là… pour laquelle on les avait amenés là!

On n’avait point mis sur eux une porte de chêne et un mur sans un dessein terrible…

Ils prévoyaient qu’on les avait destinés à quelque supplice, à un supplice qui commençait…

Diane dit, d’une voix d’hallucinée:

– Qu’attendons-nous?…

Elle dit encore:

– Pourquoi?… Pourquoi?… Pourquoi?

Les paroles de Diane firent que Pold sortit enfin de l’abîme de terreur où les révélations de la jeune femme l’avaient plongé.

Il eut un geste de résolution.

– Enfin, s’écria-t-il, il faut aviser!… Il est certain que quelque chose nous menace. Quoi? On nous retient de force ici, on nous y a murés. Cette porte, malgré sa solidité, il faut la briser.

Diane étendit sa main vers lui; elle lui parut une somnambule.

– Ne tente rien, dit-elle. Je te jure que c’est inutile!

Avec une horrible grimace de frayeur, elle s’écria:

– Mais que veulent-ils de moi? Pourquoi m’avoir enfermée dans ce tombeau?… Toi… toi… ils ont à se venger de toi… Qu’ils se vengent! qu’ils fassent ce qu’il leur plaît de toi et de ta famille! Que vous soyez vivants, que vous soyez morts, je me demande ce que cela peut bien me faire! J’ai toujours été avec eux… Je leur ai toujours obéi… Agra a été mon maître, il n’a pas cessé de l’être… Alors… alors, pourquoi m’enferment-ils ici?…

Pold avait reconquis quelque lucidité:

– Je vous dis, Diane, que nous ne devrions songer qu’à une chose: unir nos efforts pour sortir d’ici…

– Mais tu ne sortiras pas! Je te dis que tu ne sortiras pas!

– Diane, revenez à vous…

– Je te dis que nous allons mourir…

– Moi peut-être… mais vous, Diane, vous les avez servis, vous êtes leur docile instrument… Pourquoi voulez-vous qu’ils vous sacrifient?…

Elle répéta:

– Je te dis que nous allons mourir… Je te dis qu’ils ont quelque chose de terrible à accomplir ici… Nous n’y échapperons point, sois-en sûr!…

– Alors, vous vous soumettez, Diane… demanda Pold.

– À quoi?

– Au sort fatal auquel vous vous dites vouée… Moi, je lutterai jusqu’au bout! Et je vous jure que, s’ils veulent ma peau, eh bien! il faudra qu’ils viennent la prendre, et que je saurai la défendre, Diane!

Il se baissa vers la cheminée, prit un chenet et cria:

– Je les attends!… Oui, je défendrai ma peau! Et la vôtre par-dessus le marché!…

Puis il prit Diane au poignet et voulut l’entraîner:

– Allons à la porte! Il y a peut-être quelque chose à faire à la porte… Allons! du courage! ou nous sommes fichus!…

Ils sortaient de la chambre et entraient dans le vestibule quand ils crurent percevoir un bruit derrière la porte.

– Écoute! fit Pold, une main étendue et arrêtant Diane.

Diane fit:

– Oui, oui, il y a là quelqu’un, là… derrière cette porte.

Pold répéta son geste de silence.

Et tous deux entendirent distinctement le bruit que faisait une clef que l’on introduisait dans une serrure.

Ils se regardèrent et reculèrent.

Ils reculèrent jusque dans la chambre.

Diane se traîna derrière le lit.

Pold, sur le seuil de la chambre, resta.

Il se dressa dans une dernière attitude de bravade, et serra le chenet dans sa main crispée.

Mais la peur, la peur atroce qu’on ne peut vaincre et qu’il n’avait point vaincue malgré tous ses efforts, faisait que ses dents claquaient.

Du seuil de la chambre, il ne pouvait voir celui qui entrait.

Il entendit donc, avec un effroi grandissant, la porte s’ouvrir.

Puis la porte fut refermée avec précaution, lentement et presque sans bruit.

Un pas glissa sur le tapis, un pas que l’on étouffait. Et, soudain, dans le cadre de clarté que faisait la porte de la chambre restée ouverte, apparut un homme.

Pold poussa un cri terrible, et son arme lui échappa de la main: cet homme était son père!

Et il suffisait à Pold d’avoir rencontré une seconde le regard de cet homme pour être définitivement fixé sur ce qu’il savait et sur ce qu’il voulait.

Lawrence regarda son fils, qui avait étendu les bras au travers de la porte.

Il le regarda d’une façon tellement étrange et en lui présentant un visage d’une pâleur tellement effrayante que Pold recula.

Lawrence avançait. Lawrence entra dans la chambre. Et Pold reculait toujours…

– Où est-elle? dit Lawrence.

Pold ne reconnut point la voix de son père et ne lui répondit pas.

Mais Lawrence venait d’apercevoir Diane. Elle le regardait venir à elle.

– Que me voulez-vous? Que me voulez-vous?…

Elle n’avait plus la force de crier. Elle voulut dire encore des choses… mais il ne s’échappait de sa bouche que des sons rauques et inintelligibles.

Lawrence fit le tour du lit. Froidement, il tira de sa poche son revolver et l’arma.

– Je veux que tu meures! dit-il.

Diane recouvra une énergie terrible. Elle bondit, se glissa le long du mur, essaya de gagner la porte de la chambre. Mais Lawrence lui avait coupé la retraite.