Выбрать главу

Elle siffle entre les dents.

— C’est tout ce que tu as à m’offrir ?

Je la prends par la taille, pèse de tout mon poids, la forçant à s’allonger sur la table.

— Salaud.

J’entame de rapides va-et-vient. Elle gémit.

J’accélère le rythme. Ses gémissements deviennent des plaintes.

Elle m’exhorte à redoubler d’ardeur.

— Plus fort, je ne sens rien.

Ses plaintes deviennent des cris.

— Oui. Dis-le-moi.

Je m’allonge sur elle, approche ma bouche de son oreille.

— J’ai entendu sa voiture, ton mari est là.

— Continue.

À bout de souffle, je prends mon plaisir sans me préoccuper du sien.

Je reprends vie.

Je me libère, retourne dans le hall et me rajuste.

Elle fait irruption quelques instants plus tard, en titubant, une main dans les cheveux.

— Salaud. Ne me laisse plus jamais quatre semaines sans nouvelles de toi.

Je sors de la maison, monte dans la Renault de location.

Il est 10 h 22. Nos ébats excèdent rarement la demi-heure.

Je complète le bilan.

Je n’ai pas mal quand j’éjacule. Je ne me suis levé qu’une fois pour aller pisser ces deux dernières nuits. Je suis capable de me retenir. Je n’ai ni mictions douloureuses ni blocages.

Kösztler m’a pris pour un pigeon.

Je prends la direction du bureau.

Ce week-end, je ne me suis pas préoccupé de ma prostate, j’en ai profité pour faire un point sur mes découvertes et poursuivre mes investigations.

J’ai analysé la photo du SS. Selon Internet, cet homme est un officier de la Waffen-SS. Les trois points sur l’insigne de son col indiquent qu’il a le grade d’Untersturmführer, ce qui le situe du côté de lieutenant, pas très haut dans la hiérarchie. J’ai par ailleurs appris que ces jolis costumes ont été dessinés par un certain Hugo Boss.

À part cela, j’ai une nouvelle fois parcouru les photos, une par une, et j’ai repassé chaque document en revue en tentant d’isoler les affaires de mon père.

Une chose est sûre, le carnet de son premier mariage a disparu. Lorsque j’ai jeté un coup d’œil dans le carton, chez Roland, il y était encore. À l’heure qu’il est, il doit se trouver dans la carcasse de la bagnole ou quelque part sur l’autoroute entre Augsbourg et Zusmarshausen. Sans ce chauffard, je saurais où j’en suis.

Hormis son passeport, le choix était aléatoire. Je n’ai trouvé aucun document le concernant directement, ni acte de naissance ni acte de mariage ni acte de décès. À tout hasard, j’ai ajouté la photo de son mariage avec ma mère.

Je me gare dans le parking souterrain et jette un coup d’œil aux voitures présentes. Je prends l’ascenseur et fais irruption sur le plateau que je traverse au pas de course. Les gens relèvent la tête, certains me saluent d’un hochement de tête. Claudine, l’une des comptables, évite mon regard et plonge le nez dans son écran.

Je passe devant le bureau de Clémence.

— Venez.

Elle me suit, entre dans le bureau, se tient au garde-à-vous à proximité de la porte.

— Bonjour Stanislas, vous allez mieux ?

— J’ai eu beaucoup de chance.

— C’est ce que votre cousin m’a dit.

— Vous m’avez trouvé un traducteur ?

— Nous sommes début juillet, ce n’est pas évident, les vacances scolaires ont débuté.

— Vous m’en avez trouvé un, oui ou non ?

— En quelque sorte, je lui ai fixé rendez-vous à 11 h 30.

— La voiture ?

— J’en ai trouvé une en stock, vous pouvez en prendre livraison mercredi.

— Quelle couleur ?

— Bordeaux métallisé, ce n’est pas mal.

— Pas mal ? Je déteste le rouge, trouvez-en une autre. Ni noir, ni blanc, ni rouge. Prenez un gris métallisé, pas le plus clair, le gris moyen. S’ils vous disent qu’ils n’en trouvent pas, dites-leur que je passe à la concurrence, pour la mienne et celles de la société.

— Bien Stanislas.

— Et faites venir Jean-Charles.

— Je l’appelle.

Restait à savoir ce qui constituait la pile de papiers qui se trouvait sous le passeport et le livret. L’enveloppe qui contenait la correspondance entre les Allemands ou celle bourrée d’actes de propriété pouvait en faire partie. Leurs dimensions leur permettaient d’entrer dans le carton à chaussures. Comme la photo du SS.

J’ai réexaminé les destinations et les dates des voyages de mon père dans le passeport. Bien souvent, il se rendait deux ou trois fois au même endroit dans un laps de temps de six mois, ce qui suivait la logique de son boulot : analyse des besoins, cahier des charges, suivi de l’installation.

Seules deux destinations sont ponctuelles. En plus de Berlin, le 22 juin 1954, son dernier voyage avant Le Caire, j’ai remarqué qu’il s’était rendu à Milan le 23 avril 1954 et y était resté deux jours.

J’ai repris mes recherches. En 1954, deux tréfileries étaient actives à Berlin-Ouest, mais aucune à Milan, ni dans la région proche.

Dans le tas de cartes postales, il y en avait une de Caprino Veronese, un petit village situé à une centaine de kilomètres de Milan, proche du lac de Garde. Comme les autres, elle était vierge, hormis une courte annotation au dos.

NAT K 22963

Les lettres étaient écrites en majuscules, à l’encre noire, les chiffres à l’encre bleue. Il m’était difficile de déterminer si l’écriture était celle de mon père, celle de ma mère, celle de Marischa ou si les lettres et les chiffres avaient été écrits par des personnes différentes. J’ai cherché une signification à ces caractères sur le Web, sans succès.

Il y avait aussi deux cartes routières de la région. Je les ai ajoutées au tas.

J’aurais pu en rester là.

Jean-Charles entre dans le bureau.

— Bonjour Stanislas.

— J’ai passé trois jours à l’hosto. À ton avis, combien de mails m’attendaient quand j’ai récupéré ma bécane ?

Les flics ont ramené le Mac, comme prévu. En revanche, ils ont gardé le Browning Baby. Je suis autorisé à le récupérer si je leur présente le permis de port d’arme qui lui est dédié. Autant dire que je ne le reverrai jamais.

Jean-Charles fait la grimace.

— Je ne sais pas.

— Un chiffre ?

— Trois cents ?

— Quatre cent soixante-sept. À ton avis, combien de ces quatre cent soixante-sept mails méritaient d’être envoyés ?

— Je ne sais pas, une trentaine.

— Un.

Celui d’Axelle me disant que son mari partait en voyage d’affaires et que je pouvais venir la baiser lundi à dix heures.

— Merde !

— Tu l’as dit, merde. Ponds-moi une note de service générale interdisant qu’on m’envoie dorénavant des copies de mails dont je n’ai rien à foutre. C’est pour ça que tu es là. Fais le tri et transfère-moi ce qui vaut la peine d’être lu.

— D’accord.

— Autre chose.

— Oui ?

— Qu’est-ce qui se passe avec Claudine ?

La question l’embarrasse, il esquisse un rictus qu’il efface aussitôt. Il sait qu’il vaut mieux éviter de tourner autour du pot.

— Elle est enceinte, je l’ai appris la semaine passée.

— Tu sais ce que j’en pense.

— Oui, je vais faire le nécessaire.

Travailler ou enfanter, il faut choisir.

Jusqu’à l’accouchement, ça se passe plus ou moins bien. C’est au retour que les choses se gâtent. Elles sont déphasées. Leurs priorités ont changé. Elles parlent layettes, biberons et téléphonent à la nounou trois fois par jour.