— Si tu croives qu’y s’occupe d’nous !
De manière péremptoire, elle ôta sa vaste culotte qui, une fois séparée d’elle, ressembla à un parachute après l’atterrissage. Elle ouvrit ses énormes cuisses afin de régler leur compte aux ultimes objections de son époux.
Ce dernier regarda la seconde forêt qui lui était offerte, au sein de laquelle on devinait comme des caroncules de dindon.
Vaincu par tant d’affriolances, il transforma son pantalon en socquettes.
Bien qu’extrêmement brefs, les préliminaires avaient suffi à transformer le sexe du guerrier en colonne dorique. Faisant foin des papouilleries d’usage, il s’empara de sa moitié (une moitié copieuse comme une entière !) et commença à la perpétrer. Malgré l’importance de son membre, le déduit fut tout de suite générateur de sensations fortes car la belle avait le désir lubrificateur.
Deux écureuils au pelage gris cendré s’interrompirent de bouffer des glands devant un aussi charmant spectacle.
Emportée par l’intensité de son plaisir, la voluptueuse compagne du promeneur se mit à lancer des cris prometteurs d’une rapide libération. Le gamin dénicheur prit peur en les entendant. Il eut un soubresaut qui lui fit lâcher la branche à laquelle il se cramponnait et chuta à travers les frondaisons. Il se serait volontiers[9] rompu le cou si son ange gardien zélé ne l’avait fait assolir dans un taillis qui, pour être épineux, n’en amortit pas moins le choc. Le dadais se prit à pousser des clameurs pour film de corsaires (séquence de l’abordage par un bateau turc).
Le père se hâta de remonter son pantalon et la maman de se torchonner le mistigri avec une poignée d’herbes.
Tout en détartrant son vase d’expansion, elle invectivait le père coupable d’avoir accordé une permission qui aurait pu causer le trépas de leur unique héritier. Cette colère parut injuste au mâle, lequel avait quelque difficulté à remiser son module Apollo dans ses braies. L’engin tardait à retrouver sa position de repli car, même après la salve libératoire, son appareil reproducteur, émotion ou non, gardait longtemps encore sa vigueur.
Le chef de famille se lança courageusement à l’assaut des taillis, armé de son seul Opinel, couteau qui appartient au patrimoine de la France et contribue à sa gloire, tout autant — sinon plus — que la base de Kourou.
Je me tenais à l’affût, assis sur une souche que se disputaient vers et champignons. Arrivé dans les Carpates la veille, je faisais du repérage en compagnie des « Frères Karatastrophe » Blint et Howard.
Cela avait débuté par une vadrouille autour de la citadelle de Bistroka, bâtiment pénitentiaire rébarbatif aménagé par les communistes dans un ancien château du XVe siècle. Les douves de jadis avaient été remplacées par un vilain mur édifié à la six-quatre-deux, lequel était hérissé de pics que le premier con venu aurait réputés « acérés ». Des postes de garde s’élevaient aux quatre angles et une seule issue permettait de pénétrer dans ce lieu angoissant, voire hypothétiquement d’en sortir.
Pas de la tarte !
Blint, qui m’escortait, m’avait coulé un regard en chanfrein. Son petit visage rusé de vicieux torve s’était enrichi d’un sourire ironique.
« — Pas facile, hé ? » avait-il murmuré.
Je m’étais abstenu de répondre, ne voulant jouer ni les matamores, ni les défaitistes.
Au cours de mon « entraînement » j’avais appris le roumain, langue latine, comme les analphabètes l’ignorent, et qui se laisse facilement apprivoiser par un Français pour peu qu’il soit d’une nature persévérante.
Après une nuit passée à l’auberge Christophi, nous avions tenu conseil. Mes compagnons furent d’accord pour que nous investiguions séparément.
En l’occurrence, j’étais le chef de l’expédition et ils se montraient dociles. Je leur confias la surveillance des allées et venues aux abords de la forteresse et me réservis l’exploration du chemin qui s’enfonçait dans la forêt, voie dont j’espérais beaucoup dans l’hypothèse où notre coup de main réussirait.
Et puis m’y voici donc, vicomte.
Quel n’est pas mon abasourdissement que d’y découvrir trois promeneurs auxquels je ne m’attendais guère, à savoir le ménage Bérurier et son unique enfant Apollon-Jules.
Dieu, que la vie est surprenante ! Charognarde la majorité du temps, mais si riche en imprévus qu’on finit par lui pardonner ses fumiardises sans nombre.
J’observe le comportement de ces étranges bipèdes qui se démènent pour extraire d’un fourré barbelé par la nature le louche résultat de leurs copulations. Le gamin continue de rameuter la garde par ses cris d’orfèvre (se dit également « d’or frais »). J’ai assisté à leur accouplement farouche. Spectacle somptueux. Leurs gros ventres, en s’entrechoquant, produisaient le bruit que faisaient jadis les lavandières portugaises en battant le linge (maintenant, elles sont toutes équipées par Electrolux et le folklore l’a dans le cul). Et puis leur moutard arboricole s’est fraisé au moment du lâcher de Sa Majesté et des recherches sont entreprises pour le détailliser, puis le déroncer. Peu commode. Ils n’y parviennent qu’après de longs efforts. C’est un goret qui a valdingué, ils récupèrent un porc-épic.
La mère, oublieuse de la troussée qu’elle vient de se coller dans la caisse enregistreuse, condamne derechef le laxisme paternel. Elle dit qu’avec un gamin aussi stupide que son père, la cata était incontournable. A quoi le pater familias riposte qu’il est logique d’avoir un chiare aussi branque quand le seul exercice que la mère se donne, c’est pour pomper des chibres ou se les faire encastrer dans la moniche.
Les échos de la forêt se font un malin plaisir de réverbérer l’aimable discussion. Apollon-Jules continue de bieurler.
Picaresque !
On extrait le dénicheur de son buisson ardent de zobs et pines en flirt. Il a la frime lacérée et sanguinole d’un peu partout. La Berthe égosille qu’un polo tout neuf, bordel, regardez-moi dans quel état qu’il l’a mis, l’est juste bon à faire des chiftirs à poussière !
Ma survenance met fin au concert imprécatoire. Les trois cessent de parler, partant, de débloquer, et me défriment comme si j’étais le prince de Galles en tournée d’introspection à Balmoral.
— Alors, mes amis, leur fais-je-t-il, ça vous plaît, les Carpates ?
J’ai laissé pousser ma barbe, façon capitaine Haddock, et ils ont du mal à me « remettre » en plein. Le môme, en tout cas, pas du tout.
— Qui qu’ c’est, c’con ? s’informe-t-il auprès de son paternuche.
Je fais signe au Mafflu de me suivre dans le sombre sous-bois afin que nous puissions y échanger des paroles riches d’enseignement.
— Comme je ne crois pas lerchouille au hasard, je ne pense guère qu’il s’agisse d’une coïncidence ? interrogé-je.
Il revient gentiment de sa stupeur.
— C’est le Négus qui t’remplace en ton absence.
— Il t’a ordonné de venir dans ce coin perdu ?
— Mouais.
— Il savait que je m’y pointerais ?
— Mouais.
— Qui l’a prévenu ?
— N’a pas fourni d’esplicances ; t’sais, les négros, quand t’est-ce y z’ont l’autoritance, y s’croivent !
— Ça s’est fait comment ?
— M’a dit d’viendre av’c ma gerce et le chiare dans c’patelin d’chiottes. Si tu croives qu’ Berthy apprécecille : ell’ d’vait aller aux Canaries av’c not’ pot’ Alfred. V’là deux jours qu’on est laguche, et pour c’qu’est d’s’plumer, on s’plume ! J’sus t’obligé d’la calcer trois fois par jour pour y fournir quéques distractions. Reusesement y a des gardes d’la forteresse qui vient boire l’coup à l’auberge. J’pense qu’ell’ est en train d’chambrer un gradé baraqué armoire normande, av’c d’grosses moustaches qui la fait rêver, ma Grosse. Elle raffole se laisser groumer la chaglaglatte par un gonzier qu’a d’grandes baffles. S’l’ment, j’sais pas si ça va boumer : la minette, c’t’une combine d’chez nous. Dans les aut’ patelins, les mecs, souvent, font la fine bouche.
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Pourquoi « volontiers » ? Là réside ce que Jérôme Garcin appelle :