Malko commença un mouvement très lent, freiné par l’eau qui ne facilitait pas un échauffement rapide. Jusqu’à ce qu’un coup de houle plus fort l’arrache de Rhonda. Il revint sur elle, à tâtons, chercha l’ouverture de son ventre, eut l’impression de la trouver, poussa pour la prendre de nouveau.
Rhonda eut un petit cri :
— Doucement. Tu me fais mal.
La houle revenait, plaquant Malko contre elle. Cette fois il acheva sa pénétration involontairement brutale. Rhonda se raidit.
— Attends, ne bouge pas tout de suite, j’ai mal…
Il obéit, puis commença à bouger lentement. Honteusement ravi que la houle lui ait fait exaucer son vœu secret.
Assez vite Rhonda ne se plaignit plus, au contraire, elle se collait à lui, comme pour l’aider à mieux la pénétrer. Il effleura son épaule de ses lèvres. Aussitôt, elle murmura :
— Bite me ! Bite me[19] !
Malko enfonça ses dents dans la chair tendre. Comprenant pourquoi Rhonda était restée si longtemps avec Brownie Cassan. Elle se cambra violemment quand il se vida dans ses reins.
Ils ne se détachèrent pas l’un de l’autre, restant debout dans l’eau.
Ensuite, elle se retourna :
— Ils doivent être partis. Cela fait une heure.
Ils se séparèrent enfin et, la première, elle se hissa rapidement le long de l’échelle. Aucune réaction. Malko la rejoignit.
— Nous allons dériver sans moteur le plus loin possible, dit Rhonda. Sinon ils risquent de nous entendre. Le courant va nous emmener vers le large et la marée est haute. Je vais couper le cordage de l’ancre. Tant pis, il y en a une autre à bord.
Elle se faufila à l’avant, sans un bruit, après avoir pris un poignard. Malko sentit une petite secousse ; le cabin-cruiser se libérait. Rhonda revint et ils restèrent dissimulés sur le pont, immobiles, regardant la plage défiler avec une lenteur exaspérante. Soudain, la houle claqua plus fort contre la coque : ils venaient d’atteindre l’eau profonde. Aussitôt Rhonda s’installa aux commandes.
Les diesels ronflèrent et le cabin-cruiser bondit dans les vagues, s’éloignant de l’île.
Ils l’avaient échappé belle.
— Il vaut mieux aller jusqu’à Bird, dit Rhonda. À 1 500 tours, nous en avons pour deux heures et demi. C’est plus prudent.
Tandis qu’elle maintenait le cap, Malko entreprit de ranger le matériel de plongée sous-marine qui encombrait la plage arrière. La nuit serait courte et ils avaient du pain sur la planche pour le lendemain.
Malko se réveilla le premier, à cause du jour qui filtrait par l’écoutille et de la houle. Ils étaient arrivés à Bird Island à trois heures du matin. Le temps de trouver l’ancre de secours, et de s’amarrer en vue de la plage, il était près de quatre heures…
Rhonda dormait sur le côté, lui tournant le dos, sur la couche voisine. Il vint s’emboîter contre elle. Elle bougea dans son sommeil, ondulant légèrement, avec un soupir. Le reste se fit tout seul. Comme dans l’eau, au début de la nuit. Il resta immobile, abuté en elle, sentant le sang battre dans son membre.
Rhonda, apparemment, continuait à dormir. Malko n’avait pas envie de bouger. Comme par miracle, le cabin-cruiser se mit soudain à rouler, bord sur bord. Malko passa un bras autour de la taille de sa partenaire pour ne pas la perdre et laissa faire la mer. À chaque coup de roulis, il sortait presqu’entièrement, puis la mer le précipitait de nouveau dans l’étui chaud et humide.
Il prolongea le plus possible jusqu’à ce qu’une vague plus forte lui arrache son orgasme. Rhonda, prise de court poussa un petit cri, se retourna et vint se blottir dans ses bras.
— Ce n’est pas juste, dit-elle, je ne peux jouir que quand je me caresse.
— Caresse-toi, dit Malko.
Elle laissa glisser sa main vers son ventre et, très vite, aux vibrations rapides de son poignet, il s’aperçut qu’elle avait suivi son conseil.
Cela dura plusieurs minutes, puis la jeune femme se détendit d’un coup avec un léger gémissement.
Elle laissa sa respiration se calmer puis s’arracha de la couchette.
— Je vais faire du café, dit-elle.
Malko sortit sur le pont arrière. Suivant des yeux la silhouette somptueuse de la jeune Australienne. Quel blocage psychique l’empêchait d’avoir une vie sexuelle normale ?
Les milliers d’oiseaux commençaient à s’envoler avec le soleil. Bird Island dormait encore et ils étaient le seul bateau à l’ancre. Le café fut prêt en trois minutes. Rhonda chantonnait, ravie. Quand elle monta sur le flying deck pour mettre en route les diesels, elle lui dit pensivement :
— Tu sais, je pourrais être très amoureuse de toi, mais il ne faut pas.
— Pourquoi ? demanda Malko.
— Parce que nous appartenons à deux mondes différents. Tu partiras et je ne te reverrai jamais. Je n’aurais plus qu’à revenir avec Brownie.
— Après ce qu’il t’a fait ? demanda Malko étonné de cette résignation.
— C’est le seul homme qui me fasse jouir, avoua la jeune femme. Et je n’ai pas envie de retourner en Australie. Tiens, va relever l’ancre, s’il te plaît.
— Nous devons y être, annonça Rhonda.
Malko se pencha par-dessus le bastingage du flying deck et regarda l’eau turquoise. Rhonda avait maintenu le cap depuis Denis dont ils avaient frôlé la pointe pour ne pas risquer de s’égarer. Ils avaient parcouru 15 miles et en principe se trouvaient au-dessus de la barrière de corail.
— Je ne vois pas le fond, dit-il.
Rhonda quitta les commandes et vint s’agenouiller devant le sondeur encastré à tribord, dans la paroi avant de la dunette. Après avoir ouvert le volet de protection, elle le mit en route, examinant les oscillations de la pointe sèche.
Malko vint la rejoindre. Elle lui désigna le stylet qui grattait le rouleau de papier.
— Tu vois, chaque graduation fait quatre mètres. Il y en a 5. Nous avons 20 mètres de fond. C’est bien le sec. Mais il y a des profondeurs différentes selon les endroits.
— En dehors du sondeur, il n’y a aucun signe ?
— La couleur de l’eau.
— Tu as déjà vu la tête du corail qui se trouve en surface ?
Elle secoua la tête.
— Non. Brownie est tombé dessus un jour. Par hasard. Il faut quadriller. En respectant les caps…
Malko effectua un rapide calcul mental. Quinze kilomètres carrés cela faisait quinze cents hectares à ratisser…
— Eh bien, allons-y, dit-il.
Rhonda remit en marche à petite vitesse. Le temps était toujours aussi beau et la mer absolument vide. Malko ferma les yeux, bercé par le mouvement de la mer ; heureusement que Brownie Cassan avait fait le plein de mazout en partant de Victoria.
— Il nous reste du fuel pour deux jours, annonça Rhonda en remontant sur la dunette. Après il faudra rentrer…
Malko ne répondit pas, découragé, la peau cuite par le soleil. C’était le quatrième jour de la même routine ! Départ de Bird au lever du soleil, passage par Denis pour prendre le cap, quadrillage, retour à Bird, épuisé, dès le crépuscule. Ils n’avaient plus osé aller s’ancrer à Denis. Ceux qui avaient tiré sur eux ne s’étaient plus manifestés. À Bird il y avait trop de touristes pour un coup de main… Écœurés de soleil et de houle, ils ne faisaient même plus l’amour.