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Habituellement, je parle facilement aux gens qui font de la photo, puisque je m'y intéresse; pour mon futur métier de détecti­ve, c'est important. Mais là... je n'ai pas eu trop envie! Flash-Fluo devait être le genre de gars qui photographie les filles en bikini. J'ai préféré rejoindre mon cousin et ses amis.

Chapitre 5 John m'énerve!

Pierre ne m'a même pas vue arriver, car il n'avait d'yeux que pour une grande brune aux cheveux si longs qu'elle aurait pu s'as­seoir dessus. Elle me regardait avec une drôle d'expression quand je me suis appro­chée de mon cousin, mais elle m'a fait un grand sourire quand il m'a présentée:

— Ma petite cousine Natasha. Nat, voici Maia, la soeur d'Antonio.

— Salut!

— Tu as ramassé des coquillages? As-tu trouvé ce que tu voulais? m'a-t-elle deman­dé avec un sourire étrange.

Avait-elle deviné que le beau gars me troublait? C'était impossible! Mais je vou­lais en avoir le coeur net. Si elle aussi se pâ­mait pour lui, je n'avais plus qu'à faire mes bagages et rentrer au Québec: elle avait des jambes à la Marlène Dietrich! C'est une vieille actrice, mais il paraît que ses jambes ont toujours été parfaites.

— Non, il n'y avait pas grand-chose. Mais j'ai vu des gens qui en échangeaient. Ça se fait souvent, j'imagine?

— Oui.

— Le gars blond en maillot noir avait l'air d'en avoir des gros.

— Jeremy? Ah!... Octave l'a interrompue:

— Si on allait jouer au billard électrique?

— Ben... je ne sais pas trop.

— Oui, oui, a dit Pierre en souriant à Maia.

Bon, j'avais compris! Je serais obligée de me farcir quelques parties pour faire plaisir à mon cousin. J'espérais aussi que je pourrais apprendre quelque chose de Maia. Elle savait peut-être si le beau gars avait une blonde...

Rien. Je n'ai rien pu savoir. Quand j'ai parlé de lui, John a dévisagé Maia. Elle m'a dit qu'elle le connaissait seulement de vue.

Puis John a fait un clin d'oeil à Antonio qui a eu un sourire contraint. John a dit:

— Jeremy, ifs my problem... He'll soon understand.

Ou quelque chose comme ça. Je n'étais pas certaine d'avoir bien compris les mots, mais le ton, le regard étaient sans équi­voque. John n'aimait pas Jeremy. Et moi, je n'aimais pas John. Il avait des gestes brusques et il était très nerveux. Il s'excitait sur le billard électrique comme si c'était la fin du monde de perdre.

Pourtant, ce n'était pas lui qui payait les parties, c'était Octave. S'il voulait m'épater, il avait raté son coup. Moi, le billard élec­trique... Finalement, John a donné un coup de poing sur la machine, puis il s'est dirigé vers un gars qui venait d'arriver.

— Il aurait pu nous dire au revoir, ai-je marmonné.

— Tu sais ce que c'est, les artistes... a commencé Antonio.

— Non, je ne sais pas. Pierre joue du saxe et il est quand même parlable! Il joue de quoi, lui, John?

— Euh!... Du piano. Comme moi, a dit Octave.

Il avait hésité à répondre, j'aurais pu le jurer! Mais qu'est-ce que c'étaient toutes ces cachotteries?

— Tiens, j'ai une idée! Pierre pourrait apporter son saxe ce soir sur la plage et on danserait! O.K., Pierre?

— Oh oui! a fait Maia en battant des mains.

Inutile d'ajouter que Pierre a accepté en rougissant.

Il était si nerveux quand on est rentrés que je me suis demandé s'il n'aurait pas les mains moites et si ses doigts ne glisseraient pas sur les touches... Le saxophone, c'est super, mais quand ça sonne juste. Sinon, ça fait des couacs épouvantablement ridicules.

Toutefois, il fallait auparavant prévenir nos grands-parents.

En marchant vers l'île, mon cousin m'ex­pliquait que Maia était la plus merveilleuse de toutes les filles qu'il avait rencontrées. Il ne pouvait plus se passer d'elle et il était cer­tain qu'ils s'embrasseraient le soir même.

— Je le sens! Elle en a envie autant que moi!

— Tu n'es pas un peu pressé?

— On n'a pas de temps à perdre! Il nous reste neuf jours de vacances!

— Et après? Si vous vous aimez? Vous allez vous ennuyer?

— Elle pourrait venir à Montréal à Pâ­ques! On va s'écrire! Se téléphoner!

Comment raisonner quelqu'un qui vient de tomber amoureux? J'ai dit que j'essaie­rais de convaincre nos grands-parents. Si Pierre devait en principe être mon chape­ron, moi, j'étais son alibi!

— Tonio et John seront là ce soir?

— Je suppose.

— John me déplaît. Il ne nous regarde jamais dans les yeux.

— Il est sûrement gêné.

— Pas pour quêter de l'argent en tout cas. Il profite d'Octave.

En rentrant à l'appartement, on a dit qu'on resterait près de l'hôtel, autour de la piscine, et qu'on ne se baignerait pas dans l'obscurité.

— Le père d'Octave sera là? a demandé grand-papa.

— Non, ai-je dit.

J'ai failli mentir, mais ils auraient peut-être voulu le rencontrer, et ça aurait été pire!

— Il est parti à la pêche, a précisé Pierre. Il revient demain.

— Il laisse Octave seul? Il n'était même pas là pour l'accueillir. Je n'aime pas ça, a fait grand-maman.

Il y aurait des choses qu'elle aimerait en­core moins durant les prochaines heures!

Chapitre 6 La proposition de John

Parmi les choses que ma grand-mère n'aurait pas appréciées, il y avait la pro­position que John nous avait faite sur la plage: prendre du crack. Ça, j'étais certaine que mes parents n'auraient pas aimé non plus. Ni ceux de Pierre. Ni moi d'ailleurs.

Du crack! Je ne savais pas si tout ce qu'on racontait sur cette nouvelle drogue était vrai, mais je n'avais pas follement envie de vérifier. J'avais regardé un repor­tage à la télévision à Montréal et j'étais en Floride depuis à peine une journée que j'avais déjà vu deux flashes spéciaux à un réseau américain.

C'était plutôt inquiétant, même en sup­posant que les journalistes exagèrent un peu. On prétendait qu'un «sujet» (genre adolescent) est dépendant du crack après quelques prises, et parfois même une seule! Autrement dit, le crack serait pire que l'hé­ roïne et la cocaïne. Et cent fois plus dange­reux que le haschich ou la marijuana! Mais beaucoup moins cher!

L'offre de John ne m'emballait pas du tout. J'ai regardé Pierre qui se concentrait un peu trop sur son saxophone, comme s'il voulait éviter de lui répondre. Il appuyait sur une touche, puis sur une autre, portait le bec à ses lèvres, posait l'instrument, le reprenait.

— Alors? a demandé Tonio. Ça vous tente?

Est-ce qu'il attendait notre bénédiction pour essayer?

J'ai haussé les épaules:

— Chacun fait ce qu'il veut. Moi, ça ne me dit rien. J'aime mieux ramasser des co­quillages.

John a répété «coquillages, coquillages», puis il a regardé Maia et Tonio et dit cette fois:

— Shells?

Et il a éclaté de rire.

— Qu'y a-t-il de si drôle? ai-je deman­dé, mécontente.

— Rien, a dit Octave d'un air embarrassé.

— Ifs not expensive! a repris John. For thefirst time, ifsfreeforyou.

— No, thanks...

Il s'est tourné vers Pierre et lui a fait la même offre. Pierre a haussé les épaules comme s'il hésitait. Je lui ai secoué le bras:

— Es-tu fou? Tu ne vas pas prendre du crack?

Maia s'était approchée de l'autre côté:

— Tu pourrais essayer... On pourrait es­sayer ensemble. O.K., Pierre?

J'ai explosé:

— Prends-en si tu veux, mais nous, on vous le laisse!

— Mais juste une fois! a plaidé Pierre. Une petite, minuscule, infinitésimale fois!

— Tu peux aussi te jeter du pont Jacques-Cartier juste une fois pour voir ce que ça fait!

— Je vais réfléchir, a dit lentement Pierre à ses copains. Ce soir, on était censés jouer! Où sont vos instruments?